"La liberté au pied des oliviers" est sorti début juin, un an après "Une famille comme il faut", le premier livre de l'autrice à être traduit en français (disponible au format poche chez Pocket).
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Laissez-vous envoûter par la belle Rosa Ventrella, qui nous parle de son livre dans sa langue natale ; en l'écoutant, on est déjà un peu en train de voyager...
La médisance était partout et poursuivait ma mère, qui devait l'esquiver à chaque pas : elle se glissait dans les ruelles, dans l'escalier en colimaçon tordu qui menait à la place, elle se cognait contre les bonbonnes d'huile devant « lu trappetu », le pressoir, elle entrait dans les yeux des ânes attelée aux charrettes de fruits, elle contaminait le vendeur de sardines, le boulanger, le vendeur de fruits et légumes, les commères sur le pas de leur porte...
J’avais honte, ma robe deux tailles trop grande – parce que c’était ainsi que me les cousait maman, pour qu’elles durent plusieurs saisons – encore collée à mon corps, mes pieds claquant dans mes sabots mouillés. J’avais mal au ventre, la nausée et le vertige rendaient chaque pas difficile et me brouillaient la vue. J’entendais cent abeilles bourdonner dans ma tête.
Moi aussi, j'ai fait un effort j'ai sorti une vieille robe à fleurs qui me sert un peu, je me suis coiffée et j'ai mis des chaussures neuves. Sans véritable raison, en réalité. Peut-être que les amours terminées méritent encore une belle tenue. En le regardant, je ressens le vertige du saut dans le vide, comme quand, enfant, on rêve qu'on tombe dans un précipice sans fin et qu'on cherche désespérément une prise à laquelle s'agripper. À la différence d'un jouet cassé, pas de réparation possible pour l'amour.
C'est la triste fin d'une histoire, à fil ténu qui se coupe...
Dans la vie, j’ai appris que chaque perte est différente, même si les mots d’adieu se ressemblent tous et qu’aucun cœur n’est assez grand pour contenir tous les adieux.
J'ai longtemps été convaincue de pouvoir tout supporter, à l'exception de la douleur de ma mère.
Je crois que si nous pouvions remonter à l'instant qui précède la perte d'un être cher, nous trouverions tous un mot à prononcer ou un geste pour alléger les regrets.
[...] mieux vaut être méprisé que méconnu.
On ne s'habitue pas à l'idée de perdre quelqu'un, on ne peut pas se préparer au choc, comme quand on ferme les yeux et qu'on attend que la seringue nous entre dans la chair. On peut seulement laisser la douleur nous traverser et espérer qu'elle ne lacère rien sur son passage.
- C'est comme ça, Mari', si tu lances un caillou à la mer tu le vois pas. Mais tous ensemble, au fond, regarde comme ils sont beaux, regarde comme ils brillent. Nous aussi, Mari', on est comme les cailloux dans la mer. On brille que quand on est les uns avec les autres.
Je riais aussi, sans bien comprendre pourquoi, mais j'aimais unir mon rire à celui de mes parents.