Le problème des séries dont on a apprécié le premier opus, c'est que l'on a toujours peur que la suite ne soit pas à la hauteur… Et bien vous pouvez être rassurés : ce second volet est aussi bon que le précédent, si ce n'est même meilleur ! L'auteure a véritablement approfondi la psychologie de ses personnages. Avec brio, elle les a entraînés dans une spirale tourmentée mêlant démons intérieurs, idéologies et émotions. Qu'ils soient principaux ou secondaires, ces narrateurs souffrent terriblement. Ils sont rongés de l'intérieur, survivent au quotidien et cherchent à redresser la barre. Certes, l'ambiance est très pesante néanmoins, j'ai vraiment été happée par cette histoire ! D'ailleurs, je compte bien enchaîner avec « le choix d'aimer ».
On retrouve les protagonistes quelques mois après l'horrible pendaison. Sephy s'est totalement coupée de sa famille et, malgré son jeune âge, a décidé de garder le bébé métis qu'elle a dans le ventre. Mais comment s'occuper d'un nourrisson quand on ne sait déjà pas s'occuper de soi-même et que l'on est encore un grand ado ? Cet enfant aura-t-il sa place dans ce monde où les deux castes s'opposent ?
Malorie Blackman va développer tous ces sujets à travers son héroïne toujours aussi complexe, courageuse, immature et perdue. Par le passé, la belle Prima m'avait agacée en raison de son côté égoïste et enfantin. Même si elle n'a pas changé, elle a toutefois réussi à m'attendrir dans son nouveau rôle de mère. J'ai été très touchée par les difficultés qu'elle a rencontrées à l'arrivée de Callie Rose : le quotidien chamboulé, les pleurs, la peur de perdre ce petit être, l'apprentissage de la maternité et de l'éducation, la difficulté à s'éloigner du bébé tout en prenant soin de lui, … J'avoue que c'est surtout le dernier point qui m'a émue, car j'ai ressenti de l'empathie. Il est difficile de trouver un juste-milieu avec un bambin qui devient notre centre du monde (surtout dans le cas de Sephy qui n'a plus rien !). On veut protéger le bébé et s'en occuper constamment, n'osant pas déléguer et s'oubliant parfois soi-même… Toute la psychologie post-natale a été très bien menée par l'auteure qui, à l'inverse des romances habituelles montrant une vie idyllique, présente une image réaliste des premiers mois. Cela m'a agréablement surprise. Je ne pensais pas que l'on aborderait ce sujet, ni celui de la dépression post-natale dans une saga pour ados. Et pourtant, c'est ce qui va heurter de plein fouet la demoiselle, déjà anéantie par la perte de celui qu'elle aime et la culpabilité ! Comme si cela ne suffisait pas, la pauvre va devoir faire face à un courrier qui m'aurait également donné le coup de grâce… Il y a réellement deux moments dans ce récit : avant et après la fameuse lettre…
L'ouvrage va principalement mettre en avant Sephy et Callie Rose. Toutefois, les familles Hadley et Mcgrégor vont continuer de graviter autour d'eux. On va ainsi avoir le point de vue de Minerva (sa soeur, qui me laisse toujours dubitative et avec peu d'intérêt), Jasmine (sa mère, qui a encore un rôle trop faible à mon goût), Meggie (la mère de Callum qui va avoir une grande importance dans le scénario et qui m'a fait bonne impression) et enfin Jude, le frère de Callum. Ce dernier va enfin gagner en consistance, puisqu'il va devenir de plus en plus actif au sein de son groupe de rebelles. Extrémiste anti-Primas, il va laisser sa vengeance le guider et va être déterminé à faire payer l'exécution de son cadet. Contrairement à ses comparses qui prônent l'égalité Nihils/Primas, Jude n'envisage aucun compromis : les personnes noires doivent payer. Cette opposition de mentalités est très intéressante, crédible et d'actualité… Malgré son idéologie extrême, Jude va pourtant se rapprocher de Cara, une jeune Prima dont il espère se servir pour gagner de l'argent. Malheureusement pour lui, sa vie n'est que dilemmes et hésitations, car il ne tarde pas à être perdu entre sentiments, mission, vengeance et colère.
Malorie Blackman a vraiment bien travaillé ce protagoniste !
Agressivité, peur, amour, famille, maternité, entraide, trahisons, représailles, valeurs, tolérance, différence, racisme, musique, … « La couleur de la haine » est un tourbillon d'émotions qui a su m'emporter tout au long des chapitres. Que je déteste un personnage, invective le comportement de l'un d'eux, espère pour un autre, vibre pour la jeune mère, je ne suis jamais restée insensible à la descente aux Enfers de Jude et de Sephy. Les seules choses qui m'ont manqué pour ressentir un coup de coeur, ce sont les répétitions et le manque d'action. J'ai trouvé dommage que l'on ne développe pas davantage les deux castes ainsi que leur fonctionnement. Finalement, on en est toujours au même point qu'avec le premier tome et on répète simplement les inégalités Nihils/Primas. de plus, par moments, il aurait fallu plus de rythme, car j'ai trouvé que certains passages étaient un peu longs… Il n'empêche que j'ai adoré cet opus que j'ai dévoré en deux jours ! Et que dire de cette nouvelle fin brutale et intense qui donne envie de se jeter sur la suite ?! Si vous ne connaissez pas encore cette saga, n'hésitez pas ! Non seulement elle est riche par ses thématiques, ses personnages sont complexes, mais elle est également très ancrée dans l'actualité.
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