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Critique de Zakuro


Des plages et la mer minées. Des tranchées et des lignes de barbelés transpercent la Côte d'Azur. Libérée des soldats allemands par le débarquement des troupes alliées de Provence en août 1944, la plage de Hyères devenue plaie béante a fait disparaître avec elle les souvenirs d'un passé heureux. Vincent, un ancien prisonnier évadé des camps allemands, s'acharne pourtant à y revenir par amour en avril 1945. Dans les derniers jours de la guerre et avant l'armistice, il se portera volontaire pour faire partie de cette autre armée de l'ombre peu connue et reconnue, celle des démineurs.

J'ai eu un très grand coup de coeur pour un monde à refaire de Claire Deya dont c'est le premier roman. Comme j'apprécie les romans se déroulant pendant la guerre, il m'a éclairé sur l'occupation allemande de Hyères et de ses environs avec en toile de fond le château Des Eyguières devenue forteresse ennemie redoutable.

Surtout, j'ai aimé la belle mise en lumière de l'autrice sur les hommes démineurs, d'horizon divers dans un corps à corps halluciné et à mains nues avec les explosifs sans autre moyen que leur vigilance et leur courage. Les démineurs ne sont plus des anonymes, ils ont un nom et une âme. Ce sont aussi des prisonniers allemands abandonnés à leur sort par leur pays.

Claire Deya nous invite dans une tension extrême à lever les yeux sur ces damnés de la guerre. Ceux qui arpentent, scrutent à la simple baïonnette, déminent en ayant la peur au ventre mais avec la culpabilité encore plus grande d'avoir survécu à l'enfer.

La profusion des détails techniques par l'autrice sur la diversité des mines, leur poids et leur matière accentue la pauvreté des moyens humains face à ces machines de guerre monstrueuses.

J'ai également aimé ce roman par sa restitution très marquante d'une époque charnière bien précise, et un lieu emblématique de la côte provençale que l'on peine à imaginer sous les bombes.

Dans un monde à refaire où l'amitié et l'empathie entre hommes résistent à la haine, les femmes ne sont pas en reste. Ariane est le fil ténu qui tient la vie du jeune démineur Vincent. Elles mènent aussi leur propre combat comme Saskia. Quant à Mathilde, elle est la dernière représentante du monde d'avant qui fait de son ancien atelier un havre de paix « des murs blanchis à la chaux, des tapis ronds provençaux en corde comme il y en a dans les salles de bain que Bonnard aimait peindre ».
J'ai aimé lire ces passages où règnent encore la quiétude en lien avec la littérature de Stefan Zweig et Saint-Exupéry.

Un roman humain et puissant sur une autre facette de la guerre avec ses démineurs.

Un excellent moment de lecture dans le cadre du jury des lecteurs de Version Femina.
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