La violence, omniprésente. C’est d’ailleurs le titre original du roman de Delilah S. Dawson racontant le parcours de femmes Délivrées dans un monde qui vacille.
Encore une histoire de pandémie, me direz-vous. Oui, sauf qu’elle est très singulière et que le récit se focalise surtout sur ses personnages féminins, le contexte ne servant qu’à accentuer le message.
Une famille, plusieurs générations. Une mère tout d’abord, vivant sous le joug d’un mari tyrannique et brutal, l’archétype du pervers narcissique. Ses deux filles ensuite, une adolescente déjà fortement confrontée à cette violence dans le cercle familial et dans sa vie personnelle, et une gamine lumineuse de cinq ans pas encore gâtée par l’ambiance délétère. Et se rajoute une grand-mère « de la haute » qui va devoir remettre les pieds sur terre.
Un contexte qui offre les ingrédients pour un thriller psychologique, sauf que l’autrice a voulu sortir des schémas habituels, son cursus passé d’écrivaine de romans fantastiques n’y est pas étranger.
L’épidémie qui s’abat sur le monde va rebattre les cartes. Et, d’une certaine manière, traiter le mal par le mal. Son nom : la Violence, justement. Les infectés se mettent à avoir des crises qui les poussent aux pires extrémités, en réaction à une agression ou juste un stress.
Chelsea, cette mère, va subir comme user de ce virus. Le reste de la famille et elle vont voir leurs vies chamboulées, d’une manière que le lecteur n’imaginera pas.
À part les excès de cette épidémie qui parsèment le récit, lui insufflant une aura étrange, le reste de l’histoire de ces femmes est très crédible. À tel point que les scènes de violence conjugale sont difficilement soutenables tellement elles sont fortes et expressives. Terribles moments qui font prendre conscience de tous les détails de ce genre de relations.
Delilah S. Dawson dénonce, mais ne le fait pas dans le vide, sa postface où elle parle de son propre parcours ne peut que renforcer la puissance de ces passages. À travers cette fiction, on sent qu’elle a puisé dans son parcours personnel, et qu’elle a voulu l’exorciser.
C’est donc une histoire de femmes, un seul personnage masculin surnage dans un éventail de salauds, mais c’est bien pour ouvrir les yeux de tous. La parole s’émancipe, mais ces horreurs du quotidien sont toujours aussi présentes. Une accumulation de scènes uppercuts dans un texte qui met la violence au centre, au premier degré comme de manière plus figurée.
Le roman n’en reste pas moins une fiction, où ces personnages vont avoir la possibilité de s’émanciper, grâce aux rencontres surprenantes sur leurs chemins de vie bouleversés. Une aventure humaine au propos puissant, même si l’idée de répondre à la violence par la violence est parfois limite. Le propos se veut volontairement provocant pour faire bouger les lignes.
On s’attache fortement à ces personnages, même à la grand-mère atrabilaire, le cœur du lecteur palpite à leurs côtés, à vivre des émotions fortes.
Delilah S. Dawson propose un récit plein de rage, mais où la résilience est possible. Les femmes qu’elle met en scène sont Délivrées de l’oppression de la violence quotidienne. Parce que le monde change, et qu’il doit changer encore davantage.
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