Venise 20 décembre 1577, un incendie détruit le Palais des Doges. Rien ne subsiste de la salle du Grand Conseil. L'immense fresque représentant le Paradis n'y échappe pas. Elle datait de 1365 et était l'oeuvre de Guariento d'Arpo .
Ce roman basé sur des faits réels retrace l'histoire de la création de la nouvelle fresque avec comme toile de fond la rivalité entre peintres, trahisons familiales et déchirements politiques.
Le livre est divisé en deux parties :
La première :
En février 1578, une commission décide d'organiser un concours entre plusieurs peintres réputés habitant Venise pour remplacer cette fresque. Il faut à cette commission deux ans pour en élaborer le programme. Chaque peintre doit préparer une esquisse afin de déterminer qui remportera le concours. Cependant, cette même année, le doge décède. Et jusqu'en 1587, il n'est plus question de cette fresque. le nouveau doge est plus intéressé par la reconstruction du Palais ainsi que le réaménagement de la Place
Saint-Marc tout à côté. Son successeur, par contre, s'empare de l'affaire dès son arrivée. Les candidats sont convoqués au Palais afin de présenter leurs projets. Chaque membre du jury a bien sûr son peintre favori et les débats sont difficiles. C'est cependant le doge qui va trancher et décréter 2 lauréats : Véronèse et Francesco Bassano (le jeune).
Pourtant lorsque les vénitiens viennent découvrir les tableaux, ils s'étonnent du fait que celui de Véronèse ressemble fortement à celui du Tintoret. Rusé, le vieux Véronèse s'était introduit de nuit chez le Tintoret grâce au fils de ce dernier lors d'une soirée de beuveries.
Véronèse ne se soucie que peu de Bassano. Il lui indique bien de loin en loin ce qu'il doit faire mais lui-même ne semble pas ardu à la tâche. Fort de sa réputation de peintre il préfère sa vie de noceur (malgré son âge). Les retards s'accumulent .
En 1588, Véronèse décède, et de prestigieuses funérailles sont organisées.
La deuxième partie :
Il faut réattribuer le travail. Et là c'est le Tintoret qui l'emporte seul !
Bien sûr il ne peindra pas seul cette immense toile : il ne faut pas oublier qu'à l'époque ,derrière un peintre, se cache une petite entreprise. Les apprentis en f onction de leur talent préparent les toiles, peignent les fonds, ou les drapés. le peintre ne faisant que diriger, puis terminer la toile et la signer.
Le Tintoret n'est plus tout jeune non plus, et il a de plus en plus de difficultés à peindre. Presque en catimini, ce sera son fils Domenico, le plus doué de ses enfants, qui le remplacera. Il transformera le projet initial car il veut un peu de modernité. Et puis, il veut aussi donner aux personnages notamment le visage de personnes qui lui sont chères . Il est secrètement amoureux de deux femmes. Il sait que l'une d'elle lui est interdite de par son rang et il ne sait comment s'y prendre pour déclarer sa flamme à l'autre. D'autres tourments le taraudent : le suicide de son ami Bassano, dépité puis le mariage et le décès en couches de sa soeur chérie. Arrivent enfin le délicat accrochage de la fresque au Palais et les fêtes qui s'ensuivent.
L'épilogue nous résume finalement le devenir des protagonistes de l'histoire.
Si vous visitez le Palais des doges actuellement, c'est cette fresque-ci que vous verrez réellement.
Un petit livre de +/-240 pages mais dense en informations. Ce roman est formidablement bien documenté. L'auteure, sans doute érudite en la matière, signe là un premier roman passionnant. L'écriture est fluide mais il m'a quand même fallu un peu de temps pour le lire car il faut "digérer" chaque chapitre. C'est un peu comme un cours d'histoire de l'art.
Mon autre passion après la lecture est la peinture que je pratique depuis plus de 20 ans. le sujet m'intéresse beaucoup et vous devrez me pardonner peut-être ma "partialité".