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Critique de LoupAlunettes


Ceux et celles qui se plongèrent jadis à corps et lecture perdus dans la précédente oeuvre de Lian Hearn, "le Clan des Otori", trouveront de quoi raviver les feux passionnés rencontrés.
"L'Enfant du cerf" se pose comme un préquel à l'autre saga et cette aventure est taillée du même bois.
Légendes, magie, noblesse guerrière et luttes de pouvoir dans le Japon médiéval sont toujours au programme.

Ca n'est que guerre de pouvoir.
Kazumaru, 16 ans, rebaptisé plus tard Shikanoko "fils du cerf" par un vieux sorcier, est sauvé in extremis de la flèche qui lui était destiné par un cerf qui le fera basculer dans un ravin neigeux.
Fraîchement héritier d'un grand seigneur au service de l'actuel empereur, sa place est ravie par son oncle, à l'initiative de la tentative d'élimination. Pour tous, Kazumaru est mort dans un accident de chasse.
C'est delà que son destin va se prédire légendaire, il était attendu et nous n'en saurons pas d'avantage par le sorcier qui lui confectionnera un masque rituel magique à partir du crâne du cerf qui lui sauva la vie.
Quelle sera la place de la magie dans cette toile gouvernementale tissée où sous n'importe quel prétexte fallacieux, on pouvait vous condamner à mort pour faire place nette?
La volonté du sabre et de la position sociale nous semblent ici des armes d'autant pus redoutables et suffisantes.

Il y a bien des choses très importantes qui se dessinent, que les personnages sorciers perçoivent sans en dévoiler aucun des éléments. Un point de suspens posé.

Dès que les lecteurs auront pris un peu de hauteur sur la situation, cela pourrait presque ironiquement les faire sourire, dans la répétition.

Shikanoko évolue dans un empire qui connait des troubles invisibles, où les personnages revêtent des "masques" de dignité et de vertu pour n'attendre que la bonne heure pour frapper et faire en sous-main les bonnes alliances.
L'auteure nous présente un univers très codifié qui rendra la vie des personnages très compliqué en somme, attisant les passions, les rancoeurs, les convoitises.
La place du fils cadet n'y a pas bonne mine hélas, à cause du droit d'aînesse accordé à un héritier.
Ainsi, l'oncle de Shikanoko a t-il pris la place régnante de son frère (et son neveu),
ainsi le seigneur Kiyoyori (deuxième personnage central, que croisera le fils du cerf dans des circonstances que les lecteurs découvriront) trouvera son royaume menacé par les intrigues de son frère cadet, qui se fit dépouillé de son royaume et de son épouse pour les remettre à son aîné dans un projet d'unification.
Tout cela trouvera un prolongement et encore plus d'importance pour ce qui se trame au sommet, il faudra trouver les bonnes alliances pour ses projets et prêter allégeance avec discernement aux bonnes personnes si une lutte pour le règne de l'empire éclate à l'extinction du dernier souffle du vieux régnant malade.
Là aussi, il y a des projets de lutte fraternelle entre le digne héritier Momozono et son cadet Deiga.
Mais attendra t-on le dernier souffle du vieil empereur pour obéir à la tradition ou lui damner le pion?

C'est un véritable échiquier sur lequel vient se calquer un voile de surnaturel et de sorcellerie.
Le grand prince abbé, puissant prêtre impérial, ne nous laissera pas de doute sur l'utilisation de son art mystique pour se trouver près du pouvoir régnant qu'il a choisi.
En revanche, la mystérieuse et ensorcelante Dame Tora, celle-là même qui tracera la destinée de l'enfant cerf et le guidera sporadiquement pour qu'il s'accomplisse, ne dévoilera pas aussi clairement son intérêt à ces jeux de chaises musicales.
Avec l'apparition de la Dame Tora, les lecteurs du "Clan des Otori" reconnaîtront une sensualité revendiquée par l'auteure qui ne destine pas l'aventure à un trop jeune lectorat. La saga offrira des personnages féminins aussi divers que riche, dont Aki la future prêtresse, protectrice de l'enfant futur empereur ou même Tama, l'épouse du frère du seigneur Kiyoyori qui lui fut donné avec son domaine.

La dernière partie du roman offrira un moment épique où les éléments naturels même rugissent et l'enfant héritier du grand-père empereur devra fuir et être protégé à n'importe quel prix.
Sans être manichéen, cela reste la lutte du bien contre un mal défini.
La magie se jouant souvent de "l'enfant du cerf", sera t-il l'instrument de la protection ou sera t-il celui qui livrera l'héritier de sept ans à ses ennemis?

Pour ce premier tome, Lian Hearn pose son décor, ses personnages, ils sont nombreux, cela demandera un petit effort aux lecteurs pour démarrer de distinguer petit à petit qui est qui, quels sont les implications des personnages dans l'intrigue qui va se dessiner.

L'auteure ne se lance pas dans une narration classique, elle fait alterner les chapitres entre les personnages, surtout entre deux éléments majeurs de la saga, chaque partie permettant un portrait, qui les définit, qui restitue leur position sociale. Lian Hearn rend ses personnages très humains et très faillibles, il ne sera pas toujours simple de statuer au préalable du destin des uns et des autres, les amours, les regrets ou les colères déséquilibreront la balance constamment.
Les intérêts personnels alimenteront un bout de l'intrigue globale, offrant principalement deux ou plusieurs points de vue géographique, dans et autour du palais impérial et deux bouts de la lorgnette.
L'écriture est délicate, poétique, séduisante, démonstrative parfois mais pas crûe.
L'expression des passions passeront par un biais charnel aussi bien que par la cruauté martiale et virile de la fiction.
Il faut un peu s'accrocher à la lecture au début, encore une fois, mais cela vaudra la peine pour les grands amateurs du genre.
A découvrir.
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