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Citation de Charybde2


Cela faisait à présent trois jours qu’elle était seule dans la grande salle, à réfléchir, lire, écrire ses pensées. Elle avait pu garder tous ses livres, ses papiers et ses stylos. On lui avait également laissé quatre-vingts dossiers – de courtes biographies qui comprenaient des conversations retranscrites, de brèves histoires, des observations et des conclusions faites par des Oankali, ainsi que des photos. Les sujets ainsi répertoriés n’avaient aucune famille encore en vie. Ils ne se connaissaient pas et ne connaissaient pas Lilith.
Elle avait lu un peu plus de la moitié des dossiers à la recherche de candidats à Éveiller, mais aussi de quelques alliés potentiels, des gens à qui elle pourrait peut-être accorder sa confiance. Elle avait besoin de partager le fardeau de ce qu’elle savait, de ce qu’elle avait à faire. Elle avait besoin d’individus attentionnés qui écouteraient ce qu’elle avait à dire et n’agiraient pas de façon violente ou stupide. Elle avait besoin d’individus capables de lui donner des idées, de pousser son esprit dans des directions auxquelles elle n’aurait pas songé. Elle avait besoin d’individus capables d’exprimer leur désaccord s’ils trouvaient qu’elle se montrait idiote – des individus dont elle respecterait l’opinion.
D’un autre côté, elle ne voulait Éveiller personne. Elle avait peur de ces gens et avait peur pour eux. En dépit des informations que contenaient les dossiers, il y avait tellement d’inconnues. Son travail consistait à former une unité cohérente et à les préparer à rencontrer les Oankali, à être leurs nouveaux partenaires commerciaux. C’était impossible.
Comment pouvait-elle Éveiller des gens et leur apprendre qu’ils faisaient partie d’un projet d’ingénierie génétique concocté par une espèce si différente que les humains auraient du mal à les regarder confortablement avant un bon bout de temps ? Comment pouvait-elle Éveiller ces gens, qui avaient survécu à la guerre, et leur confier qu’à moins de parvenir à échapper aux Oankali, leurs enfants ne seraient pas humains ?
Mieux valait ne rien leur dire à ce sujet, ou en tout cas le moins possible, pendant quelque temps. Mieux valait ne pas les Éveiller du tout avant de savoir comment les aider, comment ne pas les trahir, comment les amener à accepter leur captivité, à accepter les Oankali, à accepter quoi que ce soit avant d’être renvoyés sur Terre. Puis à prendre leurs jambes à leur cou dès que l’occasion se présenterait.
Ses pensées suivirent le circuit habituel : il n’y avait aucun moyen de fuir le vaisseau. Absolument aucun. Les Oankali le contrôlaient grâce à la composition chimique de leur propre corps. Ces commandes ne pouvaient être ni mémorisées ni sabotées. Même les navettes qui voyageaient entre la Terre et le vaisseau étaient des extensions du corps des Oankali.
À bord du vaisseau, un humain risquait d’être remis en animation suspendue à l’intérieur d’une plante, ou même tué. Leur seul espoir était donc la Terre. Une fois sur place – quelque part dans le bassin amazonien, d’après ce qu’on lui avait dit -, ils auraient au moins une chance de s’en sortir.
Ce qui signifiait qu’ils devaient se contrôler, apprendre tout ce qu’elle pouvait leur enseigner, tout ce que les Oankali pouvaient leur enseigner, puis utiliser ces connaissances pour fuir et survivre.
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