Étrange et intéressant livre, miscellanées de l'auteur qui nous emmène dans le Shangaï (et bien plus loin, dans la Chine du Nord) des années 50 à fin 70.
On accède à un monde totalement différent, hallucinant parfois (les disputes avec les voisins -inconnus- de lit qui se terminent en bagarre à coup de jet de poignées de poux, nous laissera un souvenir impérissable). Les vies qui se développent dans la Chine communiste, sous les autocritiques, la menace permanente du jugement social et les températures de moins cinquante, moins trente, mentionnées avec un naturel assez déconcertants pour la française lorraine pourtant habituée aux moins dix degrés celsius de ma région.
Les textes sont très variés, mais ils m'ont dans l'ensemble laissé une impression photographique: l'auteur est exceptionnel en ce qui concerne les descriptions. Il possède une justesse de ton, de précision, impressionnante, qui nous transporte dans la scène et le tout sans longueur exagérée. Cette capacité de description ne concerne pas que les paysages ou la matérialité observable de l'extérieur, il l'applique avec finesse aux personnages dont on comprend les motivations, le mode de pensée, de manière intuitive, très simple, sans effort, mais en nous laissant ce processus à faire. J'admire les personnes qui savent écrire ainsi: en nous mâchant le travail mais en nous donnant l'illusion que c'est bien nous qui avons su nous mettre dans la peau du personnage!
Le dépaysement est bien sûr total. J'ai beaucoup appris et apprécié ce livre, même s'il contient des scènes de vies très dures, particulièrement pour notre regard occidental moderne.
Je savais déjà apprécier la littérature japonaise et sa poésie, sa délicatesse, sa retenue. Ce livre m'a donné envie d'essayer quelques livres chinois pour voir si j'y retrouve cette finesse et cette intelligence de venir... présenter le plat à lire de manière soigneusement préparée.
Je ne peux m'empêcher soudainement de faire le parallèle avec la cuisine et les baguettes. En Occident, nous devons faire le travail de découpe dans notre assiette, en Asie, ce travail est déjà fait: fines lamelles, petits cubes, etc. Je me demande si je vais retrouver la possibilité de lire avec des baguettes dans d'autres ouvrages chinois! Voyez-vous ce que je souhaite exprimer par là? L'avez-vous déjà ressenti?
Commenter  J’apprécie         60