Perséphone

Après la jolie surprise Thelma, j'ai retrouvé avec beaucoup de plaisir la plume de Caroline Bouffault et la confirmation de son agilité à évoquer des sujets graves avec une légèreté qui n'occulte jamais la profondeur. Un art subtil du décalage qui lui permet de divertir, d'interroger et de consoler en même temps.

Perséphone est le nom de l'entreprise fondée par la jeune Rosa Campion, une start-up dans un domaine encore peu exploité : la communication post-mortem. Pas d'histoire de médium ou de tables qui tournent, il s'agit plutôt de proposer à tout un chacun - car oui, nous sommes tous potentiellement voués à mourir donc dans la cible - de préparer l'après en pensant à ceux qui restent. de prévoir une façon de les accompagner par des messages enregistrés qui leur seront délivrés selon un calendrier et un rythme définis à l'avance. Drôle d'idée ? Pas si sûr, en tout cas Rosa est pleinement investie dans le développement de son entreprise dans laquelle elle n'hésite pas à embarquer un associé bénévole gothique en quête de sens ou encore Grégoire, un informaticien revanchard opportunément mis sur son chemin. Mais la mort est-elle un marché comme les autres ?

Cette idée de départ est un très bon prétexte pour explorer un univers à l'aune des progrès technologiques, des lois du marché ou des nouvelles réalités induites par l'existence des réseaux sociaux. Pourquoi ne pas préférer maîtriser sa communication post-mortem ? de levées de fonds en opérations marketing, Rosa tente de défendre son concept avec une sincérité qui se heurte parfois au cynisme ou à l'incrédulité, et l'autrice mène habilement la danse dans un contexte digital parfaitement décrypté, arrachant souvent un sourire en cours de lecture. Mais le vrai sujet est celui de l'appréhension de la mort et du deuil, la vision de chacun envers sa propre finitude ou les traces qu'il aimerait laisser. de façon subtile s'esquisse la complexité d'une relation très personnelle à la mort, en lien avec le vécu de chacun, avec sans doute à l'esprit le vide laissé par des mots jamais entendus ou des questions jamais explicitées.

Je vous rassure, comme pour son précédent roman, l'autrice préfère la lumière, les rencontres qui réconfortent, les relations improbables, rien n'est noir avec elle même si l'émotion affleure sous la légèreté de l'humour. Une charmante manière de poser la seule question qui vaille : faut-il vraiment une vie après la mort ?
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