Je ne peux m'empêcher de sentir une prémonition dans cet ultime texte de
Christian Bobin.
Une prémonition qu'il aurait eue de sa mort :
« Un petit manège tourne, allumé dans la nuit
Comme un chagrin merveilleux ».
Cette sorte de prémonition n'est pas forcément triste lorsqu'elle a pour sujet
Christian Bobin – lui, comme nous tous, devait craindre ce moment. Mais lui, assurément, le considérait comme un passage.
Je ne devrais donc pas être triste et pourtant je le suis car, pour la première fois, j'ai l'impression de passer à côté de son texte.
Bien sûr j'ai senti les ondes habituelles de sa pensée, ses ondes qui à chaque fois me réchauffent l'âme. J'ai senti la beauté des images qu'il m'impose en douceur. J'ai senti ces sentiments que je partage si souvent avec lui à propos de certains humains, de leur inconsistance mais aussi d'autres qui éclairent nos vies, qui éclairent la vie. J'ai senti ce dieu qu'il ne nomme pas, sa transcendance, son immanence, sa communion encore avec le nouveau-né
Mais
le muguet rouge qui semble lier tout cela, je n'en ai pas senti le parfum.
Ou alors – et je le comprends en rédigeant cette bafouille – ce muguet rouge est un oxymore, portant à la fois les valeurs opposées de la technologie et de la poésie de notre monde.
Tout dépend de ce que l'humain saura faire de cette fleur nouvelle dont la lumière peut « incendier » notre monde par le feu ou par la beauté.
Mais je reviendrai sur ce texte plus tard, lorsque mon esprit et mon coeur seront disposés.