AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Lesperanza


Il y a de ces ouvrages qui ne laissent pas indemne.
Des ouvrages qui ne peuvent laisser indifférent.
Celui-là en fait partie.

On pourrait dire que c'est un témoignage de la Seconde guerre mondiale parmi tant d'autres.
Après tout, toutes les biographies/autobiographies sur cet évènement sont terribles et méritent d'être lues…
M'enfin en tout cas, me concernant, je ne regrette pas d'avoir découvert le récit de Martin Gray.

J'ai appris l'existence de controverses sur cet ouvrage juste avant de commencer ma lecture. Cela m'a un petit peu refroidie sur le moment car j'avais envie de lire une « vraie » autobiographie/biographie sans éléments de fiction/romancés, maiiiis malgré les remises en question quant à la véracité de certains faits relatés, il n'empêche que je voulais lire ce témoignage depuis un long moment. Je ne me rappelle même plus depuis combien de temps il trainait dans ma PAL…

Au nom de tous les miens est construit de manière assez classique, c'est-à-dire avec une approche chronologique.
Tout commence à Varsovie, où Martin Gray voit, à dix-sept ans, se former le ghetto de Varsovie en 1940. Décidant de risquer sa vie chaque jour, il franchit les murs plusieurs fois dans la même journée afin de rapporter de la nourriture dans le ghetto. J'ai de suite été frappée par ce courage, cette résistance physique et mentale et cette rage de vivre. Tout cela me semble inimaginable. Mais bon, en même temps… si on ne m'avait pas raconté ce qu'il s'était passé durant cette période, jamais je n'aurais pu l'imaginer de moi-même… Alors bon. Étant donné le contexte, quand il s'agit de risquer sa vie ou attendre que la mort vienne nous chercher, peut-être le premier choix paraissait être le plus cohérent…

Le ghetto de Varsovie, c'est environ un tiers de l'ouvrage, pendant lequel, tout d'abord, le narrateur raconte comment il arrive à survivre avec l'aide de camarades. Par la suite, cela devient bien plus difficile. L'étau se resserre. Les rafles commencent en 1942 et se multiplient afin de déporter la population vers Treblinka.

Martin Gray finit par arriver lui-même dans le camp. Il y décrit l'horreur du quotidien, les scènes insoutenables, les morts, les suicides, et, pour lui, la volonté de survivre et de s'enfuir.

Son récit se poursuit à travers sa fuite, sa rencontre avec des gens qui l'aident - ou non - à obtenir un travail quand on veut bien de lui, en échange de nourriture et d'un endroit pour dormir.
Il évoque aussi ses tentatives d'aller à la rencontre de personnes, de juifs, pour leur parler de la réalité et de l'horreur de Treblinka ; et des juifs qui ne veulent pas l'écouter…
C'est vrai qu'à cette époque, le monde n'était pas prêt à faire face à la réalité de ce qu'il se passait. Je suppose que cela a du être insupportable de vivre en ayant vécu l'inhumain avec tout autour de nous ces gens qui ne veulent rien entendre… Et en même temps, comment leur en vouloir ?…

La force d'esprit de Martin Gray m'a semblé irréaliste à de nombreuses reprises. J'avais souvent cette impression qu'il était « héroïsé » et cela pouvait avoir tendance à me sortir de ma lecture. Après, c'est sûrement de par mon caractère et mon incapacité à pouvoir m'identifier à un personnage pareil que j'ai eu ce ressenti…

Le narrateur s'enfuit encore, survit, retourne à Varsovie. C'est à ce moment-là qu'il nous conte le soulèvement du ghetto, cette révolte armée de 1943.
Par la suite, Martin Gray rejoint ce qu'il appelle les partisans. Un groupe qui cherche à résister, se venger. Tuer. de la violence, encore, encore, encore.
Il intègre la NKVD, au sein de laquelle il finit la guerre. On le charge de traquer des collaborateurs, mais bien qu'il soit animé d'une envie de se venger pendant un moment, il a rapidement le sentiment de faire partie des bourreaux.

La troisième partie représente son départ pour une nouvelle vie. Il part à New-York, rejoint sa grand-mère et commence à faire des affaires pour faire fortune. Il ne se pose pas une seconde, finit par faire de nombreux allers-retours entre New-York et l'Europe. Pendant une partie de ma lecture, je n'ai pas du tout réussi à me sentir proche de lui car je ne comprenais pas ses agissements et je ne le voyais pratiquement jamais s'effondrer. Et puis j'ai fini par me demander si ce qu'il entreprenait n'était justement pas un moyen pour éviter de s'effondrer, combler un vide, faire taire ses pensées intérieures et ces images qui le hantent… On ne s'y attarde pas beaucoup, mais il m'a semblé qu'à un bref moment on a justement un entraperçu de ses sentiments teintés de désespoir...

Plus tard, il rencontre Dina. Cette partie de sa vie constitue alors la quatrième partie de l'ouvrage. le début semble être tout ce qu'il y a de plus utopique… je prévoyais la chute à venir, sans avoir envie d'y arriver.

La fin (la cinquième partie) était déjà annoncée dans la quatrième de couverture. Pourtant, ce fut une claque.

J'ignore si c'est l'ouvrage biographique sur la Seconde guerre mondiale qui me marquera le plus, mais il n'y a aucun doute sur le fait qu'il s'agisse d'un témoignage méritant pleinement sa place et la renommée qu'il a eue. Quant aux controverses sur la véracité de ses jours à Treblinka, je me dis que si Martin Gray ne les a pas vécu, alors cela reste toujours ce qu'ont vécu d'autres…
La seule chose qui m'a manquée est, je pense, ma proximité avec le narrateur. Comme je le disais ci-dessus, je pense que c'est dû à la façon dont il a été présenté. Sa force d'esprit ne peut que forcer l'admiration, mais elle m'a paru souvent peu réaliste et j'ai trop eu cette impression « d'héroïsation ». Peut-être parce que je suis ce genre de personne qui n'aurait jamais pu réaliser de tels exploits… Toujours est-il que j'ai ressenti tout du long une certaine distance avec le narrateur. (Sauf à certains moments et notamment concernant la fin, qui m'a pas mal impacté…) Certes il a vécu des choses si inhumaines que cela semble inconcevable sans l'avoir vécu, pourtant, j'ai eu davantage cette impression avec Martin Gray que pour d'autres narrateurs qui avaient aussi pourtant vécu des choses que je ne comprendrai jamais. Comme quoi…

Mais bon ! Tout ceci n'est que pur ressenti personnel. Il est indéniable, et je pèse mes mots, que cet ouvrage mérite d'être lu.
Commenter  J’apprécie          302



Ont apprécié cette critique (30)voir plus




{* *}