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Critique de SZRAMOWO


Après guerre, le maintien l'Espagne de Franco, qui avait bénéficié du soutien sans fard de l'Allemagne nazie pour mener à bien l'extermination des Républicains, reste une exception qui ternit la victoire des Alliés.
Un des personnages du roman souligne « (…) la paix n'avait pas nuancé les couleurs du monde dans lequel il vivait. Tout continuait à être blanc ou noir, et dans ce contexte les partisans d'Hitler qui n'étaient pas jugés à Nuremberg pouvaient être blanchis, par un coup de baguette magique. »
Dans ce blanchiment, l'Espagne jouera un rôle majeur en mettant au services des anciens nazis ses réseaux en Amérique du Sud et plus particulièrement en Argentine.
Le roman d'Almudena Grandes fait vivre cette époque au travers de personnages qui ayant vécu la guerre d'Espagne, choisissent la clandestinité dans leur propre pays après la victoire de Franco.
« L'homme que tu as connu n'existe plus ; il avait alors plein de choses à perdre, et beaucoup de raisons de vivre. »
Les patients du docteur Garcia est une saga qui nous emporte des années 20 jusqu'à la fin du XXème siècle en Espagne en Argentine, aux USA mais aussi en Allemagne, en France et en Suisse et nous fait vivre les désillusions d'un groupe de Républicains espagnols, dont certains ont exercé des responsabilités pendant la guerre civile, qui ont choisi de continuer la lutte officiellement à l'étranger pour certains, en Espagne dans la clandestinité pour d'autres.
Aussi juste et fondé soit leur combat, il se heurte au principe de réalité qui prévaut après 1945, celui qui est imposé par la Guerre Froide et par la division du monde en deux blocs.
Peu à peu, les portes se ferment, même du côté des USA où un temps le support des démocrates semblait pourtant acquis :
« Tu n'es pas stupide, Sal (…) Seul un imbécile refuserait de comprendre que faire tomber Franco c'est favoriser les intérêts des Russes en Europe. »
Il ne reste aux personnages que leurs désillusions
« Les crimes de guerre n'ont pas suffi, n'est-ce pas ? Des millions de morts innocents, des centaines d'assassins impunis qui se baladent dans le monde tranquillement, grâce à la protection de Franco et à l'hospitalité de Peron. Mais finalement , c'est quoi ? Rien, un détail de l'histoire, un accident… » 
Le roman alterne entre le regard forcément fantasmé des personnages et l'apport de faits réels comme celui-ci, qui fait froid dans le dos :
« (…) quarante-huit heures après le coup d'Etat, le 26 mars 1976, William P. Rogers, ex-secrétaire d'Etat du président Richard Nixon, déclare : « Je crois que nous devons nous attendre à une bonne dose de répression, probablement beaucoup de sang versé, très bientôt, en Argentine. Je crois qu'ils vont devoir bien chercher, non seulement les terroristes, mais aussi les dissidents des syndicats et de leur propre parti. »
Almudena Grandes marie à merveille l'histoire et la trajectoire des personnages qu'elles impacte. Les individus sont les jouets de décisions qui les dépassent et leur force de conviction sera de peu d'aide pour infléchir le cours des événements. Lorsqu'ils imaginent y être parvenus ce n'est que pour constater qu'il n'en est rien.
Alors, agir ou rester spectateur, est un choix cornélien dont chaque individu est le maître sans savoir ni pouvoir préjuger des conséquences que cela peut avoir.
Laissons la conclusion aux deux principaux personnages :
« Nous étions deux blaireaux, et notre vie n'avait pas été un film hollywoodien, mais seuls les vivants peuvent se soûler la gueule. »
Lien : https://camalonga.wordpress...
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