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Critique de marielabrousse1


Il m'avait suffi de lire une seule novella (la génialissime Apprendre, si par bonheur que je recommande à quiconque) pour que Becky Chambers devienne l'une de mes autrices préférées. Aussi ai-je abordé cette lecture avec autant d'enthousiasme que d'appréhension : est-ce qu'Un psaume pour les recyclés sauvages pouvait vraiment être aussi bon? Verdict : peut-être un léger cran en-dessous, mais toujours d'excellente qualité.

Sur Panga, l'humanité a échappé au pire. La civilisation a pris une direction plus respectueuse de la nature, nature que les robots sont allés rejoindre après avoir accédé à la conscience. Quelques siècles plus tard, leur existence n'est plus qu'un mythe. Aussi, Dex, moine de thé non-binaire, ne s'attendait définitivement pas à croiser sur sa route Omphale Tachetée Splendide, robot qui cherche à comprendre de quoi l'humanité a besoin. Une question à laquelle Dex aura bien du mal à répondre.

Ce qui se dégage en premier lieu de cette lecture, c'est sa douceur – une douceur bienvenue quand on a l'impression d'être saturé·e de dystopies ou de récits post-apocalyptiques plus noirs les uns que les autres. La dédicace, « Pour vous qui avez besoin de souffler », est d'ailleurs très à propos. Becky Chambers est souvent vue comme une des principales représentantes du mouvement hopepunk, qui cherche à garder vivant un imaginaire optimiste et refuse de s'en laisser dépouiller par un monde de plus en plus sombre. À cet égard, cette novella est caractéristique de ce qu'elle cherche à faire et cette lecture a quelque chose de très réconfortant (plus, à mon sens qu'Apprendre, si par bonheur qui a un côté plus ambigu).

Pour autant, la douceur et l'optimisme ne sont pas synonymes de contenu creux, moralisateur ou dégoulinant de bons sentiments. Becky Chambers passe au crible plusieurs sujets déjà vus, mais sans se contenter d'aligner les lieux communs ni tomber dans la culpabilisation. Qu'est-ce qui pousse les êtres vivants à rechercher le bonheur et la sécurité? Qu'est-ce qui les pousse à en vouloir toujours plus au point de mettre en péril cette recherche de bonheur et de sécurité? Faut-il se couper de la nature pour maintenir avec elle une relation apaisée? Si la vie n'a aucun sens, aucun but, ce qui reste peut-il suffire? J'ai aimé le regard apaisé que l'autrice porte sur les choses (notamment la technologie, qui n'est plus une course au profit continuel mais redevient un outil d'épanouissement pour l'être humain ; certains indices laissent toutefois penser qu'on rencontrera dans le deuxième tome des personnages qui la rejettent plus radicalement).

D'un point de vue littéraire, on peut aussi y voir, en creux, une remise en question de la narration occidentale, laquelle est si centrée sur la notion de conflit qu'on en vient instinctivement à penser qu'une histoire dénuée de conflit ou de tension n'a strictement aucun intérêt littéraire ou philosophique. Ainsi, la forme apaisée contribue elle aussi à la réflexion de fond.

En bref, c'est une belle réussite! J'ai hâte de lire le deuxième tome, maintenant que j'ai enfin réussi à mettre la main dessus. En vouloir toujours plus, on disait?
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