AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Pasoa


C'est à Berlin, ville cosmopolite et artistique, que vit Karsten, jeune architecte, secret et rêveur. Elke, jeune femme plaisante et enjouée, est son amie la plus proche, sa confidente. Elle l'accueille régulièrement chez elle et l'invite à participer à des soirées avec des amis communs. Autour de la table les rires et les propos moqueurs fusent et contrastent souvent avec le caractère réservé de Karsten. Une fin de soirée, ses invités tout justes partis, Elke prête à Karsten une bande dessinée dans laquelle celui-ci s'était plongé avec une grande attention. Son titre : "Prendre refuge".

Ce livre retrace la rencontre en 1939 de deux femmes qui vont s'éprendre l'une de l'autre, histoire librement inspirée de celle qu'on vécu les deux voyageuses, écrivaines et photographes Eliane Maillart et Annemarie Schwarzenbach. C'est par le regard de Karsten, comme une lecture subjective que l'on entre à un moment de leur histoire, celle de leur amour naissant, dans la région montagneuse de Bâmiyan, au centre-est de l'Afganisthan, lieu où se trouvaient alors des énormes statues de Bouddhas scupltées dans la roche.

À Berlin encore: Neyla est astronome, elle enseignait cette discipline à Alep, en Syrie. Elle a dû quitter son pays en proie à la guerre civile et a trouvé refuge depuis quelques semaines dans la capitale allemande. Seule et démunie, la jeune femme engage des démarches en vue de régulariser sa situation de réfugiée. C'est à ce moment et de manière inattendue qu'elle fait la rencontre de Karsten. Rapidement, ils se lient d'amitié, il lui apprend la langue allemande et elle l'écriture arabe et sa signification. Durant tout ce temps passé ensemble leurs liens vont se resserrer. Mais Neyla porte en elle une histoire douloureuse...

Fruit de la belle collaboration entre la dessinatrice Zeina Abirached et le romancier Mathias Enard, "Prendre refuge" est un roman graphique que j'ai particulièrement apprécié.
Comme Zeina Abirached dans son précédent album "Le piano oriental", Mathias Enard, après son roman "Boussole", confie à nouveau sa fascination pour l'Orient et ses ramifications, ses liens avec l'Occident, le beau et nécessaire mélange des cultures, cet ici qui se construit de l'ailleurs, ce soi qui se nourrit de l'autre.
"Prendre refuge", c'est le récit de deux histoires d'amour qui s'entremêlent et se juxtaposent, deux récits atemporels, emprunts d'une certaine nostalgie, qui disent l'attachement, la beauté de pays lointains, leur souvenir jamais éteint mais aussi la peur, la séparation, le déracinement des êtres confrontés à la violence de la guerre, celle d'hier et d'aujourd'hui.

En noir et blanc, les dessins pleines pages ou à plusieurs bandes de Zeina Abirached donnent un rythme tout particulier à la lecture de ce livre, comme les textes de Mathias Enard qui mettent en lumière le caractère et la situation de chacun des personnages. Ce que le texte apporte aux dessins et ce que les dessins donnent au texte n'est ici que poésie et retenue.

"Prendre refuge" est un livre dont je conseille vivement la lecture.
Commenter  J’apprécie          150



Ont apprécié cette critique (11)voir plus




{* *}