Nil, c’est cette fille qu’on repère au chalet après une journée entière de délire sur la neige, quand on plane de bonheur. Elle est jolie, super sexy. Cheveux longs, tenue moulante, un sourire d’enfer. Elle a un nom du genre… Mallory.
Mais dès qu’on apprend à la connaître, la vérité vient nous déchirer les boyaux. La vérité, c’est qu’elle est cruelle. Sans cœur. Le genre de fille qui couche avec notre meilleur ami quand on a le dos tourné. Et quand le masque tombe, le glamour disparaît. Voilà, c’est ça l’île de Nil. Une beauté à ne pas en croire ses yeux, jusqu’à ce qu’on voie à travers ce qu’elle est vraiment.
Je me suis demandé si elle aimait courir.
Elle a intérêt, a ricané Nil.
A cet instant, j’ai compris que Nil ne jouait plus à la loyale. Parce que j’appréciais Charley encore plus que je haïssais Nil, et je brûlais d’envie de la connaître mieux.
Mais j’allais partir.
Nil a dit pars. Nil a dit reste. Nil était complètement tordue. Ou peut-être que c’était moi.
– Nil. Bon, voilà comment ça se passe. On arrive ici adolescent, entre treize et dix-neuf ans. On a un an… pour attraper une porte, sinon…
Il s’est tu et j’ai cru voir des flammes dans ses yeux de saphir.
– Sinon… ?
– On meurt.
Je me suis arrêtée et j'ai posé mes mains tremblantes sur mes genoux. J'étais épuisée.
- Charley, sans vouloir te vexer, on dirait que tu vas t'écrouler. Si tu veux, je peux finir de te coiffer.
J'ai regardé sa main tendue, estomaquée. J'adorais qu'on me brosse les cheveux. Plus qu'être grattée dans le dos, plus qu'être massée, plus que tout. Et j'avais toujours rêvé de me faire brosser les cheveux par un garçon mignon. Thad venait de m'offrir mon fantasme secret sur un plateau tropical.
Nous nous sommes remis à marcher, main dans la main, et j'ai pensé que Charley comprenait enfin ce que je ressentais pour elle. Toutefois, je devinais qu'elle n'avait pas encore saisi à quel point Nil était retorse. Le yin et le yang. Pour chaque bonne chose, il y en avait une mauvaise. Nous n'étions que des pions dans le jeu de Nil.
Il aurait pu y avoir Stonehenge planté là, mais ce n'est pas ce que vous cherchiez. Donc vous n'avez rien vu.
Chaque arrivée contenait une graine de foi. De foi en euxs, en les autres, en l'avenir, en quelque chose de plus grand. Certaines graines étaient plus grandes que d'autres, mais il fallait toutes les faire germer, car c'était de la pousse que venait la force.
Je n'ai pas saisi le compte de ses jours parce que j'étais trop distraite par sa poitrine.
Elle avait fait son choix, et je n'en faisais pas partie. Mon coeur s'est gelé. Il a explosé. Électrocardiogramme plat. Je me suis détourné le premier.
La chance, c'est quelque chose de personnel.