"- La guerre entre les Tutsi et les Hutu, c'est parce qu'ils n'ont pas le même territoire ?
- Non, ça n'est pas ça, ils ont le même pays.
- Alors, ils n'ont pas la même langue ?
- Si,ils parlent la même langue
- Alors, ils n'ont pas le même dieu ?
- Si, ils ont le même dieu
- Alors, pourquoi se font-ils la guerre ?
- Parce qu'ils n'ont pas le même nez."
Voilà qui éclaire de façon lapidaire l'absurdité des conflits, et en ce qui concerne ce livre, le génocide des tutsi par les hutu au cours du printemps 1994.
Avant cet horrible massacre, le jeune Gaby, métis né d'un père français et d'une mère rwandaise réfugiée au Burundi, nous conte son enfance au bonheur uniquement entaché par la séparation de ses parents. Première tristesse de sa vie.
Mais grâce au groupe de copains, avec qui il passe le plus clair de son temps, la vie s'écoule calme et tranquille, ou presque, jusqu'à ce que les enfants eux-mêmes prennent peu à peu conscience des graves événements qui commencent à se produire au Burundi, avant d'exploser au Rwanda voisin.
Et le récit de quitter le ton léger, adopté jusqu'alors par le narrateur, donnant dans l'exotisme facile, pour faire tout à coup violemment ressentir au lecteur l'horreur d'une situation qui dégénère en massacres odieux, à l'insupportable brutalité. Cela est fait avec pudeur et retenue, le jeune Gaby ne s'éternise pas sur les horreurs perpétrées, mais le récit halluciné de sa mère et le comportement désormais erratique de celle-ci en dit bien assez long.
Et le jeune garçon enjoué et insouciant de se muer en adolescent douloureux, confronté aux pires abominations, qui transforment son calme
petit pays, en enfer de haine.
"Le génocide est une marée noire, ceux qui ne s'y sont pas noyés sont mazoutés à vie".