Début de l'introduction
Il n'y a pas d'éducation sans valeur.
Même si l'on réduit l'éducation à l'enseignement scolaire, on apprend à l'école. Or, qu'est-ce qu'apprendre, sinon passer d'un état à un autre, plus souhaitable ? Apprendre, c'est se délivrer d'une ignorance, d'une incertitude, d'une maladresse, d'une incompétence, d'un aveuglement ; c'est parvenir à mieux faire, à mieux comprendre, à mieux être. Or, qui dit "mieux" dit valeur.
Paragraphe de conclusion :
La pratique de l'éducation et plus encore la réflexion sur cette pratique nous permettent de briser le cercle. rappelons que les valeurs sont relatives à une culture, à une époque, voire aux divers états d'un seul et même homme. Reprenons l'exemple étudié dans l'introduction, celui de l'ennui. L'homme qui s'ennuie s'est persuadé que "rien ne vaut la peine" ; il attend que le plaisir lui soit donné sans l'effort, la récompense sans le travail, le dimanche sans la semaine... Et le plaisir est sans goût, et le dimanche sinistre.
Supposons pourtant qu'il sacrifie sa jouissance immédiate et passive à autre chose, à la joie qui résulte du faire, du créer, du donner, de l'apprendre : alors, il se rendra compte que ce qu'il a sacrifié, loin d'être toute la valeur, n'en avait que très peu, à la limite, aucune. Pascal a poussé cette limite jusqu'au paradoxe : "Vous reconnaîtrez à la fin que vous avez parié pour une chose certaine, infinie, pour laquelle vous n'avez rien donné."
Même si l'on ne pose pas les termes du pari comme Pascal, son paradoxe n'exprime-t-il pas la plus grande réussite de l'éducation ? L'enfant, le jeune, l'homme qui s'éduque (le s', étant le signe d'une éducation active et supérieure) découvre qu'il a cru renoncer à bien des jouissances, donner beaucoup de temps, beaucoup d'efforts, beaucoup de soi, et qu'au fond, le sacrifice n'en était pas un. Car ce qu'il a reçu à la fin du parcours, que dis-je : reçu du parcours, est une telle joie et une telle lumière, que tout ce qu'il a cru donner pour l'obtenir n'était, en fin de compte, rien.
Il importe donc de savoir que l'épanorthose n'est pas une maladie de peau, ni l'hypotypose un suppositoire de bronze de l'antique médecine, ni la tapinose une rhétorique de trottoir ...
Il n'y a pas de vrai en soi, mais une vérité de chaque individu, de chaque cité ; ce qui importe, c'est ce qui lui permet de se faire valoir et de s'imposer, et qui est précisément la rhétorique.