Il y a au moins deux parties dans cet ouvrage, les "pastiches", et les "mélanges", qui sont un assemblage de textes sur des sujets divers, même si plusieurs sont regroupés sous le sous-tire "En Mémoire des églises assassinées".
Dans les "pastiches", on trouve tout l'humour de
Proust, certes connu des lecteurs de la Recherche, mais qui n'est souvent pas accolé à sa réputation, à tort. Il montre ici qu'il sait rire de lui-même et de son propre style. Il y a presque justement des "
Exercices de style" à la façon de
Queneau et de l'
OULIPO avant l'heure dans ces pastiches, où
Proust reprend, à la manière de grands écrivains, une anecdote, un fait divers. Je comprends qu'il commence par
Balzac, avec la description d'un salon mondain où se croisent hommes politiques, écrivains et grandes dames - en changeant les noms des personnages, qui sont ceux
De Balzac, on pourrait être dans la Recherche. Cependant, s'il fait ressortir le snobisme
De Balzac - qu'il partage, son goût pour les multiples personnages et le foisonnement de la Comédie humaine, s'il montre la sensualité de
Flaubert, l'écriture romantique de Michelet ou le goût des intrigues courtisanes de
Saint-Simon, s'il arrive à se moquer de lui-même notamment en évoquant les Goncourt, l'exercice est un peu convenu et répétitif. de plus, je ne connaissais pas de Régnier ni E. Faguet, et je n'ai pas pu être sensible au travail de réécriture.
Dans les "mélanges", il faut d'abord s'accrocher. En effet,
Proust livre une analyse de l'oeuvre du critique d'art
Ruskin sur les cathédrales gothiques. Mais sans connaître vraiment le contenu du travail de
Ruskin, ni avoir des illustrations (sur le portail de la cathédrale d'Abbeville ou la sculpture de la Vierge dorée d'Amiens), il m'a semblé assez ardu de suivre
Proust. Je n'ai pas toutes les références sur l'architecture, ni sur les théories d'art médiéval, ni sur l'esthétisme et le mysticisme. Et cela fait plus de dix ans maintenant que j'ai refermé la Recherche sans la relire du tout depuis, et j'avais oublié, non pas les obsessions de
Proust sur Venise ou sa fascination pour les cathédrales, ni même l'importance de l'art dans son oeuvre, mais la façon de le lire, de "surfer sur sa phrase" comme me l'avait appris une professeure en khâgne. J'ai donc préféré le texte "
Journées de lecture", plus accessible peut-être pour moi par ses références, et qui me parle forcément plus.
Mais c'est aussi pour cela qu'il faut relire
Proust, pour la beauté si particulière et si singulière de son style, pour son éloge de la beauté, que ce soit la beauté des cathédrales, celle des lectures d'enfance, celle des sentiments portés à la mère ou la grand-mère, oui,
Proust célèbre l'art et la beauté.