C'est le troisième roman de
Christy Lefteri que je lis grâce à Babelio et aux éditions du Seuil que je remercie pour leur confiance.
Malgré un début prometteur, un sujet qui revient de plus en plus souvent, de plus en plus dévastateur, laissant derrière lui des paysages morts et des sinistrés désespérés, je me suis rapidement lassée de retrouver ici les mêmes pensées, les mêmes faits qui reviennent sans arrêt à l'esprit de la narratrice. Je reconnais que lorsque l'on est victime d'un traumatisme, on a tendance à ressasser les évènements, mais là, cela ressemble un peu à du remplissage de pages. L'éco-anxiété me concerne au plus haut point. Je m'attendais à une analyse de ce phénomène centrée sur les incendies, mais la question posée est plutôt : peut-on atténuer la responsabilité d'un incendiaire sous prétexte que la sècheresse due au dérèglement climatique partage la responsabilité de l'étendue du feu ?
Mais venons-en un peu à l'histoire que
Christy Lefteri a voulu écrire, touchée par les feux qui se multiplient un peu partout et notamment par celui qui a noirci des milliers d'hectares sur l'île d'Evia, en Grèce.
Irini, notre narratrice, habitait encore cinq mois auparavant « un charmant village dans une forêt très ancienne, sur les pentes d'une montagne qui dominait la mer. »
Ce matin, Rosalie, le lévrier, la mène sur les terres ravagées par les flammes, au pied d'un arbre à moitié épargné par l'incendie. Elle l'a vu comme endormi, celui qu'elle appelle M.Moine, le promoteur immobilier qui a allumé le feu. Avec cette rencontre au pied du châtaigner, le brasier refait surface et manque de la consumer alors elle décide d'écrire le drame pour l'éloigner, le voir derrière elle, très loin. Ce sera
le Livre du feu pour raconter son histoire de l'extérieur avec une femme qui enseignait la musique, un homme qui peignait la forêt, Chara une petite fille pleine de vie et Rosalie la chienne lévrier.
L'incendie a obscurci tous les matins à venir, ceux, vêtus de leur parure saisonnière, qu'elle aimait tant contempler par la fenêtre. Certains y ont laissé la vie, souffrent de brûlures ou ont perdu leur habitation. Et quand le feu n'a pas pris la vie il a pris la joie.
Le responsable, cet homme froid, sans honte, sans scrupules, sans humanité, s'étant vu refuser un permis pour un projet d'hôtel, mérite-t-il assistance ?
Cette question tournera dans sa tête, l'obsédera, interrogera sa conscience et sera l'occasion d'une mini intrigue mais tellement tirée en longueur qu'elle en perd tout attrait. Avec, de nouveau, des faits qui se répètent.
Son mari qui peignait inlassablement la forêt, prostré dans son jardin depuis l'incendie, devient également une ritournelle. L'image de l'unique arbre, le figuier sous lequel il est assis chaque jour, dans la même position, les mains brûlées, bandées, posées sur les genoux, apparaît trop souvent au lecteur. Cette redite dessert la souffrance que ressent cette victime et diminue l'empathie que l'on pourrait lui porter.
Si certains passages, du moins dans le premier quart du roman, font revivre intensément l'arrivée de l'incendie, avec Rosalie la première à ressentir le danger, puis les oiseaux s'enfuyant, la fumée en masse noire, la chaleur puis les pins en brasier, ils sont vite atténués par la suite en raison de leurs répétitions. Des interminables heures passées dans l'eau avant d'être secourues, elle et sa fille, je n'ai retenu que des dialogues très pauvres. Ce fait, pointant la cruelle inefficacité des secours en cas de catastrophe n'est absolument pas développé.
Les paroles de son beau-père Lazaros, dont les yeux enregistraient ce qui changeait dans la forêt, « La planète est en train de changer. Nous n'avons pas pris soin de notre maison, Irini. » amènent le sujet d'actualité sur la multiplication des incendies et leur ampleur liée au dérèglement climatique. Mais, une fois de plus, il n'est qu'effleuré, en répétant que le sol est de plus en plus sec. Il aurait tant mérité un développement égal à celui des migrants abordés dans
l'Apiculteur d'Alep ou celui du braconnage dans
Les Oiseaux chanteurs, deux romans qui m'avaient profondément marquée.
Ici, les émotions se sont perdues dans les redites, dans cette petite poignée d'éléments qui occupaient les pensées et les souvenirs d'Irini.