Il est capable de ça mon père. Capable du meilleur comme du pire. Capable de manifester de la tendresse, des gestes doux et attentionnés. Puis, la seconde suivante, sans signe précurseur, capable de faire preuve d’une agressivité terrible, d’exprimer une violence autant physique que verbale.
Il véhicule un code d’honneur, prône des valeurs de travail, de courage, de respect, de politesse, qu’il nous a tous inculquées. À contrario, ses préceptes concernant la fidélité, la bienveillance et l’affection du couple souffrent de l’adage « faites ce que je dis, pas ce que je fais ». Autant de leçons qu’il dispense aux autres avec force de conviction, mais qu’il se garde bien de suivre.
Dès qu’il se met à hausser le ton et me foudroie du regard je le crains. Il me fait tellement peur que souvent je ne peux me retenir de pisser dans mon froc. Je sers la ceinture abdominale tant que je peux, mais une auréole finit par humidifier la couture de mon pantalon à mesure qu’il hurle sur moi sa colère. Mon corps se tétanise. Je sens le filet chaud couler interminablement au long de ma jambe. Et quand il passe à l’acte, me gifle violemment du plat de la main ou me martèle le crâne le poing fermé, alors il pèse de tout son poids pour marquer son empreinte, comme un loup marque son territoire. Puis il tourne les talons et va s’asseoir au fond du canapé, m’abandonnant à ma pisse, se murant de longues minutes dans un silence oppressant.
L'autiste ne parle pas, il interrompt le silence un tant soit peu.