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Critique de mosaique92


J'ai bien fait d'attendre la rencontre avec Sarah Cohen-Scali pour rédiger mon billet sur ce roman car si celui-ci m'avait suffisamment intéressée pour le lire d'une traite j'avais été gênée par son style ‘'littérature jeunesse'', genre qui ne fait pas partie de mes littératures préférées, de même que la littérature ‘'young adults'' (YA).
Entendre un auteur parler du processus de création de son roman, raconter ses mois de recherche et comment certains personnages apparaissent et prennent de la place ‘'à l'insu de son plein gré''… voilà qui vous révèle le roman sous un jour, sinon différent, tout au moins beaucoup plus en profondeur.

Je ne reviendrai pas sur la trame de l'histoire ; le résumé éditeur en donne les grandes lignes.

Ce roman est une leçon d'histoire et une plongée dans l'Europe d'après 2e guerre mondiale loin des anecdotes euphoriques sur ‘'la victoire'' ; et il fait apparaître des similitudes inquiétantes avec notre actualité.

- leçon d'histoire et situation après la défaite allemande : les horreurs du nazisme, la destruction d'une grande partie de l'Allemagne par les bombardements alliés, des populations affamées et n'ayant d'autre recours que le vol, la prostitution ou même le crime pour trouver de quoi ne pas mourir de faim, des milliers d'enfants errants et/ou traumatisés dont il était impossible de retrouver les origines pour la plupart d'entre eux, le traitement des GI's noirs au sein de l'armée américaine, l'occupation américano-anglo-française et russe de l'Allemagne, etc…

- similitudes avec notre actualité : les camps DP (deplaced persons) instaurés par les alliés font inévitablement penser aux camps de réfugiés installés actuellement dans maints pays, les pogroms anti-juifs en Pologne rappellent fâcheusement les chasses aux arabes, chrétiens d'orient et roms (et juifs, quelquefois) dans certains pays (avec, de plus en plus, la caution de gouvernements ou de politiques ultra-nationalistes), le sigle 88 (cf le titre du livre et la citation que j’ai mise en ligne) est un signe de ralliement des actuels nostalgiques du nazisme et de nationalistes d’extrême droite, la situation des noirs aux Etats-Unis n'a pas énormément évolué, l'antagonisme alliés/russes qui a débouché sur une ‘'guerre froide'' d'un peu plus de 40 ans est en pleine recrudescence, les difficultés à prendre efficacement en charge et faire adopter les enfants abandonnés (S. Cohen-Scali a rappelé ces propos tenus par Boris Cyrulnik dans son passage du 12 septembre dernier à LGL : «Je pense aux millions d'enfants abandonnés sur la planète et qui n'auront pas la chance de connaître le destin que vous m'avez permis d'avoir ; c'est à dire que tous ces enfants là, s'ils ne sont pas entourés, on va les étiqueter. Ce seront des enfants abandonnés qui n'auront pas pu se développer normalement parce qu'ils auront été privés de famille et de culture par la guerre, par l'économie, par la folie des hommes. Et c'est ce qui est train de se développer actuellement»**)

Par tous ces aspects, ce roman est un excellent ouvrage pour ados ; grands ados, devrais-je préciser, en raison de la densité des évènements et de la rudesse de certains épisodes. Et la littérature traitant de la réalité des lendemains de la guerre 39-45 est loin d'être pléthorique ; cela donne d'autant plus de valeur à ce roman.


(**) Dans ''Je me souviens'' Boris Cyrulnik parle de son enfance de petit juif ayant échappé à la déportation in extremis et dont les parents sont morts en camp de concentration.
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