AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782362290817
64 pages
Editions Bruno Doucey (06/03/2015)
4.75/5   4 notes
Résumé :
Après un premier recueil, publié en Algérie en 2003, mon amie Habiba Djahnine revient à la poésie en femme apaisée, combative et lucide. Dans ce livre écrit directement en français, ce n’est pas la guerre civile qui est évoquée, mais le temps d’après la guerre, le corps sorti des décombres de l’histoire, l’amour retrouvé, dans un monde voué à la reconstruction des autres et de soi. « J’éloignerai la guerre et l’identité / Je construirai les fragments de la maison »,... >Voir plus
Que lire après Fragments de la maisonVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
J'ai rencontré Habiba Djahnine à Sète, lors du festival de poésie « Voix vives » dont elle était l'une des nombreux invités. D'emblée, j'ai été conquise par sa vitalité et je me suis laissée emportée par le vent chaud de sa poésie.

« A chaque corps sa mémoire »
Habiba Djahnine va chercher les mots au plus profond de sa mémoire. Ces mots assemblés, liés, font corps sur les ruines de la guerre. Vient le temps de la reconstruction.
C'est aussi l'histoire d'une confiance à reconstruire lorsque tout a été bafoué.
Mais comment aborder le passé ? Dans quelle langue s'adresser à la rue ? Elle interroge, décrypte et elle écrit le poème « car la poésie est le seul langage possible » celui qui saura apaiser la douleur d'une guerre insidieuse.

La poétesse doit retrouver les bribes du passé, que l'amnésie collective recouvre.

« Proche des murs de la maison
Tout près des silences nocturnes
J'entrevois en fragments
Les histoires des miens. »

Elle doit faire face à la peur.
« La peur.
Cette chose insondable, irrationnelle, fugace, poignante ! »

L'amour est très présent. Comment aimer à nouveau lorsqu'on n'a « appris qu'à mourir », car l'amour a cette faculté de panser les plaies et tenir la souffrance à distance.
Face à la mer, elle se dit « étrangère dans sa ville, étrangère dans sa vie ». Il faut pourtant éloigner l'oubli, mais comment ?
Ces éclats de vie sont traversés par les fantômes, ceux des ancêtres qui luttent contre l'oubli.
Dans "Autres conversations avec les fantômes », sourde une certaine violence entre doutes et affirmations.

L'écriture est limpide, et on se laisse aller à ce déploiement existentiel où la mémoire cueille des souvenirs sensibles.



Commenter  J’apprécie          720
Quels textes!!!
Les éditions Bruno Doucey abritent plus d'une perle, en voilà une avec «Fragments de la maison».
J'avoue que souvent les écritures venant du Maghreb et du Moyen Orient m'habitent longtemps après une lecture. La poésie d'Habiba Djahnine vient de se faire une place bien au chaud dans les combles de ma mémoire.

Fragments de la maison ou comment une histoire d'amour peut-elle renaître de ses cendres.
Une histoire d'amour, entre une terre et Habiba Djahnine, déchirée par la guerre, souillée par les barbus. Une histoire d'amour, entre l'auteure et la vie, bafouée par la folie des hommes.
L'histoire d'un adultère où la nature humaine offense le moindre signe d'intelligence, là où le coup de bâton répond au coup de coeur. Un conte défait dans lequel des bris de vers s'élèvent contre la résignation.
L'espoir en ruine, comment reconstruire quelque chose, comment retrouver la confiance en cette ville, en ce pays, en l'autre, en soi?
Fragments pour cette femme blessée, pour cette femme faite aujourd'hui de chair et de sans.

"Ce matin à l'aube
Je découvre mon pays
Sous une chaleur arrogante
J'avance lentement
Vers les espaces connus
Je découvre soudain
Ses sentinelles
Silencieuses et alertes
Ce matin à l'aube
Je découvre mon pays
Et l'impossible memorium
Pourtant les morts sont nombreux
Nommés ou non martyrs

Ce matin à l'aube
Je découvre nos morts tout près de nous
Ils refusent les faux semblants de l'histoire
Ils s'érigent en sentinelles invisibles
Ils veillent sur nos mémoires
Ils veillent sur nos amnésies. "

Quelques éclats de vers et la nature reprend ses droits…

"Nous n'avons pas encore exhumé des décombres nos mémoires douloureuses face à ceux qui ont déjà décrété l'impossible réconciliation.
Sans pardon, sans regret, sans repentance.
Tout se passe à l'endroit précis où se pose délicatement l'aile d'un moineau.
Moineau qui, lui, connait si bien l'envol et la liberté.
Cette chose délicate, sensible.
L'infime poésie qui explose comme le plus terrible des volcans.
Car le moment est venu. Plus rien ne peut retarder l'éruption!"


Habiba et Alger, comme deux amants séparés contre leur gré, longtemps, trop longtemps. Ils se redécouvrent, lentement, difficilement, osant à peine un regard, un effleurement. Chaque page est une main tendue vers l'autre. Chaque mot d'Habiba Djahnine est comme une caresse adressée à la vie avec ses doutes et ses espoirs. Chaque lettre est un murmure du bout des doigts, tour à tour sensuel, triste, charnel, nostalgique, désenchanté, espérant.
Fragments de la maison, c'est l'histoire d'un amour consumé. Reste de magnifiques braises que l'auteure ravive sans artifices, juste avec ses tripes, avec son coeur, avec son âme. Une poésie en liberté, elle aussi.

Ce recueil est un cri de plus, nécessaire encore une fois. Pas nécessaire pour ne pas oublier mais pour rester en conscience d'un présent qui pousse à l'indignation et à la révolte un peu partout. Nécessaire aussi pour garder à l'esprit qu'une guerre ne fait que des perdants, quel que soit le camp, quel que soit l'endroit, quelle que soit la cause.

Merci Sirenna de m'avoir mis ce livre entre les mains.
Commenter  J’apprécie          4414
La poésie comme une maison à reconstruire après la guerre. Mots après mots, phrases après phrases, une écriture en mouvements qui se questionne, se cherche, esquisse les paysages d'un pays souffrant, déchiré, les traits de visages usés qui ont tout vu et vécu.
Habiba Djahnine est à la recherche de ce nouveau pays qui renaît de ses ruines comme elle est à la quête de celle qu'elle devra être après toutes ces souffrances. Comment oublier la peur, les séismes, comment revivre normalement, cuisiner, s'occuper de ses enfants, aimer, dormir dans cette ville devenue étrangère et dans ce monde qu'on n'a connu jusqu'ici que dans la violence de la guerre?

On avance avec elle pas-à-pas dans un paysage fragile et intime, beau parce qu'il est en son point de bascule. Par les mots, on devine les ruines qu'il va falloir déblayer pour tout reconstruire.
Et puis: faut-il se taire? Oublier? Ou attendre que la colère explose pour se souvenir des siens?
Commenter  J’apprécie          150
Habiba Djahnine, poète et réalisatrice algérienne, vient du grand sud et n'a pas que du sable et du jasmin à proposer dans ses films et ses ouvrages. Issue d'une famille de militants qui a subi la déflagration de l'assassinat de sa soeur par les islamistes, elle mène le juste combat de la place des femmes dans le Maghreb. Après avoir vécu la peur du terrorisme, elle a choisi d'habiter en plein centre du pays, loin des grandes villes, où elle mène une existence vouée à la reconstruction d'une paisibilité « la seule guerre utile est celle que l'on fait à la peur ».

Son deuxième ouvrage, Fragments de la maison, publié en 2015 dans la belle collection des Éditions Bruno Doucey, sonne à la fois comme une invitation à reconstruire après la guerre : « Je construirai les fragments de la maison / Pour étaler des feuilles de poésie ». Mais il renvoie aussi aux fragments de la rade gauche à droite : V.Rouzeau, J.Bacon, Y.Le Men, H.Djahnineison, pour chercher les raisons de cette guerre civile qui a frappé l'Algérie dans les années 1990 et de l'envie de tout quitter de ses compatriotes vers des horizons meilleurs : « Sur les chemins, le bitume, les pavés / Gisent des êtres qui souffrent de l'attente / Des êtres que nos terres ne contiennent plus // La mer du milieu les absorbe / Les happe, les rejette sur les rivages incertains / Dans l'autre continent, sans amour, sans sépulture ».

Son identité, Habiba l'affirme dans « l'Alphabet du corps, le corps / Hurle de douleur parce que le corps / Brûle d'amour parce que le corps / Tue l'identité qui se trouve dans le corps ». Elle l'affirme, elle aussi avec les mots de poètes : « Je reviens à la poésie / le seul port possible / Pour faire accoster mes doutes ».
Lien : http://www.unidivers.fr/jose..
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (5) Ajouter une citation
La peur.
Cette chose insondable, irrationnelle, fugace, poignante!
La peur accompagne toute procession, car demain ressemble à l'incertain.
Est-elle nichée dans la poitrine? Dans la tête?
Dans l'âme? Dans le ventre?
Dans les tripes?
Dans la conscience? Dans l'enfance? Dans l'histoire?
Dans les maisons?
Peur de quoi? Peur de qui?
A quel moment la peur s'insinue-t-elle dans nos vies?
A quel moment s'installe-t-elle entre nous et le reste du monde?
A quel moment nous empêche-t-elle de penser, de bouger, d'agir?
La seule guerre utile est celle qu'on doit faire à la peur!
Les silences multiples suffisent à nous enfermer dans les sentiers de la mort.
Commenter  J’apprécie          271
Blanc est le ciel
Sourdes sont les rafales de vent
L'air se remplit de milliers de grains de sable
La tempête n'attend plus
Elle envahit ma ville.
Des oiseaux dont j'ignore le nom
Regardent avec moi la colère du monde.
Je m'adosse à mon mur d'argile
J'immobilise mes gestes
Par respect pour leurs ailes fragiles
Leur envol peut les tuer
Blanc est le ciel
Sourdes sont les rafales de vent.
Je reviens à la poésie
Le seul port possible
Pour faire accoster mes doutes
Pour regarder passer les tempêtes
Qui déplacent les dunes et éloignent les silences.
Les temps se confondent
Ici le ciel est blanc
Il ressemble à nos égarements, à nos défaites, à nos fuites.
Commenter  J’apprécie          111
Hier j'ai regardé ses rides une à une
J'ai dévisagé les sillons de son âme
Pour dérouler le fil des ans
Qui ont tissé tant d'histoires sur sa peau
Commenter  J’apprécie          362
Le lac se réveille.
Le vent glacial du nord vient raviver ses colères.
Nous
Ou les fragments de nous
Sommes à l'écoute de nos instants
Qui se croisent.
Les feux craquent et sautillent
Sur nos corps nus d'évasion.


L'Eveil
Commenter  J’apprécie          110
Proche des murs de la maison
Tout près des silences nocturnes.
J'entrevois en fragments
Les histories des miens.
Humains
D'une humanité vacillante
Hésitante
Muette.
Commenter  J’apprécie          30

Videos de Habiba Djahnine (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Habiba Djahnine
Festival Voix Vives 2023 Apéritif poétique et musical : Habiba Djahnine Images et montage : Thibault Grasset #Poésie #VoixVives #HabibaDjahnine
autres livres classés : poésieVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus

Autres livres de Habiba Djahnine (1) Voir plus

Lecteurs (11) Voir plus



Quiz Voir plus

Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

Paris
Marseille
Bruxelles
Londres

10 questions
1231 lecteurs ont répondu
Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..