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EAN : 9782709644877
250 pages
J.-C. Lattès (29/10/2014)
3.72/5   32 notes
Résumé :
En 1910, le passage de deux comètes propage une onde de panique. Partout, des hommes deviennent fous, se suicident ou observent, silencieux et vaincus.
Karl, un jeune immigré, nettoie les vitres des gratte-ciels de New-York. En Argentine, Jorge, un petit garçon, s'invente des mondes imaginaires. Fernando déambule à LIsbonne sans savoir comment vivre. Ils sont liés par leur sensibilité, le regard qu'ils portent sur les hommes qui les entourent et les lieux où ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (18) Voir plus Ajouter une critique
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Un ovni littéraire avec trois personnages, trois pays, une époque.
Karl nettoie des vitres de gratte-ciel à NewYork, Jorge invente des histoires et des animaux pour sa petite soeur en Argentine, Fernando rentré à Lisbonne rêvasse dans sa chambre chez ses tantes. Nous sommes au début du siècle dernier. Dans les premières pages du livre, des coupures de journaux datant du 19 mai 1910 nous rapportent le passage du comète Halley et la folie qui s'en suivit.
Karl semblerait l'héros de l'Amérique, premier roman de Kafka, Jorge, J.Luis Borges et Fernando, l'écrivain portugais Fernando Pessoa, est-ce le cas ? c'est fort possible. Les nombreux détails parsemés par l'auteur dans le texte y correspondent. En tout cas moi je l'ai lu dans cette perspective. Fascinante cette plongée dans la tête de ces trois personnages, des « Halleys » de passage sur terre dans le Monde d'hier, comme dirait S.Zweig. Un livre qui aujourd'hui tient lieu des coupures de presse d'une époque, recelant le monde fantasmé de l'imagination et de la création de trois grands écrivains du XX iéme siècle.
Difficile de parler de ce livre sublime, surtout avec mes moyens. Donc je procèderais par le biais d'une citation du livre : « Certains hommes sont faits de tripes et d'écailles, une fois apprêtés, le peu qu'il en reste n'est pas grand-chose et ils ne sont pas présentables.Il y en a d'autres où tout peut être mis à profit, les entrailles et la peau de ces hommes recèlent des secrets et racontent des histoires sans fin ».p.40.
En remplaçant dans cette citation simplement « hommes » par « livres », je peux à peu près donner une idée de mon ressenti. Chaque phrase de ce livre raconte quelque chose, fait réfléchir et donne du plaisir, si bien que la moitié du livre pourrait être mise en citations......la caverne d'Ali Baba. En plus la forme est toute simple, divisée en six parties, de courts chapitres qui alternent les trois personnages, une prose claire et concise, accompagnée d'un humour subtil. Ça vous paraît trop parfait, non ? Eh bien il l'est, un des meilleurs livres que j'ai lu depuis longtemps !

Merci Bison de m'avoir fait extraire ce livre fabuleux, des tréfonds de ma Pal .

“Vivre comme on se promène ici-bas, indifférent à l'univers auquel il faudra retourner un jour ou l'autre, en attendant qu'un vent froid de fin d'après-midi souffle et qu'une voix appelle de l'intérieur, «  rentrons , il va faire nuit » “.
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Certains hasards m'emmènent dans des lieux inconnus dont l'intensité du voyage m'éblouit par sa poésie. Certains romans me transportent dans des pays où les sens effleurent ma main qui tourne les pages. Je ferme les yeux et j'entends New-York au début du siècle dernier. Je change de chapitre et je plonge dans un coin perdu de l'Argentine. le temps d'une respiration, mon coeur bat au rythme du fado, le regard porté sur Lisbonne.

En compagnie de Karl, Fernando et Jorge, l'auteur distille quelques notes d'onirisme entre ces lieux qui deviennent pour moi à la fois magique et mélancolique. Les mots touchent au sublime, le silence se remplace par une petite musique intérieure qui enivre l'âme des hommes qui n'appartiennent pas au ciel. En filigrane, d'illustres écrivains insufflent leur esprit, l'auteur rend ainsi hommage à Kafka, Pessoa et Borges.

Prêter une âme à un lieu, à une musique, à un silence, voilà ce que propose ce premier roman de Nuno Camarneiro. Il raconte trois histoires, simples et humaines, de trois jeunes hommes trop sensibles pour ce monde. Des jeunes hommes qui s'entourent de silence et de poésie et qui prennent le temps de découvrir ces lieux, les autres, les âmes flottantes autour d'eux.

Écouter la musique intérieure d'une vie, celle qui tangue sur les vagues de la nonchalance et qui chevauche les flots du temps. Écouter battre son coeur et celui des fantômes voisins pour mieux pénétrer le lieu. New-York, Buenos Aires, Lisbonne, des cartes postales qui s'enfuient dans les airs avant de s'engouffrer au fond des criques. le temps s'envole, la vie vole le bonheur, la bière est fraîche.

Attiré autant par le titre du roman que par la couverture, je suis resté silencieux de bonheur devant l'onirisme et la poésie qui se dégagent de la plume nouvelle de l'auteur portugais. Des chapitres qui virent souvent à l'abstraction poético-philosophique, j'erre dans la tête de ces trois personnages, mon esprit s'évapore vers ce ciel qui ne m'appartient pas – les bisons n'appartiennent pas au ciel non plus, tome deux – des oiseaux s'envolent de mon poitrail, ils partent piaillent, franchissent les limites de mon horizon, me reste alors le silence au dernier chapitre tourné de ce sublime moment littéraire.

Le silence et la mer d'un bleu profond font tanguer mon âme comme une bouteille de whisky ferait chavirer mon coeur. S'endormir à Buenos Aires, se réveiller face à la mer, fermer les yeux regarder le ciel s'envoler comme cette musique sortie d'une taverne refuge des marins désespérés, ouvrir les yeux et mourir sous une pluie de comètes.
Lien : http://memoiresdebison.blogs..
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Dans ce roman, l'auteur nous raconte trois destins, à des endroits différents du monde, en 1910, lors du passage de deux comètes. Nous avons ainsi l'histoire de Karl (censé être Kafka), à New-York, celle de Fernando (Pessoa) principalement à Lisbonne et celle de Jorge (on aura reconnu Borges), ce dernier étant enfant.

Je suis passée par différents états d'âme en lisant ce roman. Tout d'abord un enthousiasme débordant lié à l'écriture de l'auteur. Puis, mes grosses lacunes, car je n'avais rien lu encore de Borges, seulement quelques poèmes de Pessoa, et « le procès » de Kafka, à l'adolescence, ont provoqué la peur de passer à côté du livre. Donc, je l'ai refermé pour m'attaquer au « Banquier anarchiste » de Pessoa qui prenait la poussière depuis dix ans sur une étagère de ma bibliothèque. Bonne pioche d'ailleurs…

Je suis ensuite revenue sur ce roman et il m'est difficile d'en parler, tant j'ai pu passer, en alternance, de l'enthousiasme au blues en l'espace de quelques pages. Ce récit est envoûtant et en fait, il faut se laisser porter par l'histoire.

J'ai beaucoup aimé l'écriture, pleine de poésie, les descriptions des villes, l'atmosphère qui caractérise chacune d'elles, qu'il s'agisse de New-York, ou Lisbonne, si les habitants qui y vivent y sont proches ou indifférents les uns aux autres, ainsi que la manière dont l'auteur décrit les états d'âme des personnages.

La construction du roman est intéressante, alternant la vie de chacun des protagonistes, ce qui accentue probablement l'intensité et la labilité des émotions que j'ai ressenties durant cette lecture.

Nuno Camarneiro aborde très bien la manière dont les gens peuvent réagir lors du passage d'une comète, ce feu dans le ciel dont on savait peu de choses à l'époque, ainsi que toutes les peurs et les superstitions qui l'accompagne : la fin du monde, Dieu qui s'énerve…

Il rend un hommage vibrant à la littérature, la poésie et les livres en général :

« Maman m'a répondu que les livres servent à savoir tout ce que je veux en dedans, que je peux les lire et dialoguer avec eux sur toutes les choses dont je ne parle pas avec mes camarades. » P 89

Ainsi qu'à l'écriture : « Il (Jorge) aime regarder l'encre lorsqu'elle sort du stylo comme si elle sortait de l'intérieur de la tête pour venir se ranger en idées sur les phrases de son cahier. Les mémoires rangées dans les cahiers comme des chaussettes dans un tiroir ou des allumettes dans une boîte. » P 55

Par contre, on ne sait jamais si ce sont les pensées et les émotions de l'auteur, où s'il se met dans la tête des ses personnages, qu'il connaît tellement bien que leurs émotions sont devenues les siennes. J'ai découvert un Fernando mélancolique, perdu dans sa ville et sa vie (comme s'il avait écrit son banquier au cours d'une phase maniaque ?) mais, c'est le personnage que j'ai le plus aimé, donc en route pour « le livre de l'intranquillité » et je sais que cela ne va pas être simple.

Jorge est un enfant, un peu étrange, avec des relations difficiles avec ses camarades de classe, on ne sait jamais s'il est dans le rêve ou la réalité, s'il invente ou pas, et tout cas il est fascinant. Donc découvrir son oeuvre est devenu une évidence.

Par contre, je n'ai pas eu d'atomes crochus avec Karl que j'ai eu des difficultés à cerner…

Je pense que je relirai sûrement ce roman pour la beauté de l'écriture et après avoir approfondi les oeuvres des auteurs dont nous parle Nuno Camarneiro, dont c'est le premier roman, pour l'apprécier à sa juste valeur.

Un bon point également pour la couverture et le choix du titre, « les hommes n'appartiennent pas au ciel » (« No meu peito nao cabem passaros » dans la version originale) est très judicieux, empreint de romantisme et invite au voyage au propre comme au figuré…
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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S'il est un billet compliqué à commencer c'est bien celui-ci.
Ai-je aimé « Les hommes n'appartiennent pas au ciel »? Non.
Ai-je détesté ce bouquin? Presque à regret, non.

Oui à regret parce que là, ça aurait été facile d'ironiser sur un style d'écriture pouvant sembler masturbatoire pour ne pas dire canada dry, genre l'écrivain qui voudrait faire du Pessoa sans en avoir l'air, mais…
A regret encore parce qu'il me serait aisé de disserter sur le coté insupportable, pour moi, de Pessoa. Un coté que l'on retrouve tout au long du livre, comme quoi l'imitation ou plutôt l'hommage n'est pas si mauvais… Ce besoin de disséquer chaque geste, chaque pensée, chaque possibilité, chaque tout.

— Qui suis-je, d'où viens je, où cours je et dans quelle étagère?
— Fjällbo de chez Ikéa? (oui ça existe, j'ai investigué grave pour ce billet).
— T'es con.
— Non pas que, mais j'suis basique comme garçon, faut me parler avec des mots simples.
— T'es passé à coté d'une poésie métaphysique puissante.
— Oui ben ta physique, tu sais où tu peux te la mettre…
— Définitivement, t'es pas sortable.
Oui ça aurait été facile de continuer sur cette note mais…

Mais ça aurait eu un petit goût malhonnête.
Comme vous avez pu le lire dans les neuf autres billets sur ce titre (allez y si ce n'est pas déjà fait parce qu'ils sont vraiment bien, même si je ne partage malheureusement pas l'enthousiasme quasi général), les ombres de Pessoa, Borges et Kafka planent au dessus des pages.
Si j'ai lu quelques titres de Pessoa et que j'ai adoré « le banquier anarchiste », « Ode Maritime » ou « Bureau de Tabac », j'avais fini par être indisposé par « le livre de l'intranquilité » pour les raisons évoquées plus haut, je n'ai lu ni Borges (quelques textes seulement) ni Kafka. Je ne suis pas un littéraire et mon manque criant de références m'a probablement fait passer à coté de certaines choses.
Ca aurait été encore plus « fourbe » de ma part de « démolir » les lignes de Nuno Camarneiro car si les chapitres Lisboètes m'ont perdu pour la plupart, « Kafka » et « Borges » m'ont tenu éveillé avec plus ou moins de bonheur. le coté « fragile décalé » qui sent qu'il n'est pas fait pour le monde tel qu'il est et qui se débrouille comme il peut avec les moyens du bord pour ne pas sombrer, ça me parle, comme m'ont parlé certains passages sans que je sache vraiment pourquoi, juste un ressenti.
Ce billet n'aurait pas été sincère car je pense que le style « Pessomarneiro » m'a inconsciemment pollué la lecture. Une lecture pendant laquelle j'ai certainement cherché n'importe quel prétexte pour me dire que je n'aimais pas. Prétextes qui m'ont fait passer à des années lumière de la poésie du livre, une poésie que je n'ai pas vu, pire, pas ressenti.
J'ai la sensation assez désagréable de m'être exclu de moi-même de ce bouquin.
Pour terminer, il m'aurait été de toute façon impossible de massacrer ce livre tant les quarante dernières pages m'ont scotché. Je ne suis entré dans le monde de Camarneiro qu'à ce moment là, mais quel moment… presque rassurant. Un langage que je comprends, enfin. Moins torturé, du moins dans la forme.
Je dirais bien que ce n'était pas le bon moment pour cette lecture, que je le relirai plus tard mais je ne le dirai pas car je sais que je ne le relirai pas. Il y a des rendez vous manqués qu'il ne faut pas essayer de rattraper, enfin je le sens comme ça.
Dringgggg
— Votre séance est terminée.
— Merci docteur, je vous dois combien?
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Trois lieux- Buenos Aires, New York, Lisbonne- , trois destins- celui de Jorge, de Karl, de Fernando- , trois poètes - Borgès, Kafka, Pessoa - trois récits qui s'entrecroisent sous le signe incandescent de la comète de Haley, venue faire un petit tour de chauffe dans le ciel de 1910...

Un énième roman pseudo- autobiographique qui mettrait en parallele, fort artificiellement, un personnage du premier roman de Kafka -Karl, héros de "Amerika"- avec le mage aveugle du labyrinthe et le chantre inquiet de l'Intranquillité?

Pas du tout, mais vraiment pas du tout.

Dès les premières lignes on sait qu'on navigue vers des terres inconnues, qu'on doit s'abandonner à la houle des mots, aux brisants des images, au roulis des sensations.

Pas de roman "poétique" autoproclamé non plus: les mots et les phrases ne sont ni lyriques, ni ampoulés, ni "hhhhinspirés". Camarneiro est un physicien, il observe et connaît les mystères du monde naturel: il appréhende la poésie avec un regard nouveau, il dit sa surprise et crée la nôtre.

Ces trois poètes-là sont un peu trop fragiles, un peu trop perméables aux mystères de la mer et du ciel, un peu trop sensibles au pouvoir des mots , un peu trop en quête d'une façon de dire le monde qui leur serait propre, pour entrer vraiment en contact avec les autres hommes, ou avec une femme - eût-elle la crinière rousse des comètes en feu ou des incendies.

Leur enfance a été un long exil, loin des jeux, violents et charnels des autres enfants. Ils ont vécu dans un monde d'histoires racontées par des grands-mères, des tantes, aussi perdus dans la réalité que s'ils étaient perchés sur des tréteaux fragiles en haut d'un gratte-ciel ou enfermés dans la cabine d'un cargo un soir de tempête. Parfois ils ont trouvé une brève compagnie sur un coin de table, au fond d'un bordel ou d'une taverne, dans une chambre au bord du Tage.

Mais la solitude et les mots étaient leurs arpents, leur territoire.

Pourtant, ces solitaires, quel trésor ils nous laissent!

Je ne peux me résigner à fermer ce livre. Je le rouvre, je le savoure encore et encore. Il a toujours des choses à me dire. Il n'a pas fini de faire son chemin en moi. D'étoiler sa comète dans un petit coin de ma tête .

Merci Booky, merci le Bison pour cette mine inépuisable de merveilles..
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Citations et extraits (73) Voir plus Ajouter une citation
Ce matin, Jorge se réveilla vieux. Après avoir cru si longtemps être un homme vivant, il découvre à présent qu'il n'est qu'un homme mortel. Jorge supporte aujourd'hui toutes les années qu'il a accumulées sur les épaules, un poids qui le pousse vers le bas, dans une lutte qui oppose les jambes et le temps. Jorge aimerait se souvenir du sentiment de rage pour la ressentir, sinon la rage au moins la révolte, ou la peur ou l'effroi. Il devra se contenter d'une légère mélancolie, un vague mal être comme le froid dans les os et le souvenir d'avoir été meilleur.
Il y a des hommes tristes et des hommes joyeux et il y a aussi de vieux hommes. L'âge est une soupe froide d'émotions anciennes, des saveurs et des arômes qui surgissent au hasard dans la mémoire des vieux. Le temps use tout ce qu'il effleure, pierres et corps, il arrondit les angles de toute chose comme s'il en combattait les formes. Le temps nous mâche doucement pour que la mort nous trouve tendre et docile. La mort aussi est une vieille dame aux dents fragiles d'avoir tant rongé.
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Le dimanche, beaucoup d’hommes sont perdus dans les rues, et Karl avec eux. New York ne sait que faire des heures libres, la ville et ses habitants deviennent des choses creuses, des yeux vides, des pieds qui marchent parce qu’ils ne savent rien faire d’autre.
La famille épargne l’ennui a beaucoup de gens, dans une famille, toutes les heures ont un nom : l’heure de manger, l’heure de se promener, l’heure de rentrer, l’heure de manger encore. Le dimanche, les appartements de New York se remplissent de familles et de lumière, ils se transforment en phares pour celui qui a perdu sa route.
Pendant les heures vides du dimanche, des questions sont posées qui n’ont pas de réponse et il est des hommes qui se tuent. Il y a beaucoup d’hommes qui meurent le dimanche dans la ville.
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Karl n’y connaît rien aux femmes, du moins rien qui soit vrai ou utile. Il sait de quoi elles ont l’air et comment elles parlent, il en sait un peu sur leurs corps et les services qu’elles rendent, mais il ne sait plus rien d’autre. Il ne suffit pas d’être sorti d’elles pour connaître les femmes, pas plus qu’il ne suffit d’entrer dans leur corps. Un homme qui entre dans une femme peut ne jamais la connaître, car pour cela il faut beaucoup de temps et un désir qui ne s’éteigne pas avec le jour.
Chaque femme est une somme de parcelles innombrables, une pour chaque homme passé, pour chaque homme aimé, pour chaque douleur, pour chaque enfant. Certaines parcelles sommeillent jusqu’à ce qu’un effleurement les fasse tressaillir, d’autres brûlent d’un feu autonome, même si rien ne vient le nourrir.
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Une chambre est un espace vide avec des choses dedans. Elle ressemble en bien des points à un homme. Certaines choses y sont car elles ont été apportées là : meubles, vêtements, livres, tableaux. D'autres y sont sans que personne en ait formulé le souhait : air, lumière, poussière, insectes. De toutes ces choses et de leur interaction advient un lieu que l'on appelle chambre. Lorsque quelqu'un y vit, tout se complique et l'espace se transforme en un organisme qui, comme d'autres, respire et dort.
Fernando est une partie de sa chambre, c'est pourquoi ses rêves s’agrippent aux murs. Lorsqu'il les touche, il sent la consistance, la température et l'humidité de ce qu'il a rêvé. Parfois, lorsqu'il se réveille, il hume l'odeur de la peur et la chaleur des cauchemars. Certains jours, la chambre sent l'Inde, où Fernando n'est jamais allé sinon dans ses rêves de lointain, avec des arômes et des couleurs sans nom. D'autres jours, les odeurs du passé envahissent les draps et les cauchemars sont légers, faits de voix douces qui l'appellent.
Fernando sait que rien n'est inanimé. Les âmes sont partout, et aussi dans sa chambre...
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Une musique vient de loin. Une musique qui n’est pas jouée, qui s’entend à peine. Une musique qui entre par la fenêtre et qui est le ressentir ou le souvenir de quelqu’un qui est déjà passé et qui est resté par là. Une mélodie est la plus belle épitaphe à laquelle on puisse aspirer.
La musique de la rue eut l’amabilité de réveiller Fernando et de lui dire qu’il était encore vivant ou, tout du moins, qu’il était encore capable d’entendre la musique. Les oiseaux dans sa poitrine s’envolèrent vers d’autres cieux, laissant derrière eux des petites plumes, bien peu de chose.
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