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Citation de lolitajamesdawson


Emmurer la souffrance c'est prendre le risque qu'elle te dévore de l'intérieur. - Frida Khalo

J'ai longtemps nié mon existence. Aujourd'hui je regarde dans le rétroviseur ceux qui l'ont forgé. Ils sont tous-là, se rappelant à mon souvenir d'un signe de la main, pour que je continue de la construire sans oublier chaque leçon qu'ils m'ont donné.

Quand je les regarde, je me dis que l'attachement n'a rien à voir avec les liens du sang. Ça va bien au-delà. Je me mets alors à fantasmer une famille qui ne serait pas la mienne, avec qui je me sentirais comprise, et pas jugée. Ces pensées me réchauffent quand je rêve de grand large.

Je me sens prisonnière de cette vie, pourtant la culpabilité m'empêche de m'éloigner. Je suis en colère contre moi, contre mon manque de culot, mais c'est sur mes sœurs que je déverse le venin qui m'empoisonne. Mon monde rétrécit un peu plus chaque jour.

Elles militent aussi auprès du département pour que la corrida ne passe pas les frontières de nos contrées. Seule Madrina est pro-tauromachie, car son frère gagne sa vie en pariant sur les toros. Mais pour nous, blesser un animal au nom de la noblesse ou de la beauté du geste est un acte de barbarie.

Chez nous les animaux sont des membres part entière de la famille. On ne les utilise pas, on ne les saigne pas, on les chérit, Salty, le beauceron, est le gardien de notre quiétude.

Alors Maman, qui devinait tout, préparait des madeleines et du chocolat chaud pour y tremper nos cœurs gelés. Sans un mot, nous laissant en conclure que la vie est un enchaînement d'injustices, et que si nos combats sont parfois vains, il ne faut pourtant jamais cesser de résister. Je ne bouge pas. Les tueurs, on les bute, ou on laisse le destin s'en charger pour nous. On n'essaie certainement pas de les retenir.

Antonio et moi passons l'après-midi dans ma chambre. Dans un vrai lit, il n'est pas moins sauvage. Il baise comme si c'était la dernière fois. Le suspense et la tension qu'il installe me vident. Je ne pense plus, je suis délestée. Reposant, pour quelqu'un qui cherche en permanence à donner du sens à sa vie.

Antonio sait qu'on ne lui dit pas non. Ce n'est pas le genre d'homme à qui l'on résiste longtemps. Même sur moi le pouvoir fonctionne. Cette assurance, je l'envie, la mienne est fissurée. Je rêve à la femme que je serai devenue quand je reviendrai. Les trois jeunots ont l'air si épanoui pour des gosses que la vie n'a pas gâtés. Pourquoi pas moi ?

Tout ça, c'est de la faute de mes sœurs. Elles ont voulu jouer les mamans, mais elles sont passées à côté de l'essentiel : me préparer à la vraie vie. Celle qui te prend par surprise, te défonce, te demande une vigilance de tous les instants. Parce qu'il suffit d'un battement de cils pour basculer dans le chaos. Protéger, c'est former. Donner des clés. Pas ouvrir les portes.

- Ton nom j'ai dit !
- Carmen Ruiz-Monpean. Tu veux mes deuxième et troisième prénoms ou ça va aller ?
- Carmen Ruiz-Monpean... Et ça se dit française ? Tu es ridicule !
- J'en ai rien à foutre. Un nom c'est comme un tatouage sur l'oreille d'une vache, ça ne te raconte pas si elle est dressée, travailleuse ou affectueuse. Ça t'informe seulement sur le point de départ d'une existence, ça ne parle pas de l'essentiel.
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