Nouvel horaire pour l'émission "Le coup de coeur des libraires" sur les Ondes de Sud Radio. Valérie Expert et Gérard Collard vous donne rendez-vous chaque dimanche à 13h30 pour vous faire découvrir leurs passions du moment !
Retrouvez leurs dernières sélections de livres ici !
le Géant empêtré de Anne de Tinguy aux éditions Perrin
https://www.lagriffenoire.com/le-geant-empetre.html
L'Histoire du monde se fait en Asie : Une autre vision du XXe siècle de Pierre Grosser aux éditions Odile Jacob
https://www.lagriffenoire.com/l-histoire-du-monde-se-fait-en-asie-ne-u-ne-autre-vision-du-xxe-siecle.html
Sambre : Radioscopie d'un fait divers de Alice Géraud aux éditions JC Lattès
https://www.lagriffenoire.com/sambre-radioscopie-d-un-fait-divers.html
Last exit to Marseille de Guillaume Chérel aux éditions Gaussen
https://www.lagriffenoire.com/last-exit-to-marseille.html
L'invitée de Emma Cline et Jean Esch aux éditions de la Table Ronde
https://www.lagriffenoire.com/l-invitee-1.html
Un été à l'Islette de Geraldine Jeffroy et Catherine Guillebaud aux éditions Arléa
https://www.lagriffenoire.com/un-ete-a-l-islette-2.html
On était des loups de Sandrine Collette aux éditions Audiolib
Entre fauves de Colin Niel, Thierry Blanc aux éditions Audiolib
La mariée portait des bottes jaunes de Katherine Pancol, Caroline Victoria aux éditions Audiolib
le Magicien de Colm Tóibín aux éditions Grasset
Les dernières volontés de Heather McFerguson de Sylvie Wojcik aux éditions Arléa
https://www.lagriffenoire.com/les-dernieres-volontes-de-heather-mac-ferguson.html
Les narcisses blancs de Sylvie Wojcik aux éditions Arléa
https://lagriffenoire.com/les-narcisses-blancs.html
le Carnet des rancunes de Jacques Expert aux éditions Livre de Poche
https://lagriffenoire.com/le-carnet-des-rancunes-1.html
Reine Rouge de Juan Gómez-Jurado et Judith Vernant aux éditions Pocket
https://www.lagriffenoire.com/reine-rouge-1.html
Les Brisants de Vanessa Bamberger aux éditions Liana Levi
https://www.lagriffenoire.com/les-brisants-1.html
Alto braco de Vanessa Bamberger aux éditions Liana Levi
https://www.lagriffenoire.com/alto-braco-1.html
le Parfum des poires anciennes de Ewald Arenz et Dominique Autrand a
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J’ai vu mes parents faire le deuil des leurs et j’ai appris. J’ai appris que face à la mort, on fait comme on peut, avec ce qu’on a. J’ai vu que le deuil était autant une histoire de vie que de mort.
Et la douleur, dans tout ça ? Oh, elle viendra. Elle est patiente, il faut lui laisser le temps. Elle viendra quand le temps coulera à nouveau de son flux régulier. Après les pompes funèbres, les banques, les assurances, les notaires et les papiers. Quand on sera redevenu une pierre poreuse, qu’elle se sera insinuée dans les fissures et qu’un beau jour d’hiver elle fera se fendre l’armure, d’un coup, sans crier gare. Elle sera là dans les joies, dans les bonnes nouvelles, dans ces moments de partage qu’on ne peut plus partager. Elle viendra dans un texto qu’on commence presque à rédiger pour demander comment ça va. Elle s’invitera aux anniversaires qu’on ne fêtera presque plus. Elle nous surprendra des années après, en tombant sur une de ses amies qu’on aura pas vue depuis longtemps. Alors on réalisera qu’on ne connaîtra jamais maman vieille, parée d’une chevelure argentée. Que jamais on ne verra poindre la lumière de ses yeux derrière des paupières tombantes marquées par le passage élégant du temps. Oui, elle viendra la douleur, mais pour l’heure, elle ne va pas gâcher la fête.
En entrant dans le bureau de l’oncologue, j’ai tout de suite compris pourquoi elle plaisait à ma mère. Petite femme sèche, les yeux bleus perçants, le menton pointu, les cheveux tirés. On se sentait tout de suite pris en charge, presque rassuré devant son professionnalisme militaire. Et puis maman avait l’habitude ; elle en avait vu passer, des gamins, pendant toute sa carrière de prof. Elle savait immédiatement déceler l’intelligence dans les yeux de ses interlocuteurs. Maman m’avait dit :
– L’autre médecin, le grand ponte, je ne l’aime pas du tout. Il s’écoute parler et il est trop bien habillé pour être honnête. Il a toujours le sourire, on dirait un homme politique en campagne. Et puis il a beau être spécialiste, il a toujours l’air d’oublier que le cancer, c’est moi qui l’ai et pas lui. Alors qu’elle, tu verras, elle est brillante, et au moins elle dit les choses clairement.
– Ah bon ? Tu lui as déjà demandé les choses clairement ?
– Ah non ! Mais si je le fais, je sais qu’elle sera claire et précise. C’est carré avec elle, elle va pas essayer de m’emberlificoter.
La confrontation à la mort a ceci d'extraordinaire que meme si on s'unit tous dans la peine, chacun a sa propre façon d’y faire face, Le deuil, c'est comme une course en mer: on part tous en même temps, chacun navigue seul dans sa petite embarcation, chacun suit son chemin en fonction de sa météo intérieure, et on arrive en ordre dispersé.
Parce qu'on ne sait pas faire autrement, avec cette musique, devant ce cercueil. Mais on ne pleure pas de tristesse, non. On ne sait pas trop ce qu'on pleure. On a les poils qui se dressent, des frissons dans le dos et le coeur qui s'emballe. On pleure en réalisant qu'on se sent plus vivant que jamais. Et ces larmes, c'est finalement tout sauf la mort, c'est un trop-plein de vie.
Le cancer, qui réalise le prodige de coloniser au-delà du corps malade en devenant le centre d'attention, le sujet de conversation, la rumination nocturne, l'inquiétude chronique. Le cancer, qui assure sa survie dans les pensées des autres. Plus qu'une maladie, il devient vite une affaire de famille.
C'est là que j'ai compris que la femme dans maman, on l'avait tuée il y a longtemps. Mais la mère, la louve, celle dont j'aimais le regard, on n'aurait jamais pu l'avoir, parce qu'elle aurait attaqué en premier. Voilà pourquoi elle aimait tant la mer déchaînée qui explose sur les rochers et les orages qui déchirent le ciel. Parce que face aux éléments, il n'y a plus de forts, il n'y a plus de faibles, on est tous à égalité.
La confrontation à la mort a ceci d'extraordinaire que même si on s'unit tous dans la peine, chacun a sa propre façon d'y faire face. Le deuil, c'est comme une course en mer : on part tous en même temps, chacun navigue seul dans sa petite embarcation, chacun suit son chemin en fonction de sa météo intérieure, et on arrive en ordre dispersé.
La confrontation à la mort a ceci d'extraordinaire que même si on s'unit tous dans la peine, chacun a sa propre façon d'y faire face. Le deuil, c'est comme une course en mer : on part tous en même temps, chacun navigue seul dans sa petite embarcation, chacun suit son chemin en fonction de sa météo intérieure, et on arrive en ordre dispersé.
Sa vision de la maternité était simple : "Vous n'avez pas demandé à vivre, j'ai fait le choix parfaitement égoïste de faire des enfants, alors je ferai tout ce que je pourrai pour que vous soyez heureux, que vous le vouliez ou non." Maman nous avait expulsés de son ventre pour nous voir aussitôt plonger dans l'immense océan de la vie, et toute son énergie passerait désormais à essayer de nous sauver. Bien à l'abri dans son petit canot de sauvetage, elle serait toujours là avec des gilets, cordes et feux de détresse pour ne jamais nous voir couler.