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EAN : 9782330114909
432 pages
Actes Sud (19/09/2018)
3.73/5   28 notes
Résumé :
Aljaz Cosini, trente-six ans, est en train de se noyer dans une gorge de Tasmanie, sous les yeux hébétés des clients qu’il accompagnait sur un parcours de rafting. A mesure que l’oxygène se retire de son cerveau, il est submergé par un flot de visions. En un tourbillon d’images et de sensations, il revoit ainsi, dans le désordre, les détails de l’excursion sur la Franklin River qui a mal tourné au point de le mener jusqu’à cet ultime moment, sa vie avec Couta Ho et ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Première lecture de l'année et première bonne découverte.

Il s'agit d'une oeuvre considérée, en Australie, comme un grand classique et qui vient seulement d'être traduit en français en 2018. Tout vient à point à qui sait attendre.

Dés le premier chapitre, nous sommes engloutis et nous assistons, impuissants, à la longue agonie du guide de rivière qui au fil des pages sombre dans des visions qui le ramènent vers son passé et ce à quoi il a échoué tout au long de sa vie.

C'est une lecture fort envoûtante et captivante que j'ai faite. La couverture de cette clé qui sombre dans les eaux et déjà indicatrice de quelque chose de beau. La présence de la nature y est tout bonnement omniprésente et omnipotente, et cela me semble être une caractéristique de la littérature du continent de l'Océanie qui est ici australienne. La voix des Anciens, la présence de la nature, les esprits des Aïeux, la colonisation marquent au fer rouge l'histoire tout entière. Au fil des pages et de ma lecture, il m'a été possible d'entendre le chant de l'Océanie. Perdue dans les eaux. L'eau et la fertilité. Cela semble clairement avoir marqué l'auteur qui baigne dans tout cela et narre, avec une forme de grâce douce amère, la brimade d'un homme qui s'en va retourner au sein de sa propre matrice. On y éprouve, à la lecture, de l'empathie pour les personnages du territoire colonial et du vécu des personnages qui sont décrits avec une grande forme de tendresse.

J'ai passé un joli moment à la lecture de ce livre.
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Je suis toujours en Tasmanie pour le défi Bookstagram "1 mois 1 pays en livres" avec, cette fois, un auteur que je connais, Richard Flanagan ! Et j'y suis la noyade de plus de 400 pages du narrateur, Aljaz Cosini ; une noyade physique qui parachève la noyade symbolique qu'il traverse depuis près de dix ans et qui a fini par le ramener sur sa terre d'origine, mais aussi la noyade, forcée cette fois, de l'histoire de la Tasmanie que « tout le monde voulait oublier […]. Qu'ils soient bagnards ou policiers, aucun d'eux n'a estimé que cela valait le coup de s'en souvenir. » (p. 96)

Au cours de cette noyade, des visions assaillent brutalement Aljaz, comme si les cris de ses ancêtres avaient attendu cet instant critique pour parvenir à ses oreilles. Elles nous révèlent ainsi le massacre des populations aborigènes au XIXe siècle, mené avec une telle brutalité que les rares survivants font tout ce qu'ils peuvent pour se faire passer pour « des bonnes gens catholiques, des Blancs » (p. 268). Après cela, tous les Blancs prétendront être des descendants de puissants colons alors que le pays a été massivement peuplé par des bagnards envoyés aux travaux forcés et à la mort sur ce territoire hostile mais à la nature magnifique.

Cette dernière n'a pas été épargnée par l'exploitation minière qui s'effondre dans les années 1930, entraînant une misère telle que les ouvriers n'ont plus que leurs dents à vendre pour se nourrir ou émigrer… Après la Seconde Guerre mondiale, toujours pas d'apaisement puisque de nombreux soldats reviennent traumatisés par les camps japonais de prisonniers. La lumière vient de la finesse des observations de l'auteur et de la sincérité des impressions qu'il partage avec nous sur les tourments humains, les douleurs de la solitude, l'absurdité de notre monde, le poids du passé, les illusions perdues, et l'idée que « la mort n'a rien de la violence de la vie » (p. 404).
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Un gros pavé commencé au moment des fêtes ... pas vraiment une bonne idée. Un roman d'atmosphère où l'on doit prendre le temps de s'immerger dans l'histoire ...
Pas le bon moment, la maison fourmille de bruits, de présences, de sollicitations ... une lecture à reprendre après l'agitation de fin d'année.
Le moment est arrivé, la reprise se fait en douceur ...
L'idée de départ, la noyade du narrateur est une scène qui dure plus de 400 pages.
Elle nous propose d'essayer d'imaginer notre naissance, scène remarquable, éprouvante puis de remonter dans l'histoire de la famille ... il paraît que le dernier moment est l'instant qui peut durer l'éternité où tout défile, tout se revit.
Une histoire de famille ...
Où l'on apprend qu'il est important d'inspirer le respect aux autres et pour cela on doit se montrer fier de ses origines ... un colon blanc libre et non pas un bagnard ... un colon blanc et non pas un abo (aborigène !) ... il est facile d'être un bagnard, on peut être condamné à mort pour avoir commis l'acte sexuel avec des animaux.
Où l'on apprend qu'il fut un temps où l'on vendait ses dents saines pour que des prothèses dentaires soient fabriquées pour les riches ... on se contentait après de dentier de mauvaise qualité que l'on gardait toute sa vie et même que ses descendants le conservaient comme décoration sur la cheminée.
Finir l'histoire en se retrouvant près de l'énorme barbecue E Harry, auprès duquel toute sa vie il remplissait de plus en plus d'assiettes pour tous ceux qui l'avait quitté, ses grands parents, ses parents, ses amis, ses enfants ... une très bonne idée que de se retrouver avec tous les compagnons que nous avons croisés au cours de ses pages ... c'est un vrai petit bonheur avant de s'envoler avec eux dans un courant d'air chaud.
Un coup de coeur confirmé pour cet auteur.
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Il s'appelle Aljaz Cosini et il est guide de rivière, cet homme qui nous raconte peu ou prou sa vie et aussi celle de ses ancêtres ; et puis, on comprend assez vite qu'il est en train de se noyer, sous les yeux des "aventuriers" qu'il accompagne dans une expédition, et que, pendant ce temps d'anéantissement, viennent à son esprit des souvenirs mais surtout des visions auxquelles il assiste impuissant.
" Je vous le dis, c'est loin d'être une chose facile, pour un pauvre type en train de se noyer, d'assister au dévoilement des lamentables vérités de sa famille. Assister à tout cela, cela revient en effet pour moi au même que si je vous le racontais, comme si j'étais simultanément le réalisateur du film, le projectionniste et le public dans la salle, et je ne suis pas certain que ce soit réellement une bonne chose de divulguer de cette manière nos secrets de famille, même à moi au fond de ce trou liquide." (p 77)

Première de couverture : une clé - un peu rouillée - qui s'enfonce dans l'eau, qui se noie ; une explication possible en lien avec le récit, chaque être humain qui disparaît, c'est une somme de souvenirs et de rêves qui s'en vont à tout jamais...
Aljaz avait toute une histoire, des parents, des amis, une épouse et même un enfant pendant quelques mois ; en regardant de près les relations familiales, l'auteur nous rappelle que chacun de nous est l'aboutissement de rencontres, d'existences différentes, surtout dans des contextes historiques et sociaux particuliers ; là nous sommes en Tasmanie, territoire encore sauvage peuplé à l'origine d'aborigènes rejoints au tout début de XIXème siècle par des anglais puis par des forçats.

De jour en jour d'expédition sur la Franklin River, le récit progresse, émaillé des récits des aventures des personnages plus ou moins proches de Aljaz ; son père Harry et sa mère Sonja, lui australien, elle européenne de Slovénie, alors pourquoi au décès de son père - sa mère déjà morte depuis longtemps - la vieille amie de ses parents lui tend-elle un miroir en lui disant "ça, c'est un abo" ?
La question des origines, celle des aborigènes et de la dépossession des terres est constamment en filigrane dans le livre ; la nature tropicale, la forêt dense et les grandes chutes, la voix des anciens et leurs rites nous emmènent loin, très loin dans le temps et dans l'espace.

Narration prenante, envoûtante, magnifique, par un auteur devenu "culte" en Australie, une façon de voir le monde, l'autre, qui frappe tout de suite par son originalité, mais aussi son pessimisme ; c'est très humain, émouvant, un récit puissant, un peu triste, mais écrit d'une façon magnifique.
On comprend que ce livre et son auteur soient "culte" dans cette région du monde que l'on ne connaît pas beaucoup et qu'on ne comprend pas toujours bien. Et pourtant, malgré les différences, que de similitudes dans les évènements et les ressentis des existences des habitants de la Tasmanie avec les nôtres !

Un livre superbe, à ne pas manquer !
Lien : https://www.les2bouquineuses..
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défi ABC 2018-2019

Un homme se noie en Tasmanie. Il est guide de rafting. Ses clients impuissants assistent au drame. Et dans son esprit en partance, les souvenirs affluent, les ancêtres se manifestent, la vie défile.
Un roman superbe, des histoires entremêlées, des légendes qui nourrissent le quotidien, une nature magnifique, qui prélève son tribut, en arbres, en animaux, en hommes, une nature qui donne et prend la vie.
Aussi puissant que La route étroite vers le Nord lointain, un roman superbe, un auteur peu connu ici, et une traduction superbe de Johan-Frédérik Hel-Guedj
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Et alors quelque chose monte de ces eaux en furie, et le cri du chanteur, le cri du passé et ma propre agonie ne font plus qu'un. Plus qu'une vision, c'est une folie qui s'empare de tout et à laquelle je ne peux échapper.
La Terre de Van Diemen qui bouillonne dans ma cervelle comme du sang en ébullition n'était pas un monde, pas même une société. C'était un enfer. Qui chercherait à transformer un enfer ? […]
Or, après que le gouvernement anglais eut cessé d'envoyer des forçats et de l'or pour payer l'entretien des bagnards, l'île entra dans un long hiver de pauvreté et de silence.
Personne ne parlait. Si ce n'est pour mentir, personne ne parlait. (p. 339-340)
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Il croit peut-être possible d’apprendre à voler comme les personnages de bandes dessinées. Il pourrait ne s’agir, pense-t-il, que d’une affaire de volonté et de magie, comme d’apprendre à marcher et à parler, deux événements dont il conserve le clair souvenir. Des deux, l’apprentissage de la parole avait été le plus difficile. Personne ne le comprenait. Il disait des choses adorables, des choses belles, des choses drôles. Les gens le regardaient d’un air interrogateur, et ensuite avec pitié. Il n’avait pas envie de pitié. Il avait envie de conversation. Il avait envie d’être compris. Avec le temps, il acquit une connaissance des mots de plus en plus grande. Il écoutait désormais l’usage que l’on en faisait, en quoi un mot pouvait être porteur de quantité de significations différentes, en quoi chaque mot pouvait se révéler un arbre chargé de fruits.
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C’est une comédie qu’il faut jouer d’un bout à l’autre du trajet. C’est l’antidote à la peur, qui se propage comme une maladie contagieuse dès qu’un guide en admet l’existence. Voilà qui comporte une triste leçon : il faut que les gens croient en quelque chose – en un mensonge au besoin –, sinon tout est perdu. Et pourtant, comme toutes les croyances aveugles qui paraissent aller à ce point à l’encontre de la réalité la plus évidente, ces dernières comportent à leur tour leurs propres vérités. Tant que l’on ne se reconnaît aucune peur, de grandes choses restent possibles et les clients sont susceptibles d’actes d’endurance et de courage dont ils ne se seraient jamais crus capables.
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Le monde n’avait pas de place pour moi, et je le voyais, ce monde, avec ses coutumes risibles et dingues, mais lui ne me voyait pas, et je dois reconnaître qu’il y avait là-dedans une étrange liberté. Et pour sa part le monde ne voyait pas non plus les maux, les fléaux, les erreurs, ni ceux qui souffraient en conséquence. Je ne suis pas en train de dire que j’ai protesté, ni même que je m’y suis intéressé. J’avais juste légèrement l’impression qu’il y avait dans le monde un peu de laisser-aller et ça me faisait rire, ce qui me semble préférable aux larmes.
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C’est si facile, ça se passe tellement en douceur. La mort violente peut survenir avec une grâce trompeuse ; si rapide, si naturelle, à ce point silencieuse que ce qui vient d’avoir lieu n’est pas tout de suite visible. Certaines personnes se retournent en se disant que l’autre est peut-être là, debout derrière eux, qu’il leur prépare une surprise, alors qu’en fait cela n’a rien d’une farce, parce qu’il y a un mort. Un mort, tout simplement. Une phrase assez parlante en soi – la mort n’est pas l’affaire complexe qu’est la vie. Du moins pas pour les morts.
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Videos de Richard Flanagan (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Richard Flanagan
Rencontre avec Richard Flanagan à la librairie La Galerne du Havre pour la parution de "Première personne". 11 septembre 2018.
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