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Critique de Andromeda06


Si Anne Frank et son Journal n'est plus à présenter, c'est grâce à son père qu'on le doit. Seul survivant des huit clandestins qui se sont cachés dans l'Annexe pendant deux ans durant l'Occupation allemande à Amsterdam, Otto Frank n'a cessé de se battre, et ce quasiment dès son retour du camp d'Auschwitz, pour faire entendre la voix de sa fille, à travers son Journal, en guise de témoignage de ce que les Juifs ont dû subir pendant l'Occupation nazie. Le Journal est l'un des premiers livres à parler ouvertement de la persécution des Juifs et de l'Holocauste. En 1947, les gens refusaient d'entendre ce genre de témoignages, on voulait oublier plutôt que d'en parler. Sans doute était-ce plus facile... Ainsi, Le Journal a eu du mal à percer et à se faire connaître. Il aura fallu une adaptation au théâtre, puis au cinéma, pour qu'Anne Frank soit connue du monde entier.

Otto Frank, rentré totalement brisé d'Auschwitz, s'est d'abord raccroché à l'espoir de retrouver ses filles vivantes. Il faisait déjà le deuil de sa femme mais n'avait aucune nouvelle de Margot et d'Anne, il pouvait se permettre d'espérer... C'est à l'annonce de leur décès que Miep Gies lui a remis le Journal d'Anne, qu'elle avait gardé jusque-là précieusement dans un tiroir dans l'optique de le rendre à la jeune fille dès son retour. Otto ne l'a pas ouvert immédiatement, il s'en sentait incapable. Anéanti, il restait au fond du trou et c'est en feuilletant les premières pages du Journal qu'il a commencé à remonter la pente. de là, Otto s'est trouvé une raison de continuer à vivre : en faisant publier le Journal de sa fille, il allait exaucer le rêve de cette dernière. Elle voulait devenir un écrivain célèbre et faire beaucoup pour les autres. Écrivain connue du monde entier, elle l'est devenue... à titre posthume... Faire et se rendre utile à autrui, elle le fait grâce à son témoignage. Puis son père a pris la relève : il y a consacré tout son temps.

Mais si Carol Ann Lee consacre beaucoup de pages à ces épisodes de l'après-guerre, elle n'oublie pas pour autant de commencer par le début. Ainsi, elle évoque d'abord l'histoire familiale des Frank, l'enfance d'Otto, ses études, son entrée dans la vie active, puis son mariage avec Édith et sa vie de famille, jusqu'à leur exil à Amsterdam, croyant être protégés des lois anti-juives. S'en suivent les événements qui touchent à sa vie professionnelle, ses collaborateurs, puis l'arrivée des Allemands sur le territoire néerlandais, la préparation de la "cachette", la vie en clandestinité jusqu'à ce fameux jour d'août 1944 où ils sont dénoncés et arrêtés et où tout bascule dans l'horreur... L'horreur, elle nous la raconte brièvement jusqu'à la Libération en 1945. de là, elle nous expose toutes les étapes par lesquelles il est passé pour devenir le grand homme qui a consacré tout le reste de sa vie aux autres.

J'ai fait la connaissance d'un homme qui, au lieu d'être en colère, au lieu de réclamer justice, n'a jamais cessé de croire en l'être humain. Il m'a profondément touchée. J'ai rencontré un homme à la fois brisé et plein d'optimisme, tantôt mélancolique, tantôt taciturne, tantôt plein d'entrain, mais toujours déterminé. Certains passages m'ont émue aux larmes, alors même que l'autrice ne rentre jamais vraiment dans les sentiments (ce qui n'est pas un reproche, c'est ce qu'on attend d'une biographie).

Elle a fait un travail de recherche faramineux, une sorte d'enquête auprès des uns et des autres, auprès d'un certain nombre d'administrations et d'organismes, pour y rassembler toutes sortes de documents et témoignages divers. Et comme cette biographie d'Otto est parue après celle d'Anne de Melissa Müller, elle a découvert de nouveaux éléments et pu faire le lien avec d'autres... Ainsi, elle a mis au jour un nouveau suspect, en plus de ceux qu'on soupçonnait déjà d'être le délateur, responsable des événements tragiques qui ont eu lieu suite à l'arrestation des huit clandestins. Là encore, il n'y a pas de preuves formelles, juste des suspicions, des doutes, des hypothèses... Après tout ce que j'ai déjà lu sur Anne Frank, je n'avais pas encore entendu parler de ce monsieur. À force, je pensais tout savoir mais, comme à chaque fois, chaque ouvrage apporte son grain de sel, un nouveau point de vue, une autre perspective. Je ne m'en lasse pas.

Je m'étais donné pour objectif d'emprunter et de lire tous les livres de la bibliothèque qui concernaient de près ou de loin Anne Frank. Avec "Otto, père d'Anne Frank", je viens de l'atteindre. C'était le dernier... Mais mon petit doigt me dit que je n'en ai pas terminé... En allant fouiner sur mon site de vente d'occasion préféré (je ne donne pas le nom, j'suis pas sûre d'avoir le droit de faire de la pub ici), je me suis rendu compte qu'il y en avait encore pas mal à découvrir, à tout petit prix en plus... Mon deuxième petit doigt me dit que je ne vais pas tarder à craquer... Mon troisième petit doigt (oui j'ai plein de petits doigts en stock, en cas qu'il y en aurait un de défaillant) me dit que ce n'est pas raisonnable, que j'ai déjà trop de livres à lire, que je ne sais même plus où les mettre (tiens, qu'est-ce que je disais !). Et mon quatrième petit doigt, qui est toujours de bons conseils, me dit de ne pas écouter ce rabat-joie...
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