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Marie de Prémonville (Traducteur)
EAN : 9782843375798
254 pages
Anne Carrière (26/08/2010)
3.83/5   405 notes
Résumé :
Les Goolrick étaient des princes. Et tout le monde voulait leur ressembler. C'étaient les années 50, les femmes se faisaient des coiffures sophistiquées, elles portaient des robes de taffetas ou de soie, des gants et des chapeaux, et elles avaient de l'esprit. Les hommes préparaient des cocktails, des Gimlet, des Manhattan, des Gibson, des Singapore Sling, c'était la seule chose qu'ils prenaient au sérieux. Dans cette petite ville de Virginie, on avait vraiment de l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (113) Voir plus Ajouter une critique
3,83

sur 405 notes
Peu de temps avant son soixantième anniversaire, en 2007, Robert Goolrick trouve le courage de publier “Féroces”.
Ce récit autobiographique s'apparente à un chemin de croix mais jamais l'auteur virginien n'a pu faire sienne la première des sept paroles prononcées par Jésus à l'agonie : “ Père, pardonne-leur car ils ne savent ce qu'ils font”.
Les parents du petit Robert eux savaient...

Vous refermez “Féroces” quelque peu ébranlés, l'esprit marqué par d'horribles réminiscences d'un parcours de vie irrémédiablement brisé dès l'enfance.
Vous n'êtes pas prêts d'oublier non plus cette american way of life des années cinquante, cette vie de faux-semblants noyée dans les plaisirs faciles et la recherche du bonheur à tout prix, ce désoeuvrement dans les vapeurs d'alcool qui pousse très loin les limites de la bêtise humaine...

Avec une sensibilité à fleur de peau Robert Goolrick met son âme à nue et extériorise une souffrance qui depuis si longtemps le ronge. Sans voyeurisme ni pathos, “Féroces” oscille dans sa seconde partie entre témoignage et catharsis.
Le rôle d'éponge qui échoit au lecteur est parfois difficile mais celui-ci s'honore à aborder, à comprendre, à finalement absorber les choses de la vie jusque dans leur laideur la plus immonde.
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"The End of the World as We Know It",tel est le titre anglais de Féroces, bien plus juste et fort que le titre français, assez racoleur.

Je viens de terminer ce livre atroce, ou plutôt c'est lui qui m'a achevée..

Effroi et douleur. Nausée et colère. Horreur et chagrin. Tout se mêle, il faut que j'écrive, vite : ne pas garder pour moi ce poison-là, si violemment infligé, si cruellement distillé,si authentiquement raconté. Voilà une autobiographie qui ne se laissera pas oublier.

Tout de suite la douleur est là, qui dévore chaque anecdote, même anodine: ces cow boys avec qui on ne veut pas jouer, cette robe diaprée comme une aile de libellule, qu'on ne veut plus mettre ni regarder,trouée qu'elle est par la cendre d'une cigarette, ce vélo qu'on ne donnera jamais, cette protection, cette tendresse toujours refusées, cette mascarade rejouée sans fin comme une mauvaise pièce à laquelle on ne croit plus, ces bouteilles de bourbon pour étourdir la honte des bourreaux , cette lame de rasoir pour raviver la plaie de la victime -pour appeler la mort ou se rappeler qu'on vit.. On sent planer une catastrophe, une malédiction, un traumatisme pire, cent fois, que celui de l'alcool destructeur et avilissant, pire que l'autodestruction à l'oeuvre sur les corps..

On traîne cet insupportable malaise jusqu'à la presque fin d'un récit écorché vif, désordonné, chaotique. Et tout à coup, c'est dit. On touche le fond de l'abomination. Plus rien à ajouter, juste à survivre. Et à écrire, enfin, après plusieurs romans, la vérité effrayante. Aux yeux du monde.

Mais ce qui arrache le coeur et les larmes, c'est ce fond de douceur, cet immense besoin de grâcier les coupables, cette impossibilité physique de quitter la maison du crime, parce que la maltraitance a ceci d'épouvantable c'est qu'elle demeure perversement liée à l'amour.

Je n'ai mis que 4 étoiles parce que je n'en pouvais plus de découvrir et de partager cette souffrance-là. Une telle sincérité ne devrait d'ailleurs pas être évaluée. On n'est plus dans l'oeuvre littéraire, on est dans le cri, dans la survie.

Un livre terrible.
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Si vous trouvez votre vie pourrie, lisez ce livre et vous verrez que l'herbe est parfois beaucoup moins verte chez le voisin.
Si vous avez l'âme d'un thérapeute, allez vers ce récit, vous allez être servi.
Si vous avez un coup de déprime, abstenez-vous et tournez-vous plutôt vers un feel-good.

Cette lecture est une erreur, un mauvais choix de ma part fait sur la base du résumé de la 4e de couverture. Un résumé trompeur. Car dès les premières pages, je me suis demandée dans quoi je m'étais fourrée. C'était loin, très loin de l'idée que je m'étais faite. Un roman je pensais... J'aurais dû au moins regarder les étiquettes de la fiche du livre :(

Il s'agit d'un témoignage, celui de l'auteur, qui remonte le fil du temps jusqu'à un événement traumatique vécu à l'âge de 4 ans. Une fissure dans cette enfance qui aurait pu être dorée auprès de parents chics donnant soirées sur soirées où l'alcool coule à flot sans jamais tacher les jolies robes en soie. Une fissure énorme, irréparable, détruisant toutes les chances d'une vie paisible, normale, joyeuse pour ce petit garçon. Une brèche ouverte sur un ensemble de dommages collatéraux, à défaut d'avoir pu au moins en parler pour amorcer le chemin de la réparation et ne pas se sentir coupable. Une vie gâchée. Un séjour psychiatrique, des automutilations, une quête d'amour impossible... Une vie de spectateur, à regarder celle des autres, à regarder tout ce qui lui est inaccessible, tout ce qui a été perdu...

Le récit est fait d'une suite de souvenirs qui surviennent sans chronologie, conduisant le lecteur vers cet événement majeur, terrible. Cela semble couché sur le papier comme un jet de pensées, souvenirs, qui s'articulent jusqu'à ce point crucial de la mémoire de l'auteur. Comme sur un journal intime. Ou comme un entretien dans le cabinet d'un psychothérapeute.
C'est bien construit, bien écrit, sans victimisation. le ton est mélancolique. le fond est bouleversant.

Mais s'il y a des livres où l'on ne souhaite pas connaître le contenu afin de le découvrir soi-même (c'est le cas en particulier lorsqu'il y a une intrigue ou un fil conducteur), il y a ceux où il me paraît nécessaire d'avoir les informations essentielles afin de s'engager dans une lecture en connaissance de cause et pouvoir l'apprécier à sa juste valeur. Ce livre fait partie de cette deuxième catégorie pour la lectrice que je suis. Ce défaut d'informations m'a fait vivre une lecture malaisante, me donnant le sentiment de violer l'intimité très secrète de l'auteur, une intrusion dans son histoire et sa psyché. J'aurais aimé savoir avant de m'engager sur ce terrain, peut-être aurais-je davantage apprécié cette mise à nu.
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« Je donnerais tout, n'importe quoi, pour être l'homme à qui cela n'est pas arrivé. Je ne peux m'y résoudre. J'ai essayé toute ma vie, et je ne peux m'y faire. » Robert Goolrick écrit cela à la fin du récit de l'événement qui a brisé sa vie alors qu'il n'était qu'un jeune enfant. Un traumatisme provoqué par un adulte, celui qui aurait dû le protéger contre toutes les agressions, son père.

Une histoire d'une famille du sud des Etats-Unis, d'enfants brillants et de parents beaux et mondains qui noyaient dans l'alcool leur mal être. Des parents qui ont piétiné l'enfance de leur fils de quatre ans presque négligemment, un soir où, une fois de plus, ils avaient trop bu. Une souffrance insurmontable et un secret inavouable que nous confie Robert Goolrick et qui nous bouleversent.
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C'étaient les années 50, dans une petite ville de Virginie. Les femmes mettaient des bigoudis avant l'heure du cocktail et de belles robes en soie. Les hommes jouaient de la cuillère et du shaker pour la préparation de ces fameux cocktails. Les cocktails, la première religion des Goolrick, nettement plus assidus en cette heure de fin d'après-midi que pour la messe du dimanche. D'ailleurs, on ne dérange pas un Goolrick à l'heure du cocktail, à savoir de dix-sept heures à minuit passé. le jeune Goolrick l'apprendra à ses dépens.

Derrière les rideaux fermés de ces demeures virginiennes, à l'abri des regards indiscrets, l'atmosphère devient étouffante, oppressante même. Je suffoque de ces faux-semblants d'une famille noyée sous des cocktails aussi colorés que les tapisseries du salon cosy et où l'alcool est aussi envahissant que ces sumacs de Virginie. le drame est là, je le pressens, je le ressens, juste une question de jours ou d'années, mais il va survenir, inexorablement, dans les vapeurs de gin.

Les scènes d'une vie, dignes de la fin d'un monde, celui de l'innocence du jeune Robert, s'achèvent à ma lecture. Achevé, je le suis totalement devant l'horreur de cette vie, les malheurs de cette enfance. Certains chapitres remuent les tripes, donnent la nausée, et le flot d'alcool déversé entre les pages n'est qu'un moindre mal. Un chapitre en particulier donne envie de fermer les yeux, et de laisser couler la tristesse de ce gamin de ses paupières closes. Oui, il y a des scènes horribles dans ce roman autobiographique, un grand roman certes, mais une expérience innommable, plus atroce et féroce que ne laisse présager la vie d'un grand écrivain. Je ou lecteur lambda ne peuvent rester insensibles à ces mots, les maux d'une époque et des cocktails de Virginie.
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Lorsque nous étions enfants, mon frère, ma sœur et moi, les hommes et les femmes avaient deux choses que nous n'avons plus aujourd'hui : les cocktails et les coiffures sophistiquées. Ils buvaient des Gimlet, des Manhatthan, des Gibson, des Singapore Sling, des Vodka Stinger, des Blue Monday, des Grasshopper, des Old Fashioned, des Highball et des Side-Car. Les jours de courses de chevaux, ils buvaient des Mint Julep. Ils avaient aussi des shakers et des cuillères à cocktail. Les hommes acquéraient une réputation par leur talent à confectionner tel ou tel cocktail. Les femmes ne les préparaient jamais elles-mêmes, sauf peut-être pendant la guerre, lorsqu'elles étaient seules. Mais pas aussi bien.
C'était tout un rituel masculin, qui passait par l'équipement, le choix des alcools, l'habileté manuelle et le trait d'esprit. Mon père et ses amis disaient des choses du genre : "Laisse-moi te servir son petit frère." Ils employaient des expressions comme "dégraissant", ou "juste un dernier pour la route."
Les gens avaient un bar chez eux, un vrai meuble alambiqué. Ils avaient des seaux à glace en argent. Des timbales en métal. Ils avaient des verres spéciaux pour les Highball, avec leurs initiales monogrammées. On recevait ce genre de choses en cadeaux de mariage.
De nos jours, sauf à l'occasion pour prendre un Cosmopolitan ou un Mojito dans un bar branché, les gens boivent plutôt du vin. Ou bien des alcools forts, à Wall Street. Quand j'étais petit, personne ne buvait de vin ; même au dîner on en buvait rarement, sauf dans des soirées très chic. Et c'était du mauvais vin. Du moins à la campagne. Il était servi en pichet. A l'époque, on préférait les cocktails. Aujourd'hui, personne ne dit même plus cocktail.
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On a tendance à vouloir aimer sa famille. En fait, on a même tendance à le faire.Même si l'on choisit de couper les liens avec tout ce qui avait été pour nous "chez nous", pour redéfinir l'espace dans lequel on vit, les émotions qui nous paraissent le plus naturelles, notre manière d'aimer, on reste hanté par un sentiment persistant de deuil et d'admiration à l'égard des êtres que l'on a connus en premier et le mieux. Même si on ne leur adresse plus jamais la parole, ils demeurent nos premiers et nos plus purs amours. Il y a, pour chacun de nous, une époque où ils signifiaient tout.
Parfois, cette époque dure toute notre vie. Elle est aussi éternelle que notre souffle. Elle ne s'altère ni ne meurt.
Parfois, elle prend fin à un âge très précoce. On n'y peut rien. Il arrive des choses.
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Le matin de mon anniversaire précédent, j'avais ouvert les yeux sur l'échec de ma vie et je m'étais dit : "si les choses ne vont pas mieux dans un an, je me tuerai."
L'année s'était écoulé. Je m'ouvris les veines.
Je ne pleurai pas. Je n'eus pas de pensée pour quelqu'un que je connaissais. Je ne ressentis ni désir de vengeance ni remords. Je me tranchai le poignet gauche de la main droite. Je suis droitier.
La peau céda facilement, et le sang s'écoula le long de mon bras jusque dans ma main repliée, puis sur les draps. La douleur était atroce.
[...]
Le sang était d'un rouge vif, plus rouge que je ne m'y attendais. La couleur était belle. Cramoisie. Comme le rouge à lèvres sombre et laqué d'une belle femme. Dans la lumière, il miroitait. J'étais amoureux de mon sang. La peau de mon bras gauche était blanche, pure et laiteuse, de la neige qu'aucun pied n'avait foulée. La coupure s'élargit et je vis la chair sous ma propre peau.
"Ça y est, pensai-je. Personne ne peut dire qu'il s’agit là d'une décision prise sur un coup de tête. Je n'ai pensé à rien d'autre pendant toute une année. J'ai assez attendu. Voilà ce que j'ai attendu toute ma vie."
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Ensuite, nous nous asseyons sur la terrasse dans la tiédeur des soirs d'été, à boire du Coca dans des verres en aluminium coloré. Les glaçons fondaient en cinq minutes. A l'époque, le Coca avait un goût différent, il était meilleur, ou du moins paré d'une certaine intensité, sur la terrasse, dans ces verres roses, rubis ou turquoise, dans la pénombre embaumée par le parfum humide du caladium et du mimosa. Assis là, sur la balancelle, les adultes prenaient leur "dégraissant", expression typique de Virginie pour désigner ce que les gens normaux appellent un dernier verre. Ils buvaient des Tom Collins de cinq heures de l'après-midi jusqu'au coucher.
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Après un dîner, lors duquel les femmes étaient vêtues de robes de taffetas ou de soie et portaient des boucles d'oreilles, des colliers et des bagues ingénieuses spécialement choisies pour l'occasion, ma mère faisait passer un plateau de digestifs assortis de verres minuscules : crème de menthe, triple sec, Drambuie, cognac et liqueur de cerise. Parfois elle confectionnait un pousse-café, ce qui impliquait d'empiler des couches d'alcools en fonction de leur densité, pour finir avec un arc-en-ciel vertical de six ou sept liqueurs. Elle était un peu la Marie Curie des digestifs.
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