Conte social déjanté, un peu à la
Voltaire, une vision décapante de la société, de l'intégration, de l'objectivité de la justice façon morale
De La Fontaine, selon que vous serez puissant ou misérable...
Hannelore Cayre joue des codes et se joue des conventions en utilisant avec astuce l'addiction et les fantasmes de son personnage, un avocat qui compte 20 ans de robe au compteur et s'était dit "Encore 5 ans et c'est fini, je raccroche la robe."
Mais la vie ne se déroule jamais selon nos voeux et Maître Christophe Leibowitz se trouve confronté à la justice de la plus moche des façons ; il doit se conformer au parcours standard du prévenu pas encore accusé à qui on refuse la présomption d'innocence...Mais il a de la ressource et la providence n'a jamais été chienne avec lui...
Suite au décès de sa tante Marguérite il se découvre une famille du côté de Lieursac-le-Mont en Charente Maritime, une cousine Valérie productrice de cognac qui, "(...)avait ce défaut qu'ont les honnêtes filles de province de prêter d'inquiétantes apparences de péché à tout ce qui sort de l'ordinaire." et un cousin François, chorégraphe de renom "(...) qui, nourisson, d'après sa mère, était déjà pédé."
La sauce a du mal à prendre.
Christophe Leibowitz défend surtout des exclus comme "Diocounda Massani, alias Termite (...) on l'appelle comme ça parce qu'il vivait dans une cave" ou Nelson Pereira, le chef de la bande des Orteaux" et a souvent maille à partir avec le procureur du Pertuis toujours "emporté par ce sentiment d'allégresse que cause (...) une arrestation massive (...)"
Quand Christophe Leibowitz se met en tête d'imiter les rappeurs américains vantant les mérites du cognac français dans leurs clips, l'histoire commence...je n'en dis pas plus !
Le charme de ce roman court est de proposer plusieurs histoires dans l'histoire.
Termite se révèle être un rappeur doublé d'un musicien hors pair et d'un poète accompli.
Leibowitz réussit à convaincre l'éducateur en charge de Termite "un ex-mao, ex-trotsko, ex-quelque chose d'utopique et d'extrême gauche, un homme rompu à tout ; à la misère de son service comme à l'ingratitude des détenus dont il s'occupait." de lui confier le contrat de réinsertion du jeune...et c'est parti...Hannelore Caye nous emmène pour une ballade documentée dans l'univers du rap - j'ai lu avec intérêt cet article Les « flows » de cognac dans le rap américain de Léo Pajon publié le 01 mars 2023 dans le journal le Monde -
Christophe Leibowitz entend bien transfomer le produit traditionnel de la famille Berthier - le nom de son grand-père - en "marque de cognac pour ganstas français (...)"
Un roman résolumment contemporain qui, sous son air déjanté révèle les travers de notre société et la façon dont elle traite ceux qui ne pensent pas droit.
La morale du conte est sans appel.
Rien de nouveau sous le soleil, en 1960 The Crickets chantaient I fought the law and the law won ! Chanson reprise par
The Clash en 1979
https://www.youtube.com/watch?v=hKrxq5U8SBY
Je vais me précipiter sur les autres romans de Hannelore Caye, une valeur sûre !