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3.46/5 (sur 82 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Saint-Denis , 1964
Biographie :

Laurence Potte-Bonneville a été successivement élève institutrice, secrétaire dans une entreprise de transports, puis pour un constructeur de décors de théâtre avant de reprendre des études.

Après une maîtrise en information et communication et un diplôme d’école de commerce, elle s’engage professionnellement dans la lutte contre le sida. Nous sommes en 1993 et les trithérapies ne sont pas encore disponibles.

À partir de cette expérience fondatrice, elle ne cessera de travailler dans le monde associatif, au service de personnes précaires ou fragilisées par la maladie, physique ou mentale. L’écriture l’accompagne.

Depuis 2019, elle est directrice générale adjointe d’une fondation intervenant dans le champ du handicap, la Fondation des Amis de l'Atelier.

Laurence Potte-Bonneville a remporté le prix Stanislas 2022 pour son premier roman, "Jean-Luc et Jean-Claude", paru chez Verdier.
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Source : editions-verdier.fr
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Stéphanie Garzanti, Mathieu Lauverjat et Laurence Potte-Bonneville ont en commun d'être tou·tes trois primo-romancier·es. Cette rencontre sera l'occasion d'échanger autour de leurs textes, chacun rendant compte d'une certaine étrangeté. Dans Petite nature de Stéphanie Garzanti, c'est le récit de soi qui est l'objet d'une expérimentation décalée, jouant avec humour des codes de l'autofiction. Avec Client mystère, dont le titre désigne un particulier mandaté par des entreprises pour évaluer leurs employé·es à leur insu, c'est à la langue managériale que s'attaque Mathieu Lauverjat, en auscultant l'ubérisation du monde du travail. Enfin dans Jean-Luc et Jean-Claude de Laurence Potte-Bonneville, nous suivons deux quinquagénaires atteints de troubles mentaux, embarqués dans une escapade aussi inquiète que joyeuse en baie de Somme. Stéphanie Garzanti est artiste et écrivaine. Paru dans la collection « Sorcières » chez Cambourakis, Petite Nature est son premier livre. Mathieu Lauverjat est écrivain et éditeur. Paru chez Scribes, nouveau label des éditions Gallimard, Client mystère est son premier roman. Laurence Potte-Bonneville travaille dans le champ du handicap. Jean-Luc et Jean-Claude, paru chez Verdier, lauréat du prix Stanislas et du prix SGDL Révélation d'automne, est son premier roman. Retrouvez notre dossier "Effractions 2023" sur notre webmagazine Balises : https://balises.bpi.fr/dossier/effractions-2023/ Retrouvez toute la programmation du festival sur le site d'Effractions : https://effractions.bpi.fr/ Suivre la bibliothèque : SITE http://www.bpi.fr/bpi BALISES http://balises.bpi.fr FACEBOOK https://www.facebook.com/bpi.pompidou TWITTER https://twitter.com/bpi_pompidou
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Citations et extraits (7) Ajouter une citation
(Les premières pages du livre)
À quelques mètres au-dessus d’elle, la tempête fait rage. Elle avait préféré replonger pour trouver des eaux plus calmes et cette rencontre fortuite aurait dû la conforter dans son désir de fuir, mais elle interrompt sa course désordonnée pour se maintenir en suspension et accompagner un instant le corps dans sa chute vertigineusement molle.
Elle palme, elle ondule, hésite et s’enroule en spirale autour de cette créature fascinante qu’aucune énergie ne semble plus mouvoir.

C’est trop gros pour être chassé, trop inerte aussi, mais elle identifie la silhouette pour en avoir vu de semblables effectuer à terre des sarabandes bruyantes et compliquées qu’elle observait à distance, toujours. Il faut se garder de leurs enjambées dévastatrices et du vacarme effroyable de leurs hélices.

Elle a beau l’effleurer de ses nageoires, il demeure indéchiffrable. Elle ne comprend pas pourquoi il a renoncé à nager. Il serait si simple de contracter ses muscles et de se remettre en mouvement pour éviter les débris qui crèvent la peau des vagues et risquent à tout moment dans leur chute de les harponner ou de les assommer.
Pour pouvoir plonger, encore et encore, elle a ralenti le rythme de son cœur et il ne bat plus qu’à de longs intervalles, lui rappelant à chaque pulsation qu’elle est seule et qu’elle ignore jusqu’où les autres ont bien pu dériver, et où elle peut bien être.
De s’arrêter ainsi, au milieu du tumulte, ça la calme presque. Le corps poursuit sa lente descente que rien ne semble affecter.
« J’ai faim », lui dit-elle.
Il ne répond pas.
« J’ai peur », lui dit-elle.
Il pivote d’un quart de tour. Autour d’eux câbles arrachés, caisses en morceaux, tôles tordues sombrent en zébrant les profondeurs. Des millions de bulles d’air enveloppent leurs angles tranchants dans une effervescence innocente.
Il lui reste peu de temps. Elle va devoir remonter bientôt pour respirer mais elle ne sait où refaire surface. Elle a nagé si loin du banc. Et en vérité, elle meurt de faim car depuis des heures elle n’a rien pu capturer dans ce chaos liquide.
« J’ai faim », insiste-t-elle. Et elle appuie le bout du museau sur ce torse impassible.
Elle va bientôt manquer d’oxygène. Ça n’a pas l’air de l’émouvoir et sous sa légère poussée, il se contente d’esquisser un vague mouvement de recul. Son ciré ouvert s’évase en corolle derrière ses épaules et sa tête.
Des plis du vêtement émerge un très joli merlan qui s’y était réfugié. Une onde de joie parcourt ses moustaches. D’une brève ondulation, elle atteint le poisson et le saisit dans sa gueule.
Elle voudrait le remercier mais il continue de s’enfoncer, délivré de toute vitalité et toute peur. Les bandes réfléchissantes qui ornent sa veste luisent faiblement tandis que son poids l’entraîne vers le fond sans à-coups ni entraves. Elle suit du regard la disparition progressive de cette étrange bigarrure.

1
« Allez, à lundi, madame Baudier.
— À lundi », fait-elle depuis le portail pendant que l’infirmière ouvre la portière de sa Clio.
L’averse vient de cesser et les gouttes filent leur petit chemin froid le long des losanges du grillage. Ça sent le jardin mouillé. Elle referme le portail en suivant du regard la voiture qui démarre et s’en va, de l’eau de pluie plein la paume.
Il ne fait pas bien chaud, dans les neuf et quelques, mais elle a mis son gros gilet pour profiter un instant du dehors et du frais. Ceux qui travaillent sont au travail, les gamins à l’école, en face pas un chat dans le café, une voiture traverse le bourg par-ci par-là, elle se laisse un peu aller dans le creux de l’après-midi, avant de se remettre à faire « son petit fourbi » comme elle dit au téléphone à sa fille.
C’est bientôt l’heure d’été.
Le passage à l’heure d’hiver lui fiche toujours un coup au moral. Elle et les vaches, plaisante-t-elle, ça ne leur réussit pas ce jour dont on leur tire en douce une heure de sous les pieds dès Toussaint. C’est un grignotement qui la fatigue. Il paraît que c’est la dernière année à cause de l’Europe, elle attend de voir.
Quant à l’arrivée du printemps, elle ne sait plus trop ce que ça lui fait.

Elle ne rentre pas tout de suite, pour faire provision de lumière grisée, se ravigoter l’âme au miroitement des flaques.
Par la vitrine en face, elle aperçoit Jacqueline qui passe un coup de balai, bonjour de la main, et retourne s’activer derrière son comptoir.
Une petite voiture bleu foncé ralentit devant le café, et s’arrête le long du trottoir dans un bourdonnement d’infrabasses. La portière avant éraflée et la démarcation tracée par l’essuie-glace dans la crasse incrustée malgré la pluie récente ne lui échappent pas.
Elle déchiffre l’inscription absconse du bandeau autocollant posé au ras du coffre sur la lunette arrière. Herbalife. J’ai la forme maintenant. Demandez-moi comment. Ma foi oui, je me demande bien comment, pense-t-elle.
Le moteur et le bourdonnement s’interrompent et un jeunot tout blond sort de la voiture, il porte des baskets d’oiseau des îles, et une veste ouverte sur son polo, bien trop légère pour le temps qu’il fait, marquée Adidas en long en large et en travers.
Ça rentre au café en plein milieu de l’après-midi, ça n’a pas l’air de courir après le boulot même si ça a la forme maintenant. Est-ce que ça a vraiment la forme, d’ailleurs ? Les temps sont durs aussi pour les jeunots, et puis on les a trop habitués. À quoi au juste, une incertitude l’effleure, elle ne sait pas trop. À leurs téléphones et à leurs baskets peut-être, ou à manger sans horaires. Comme elle n’a pas eu cette chance, d’être grand-mère, elle ne sait pas trop. Ces cheveux blonds c’est bien joli quand même.
Elle fait demi-tour pour rentrer chez elle. Elle contemple les tiges de ses rosiers emperlées de pluie. Elle a eu la main un peu forte en les taillant. Comment vont-ils s’en sortir cette année ?
Elle se réjouit à la pensée des pélargoniums qui vont refleurir sur la fenêtre de sa cuisine. La corvée ça va être de les remonter de la cave. Elle essuie ses pieds sur la grille, et puis sur le paillasson à l’abri de la marquise.
Tant qu’on peut respirer sur le pas de sa porte c’est qu’on reste libre, pas vrai, autonome c’est ça qui compte. Sentir autour de soi l’air tout embaumé d’eau. Autonome.

2
Il laisse refroidir son café au lait.
On va le savoir que c’est vigilance orange. Ça tourne en boucle au fond de la salle. Rues inondées, voitures à demi immergées. Le gros bordel vers les Avendières et Villers-les-Pots, élus locaux, l’autoroute fermée à hauteur de Genligny. On voit la carte avec les prévisions météo.
Avec les dents, il coupe une petite peau au ras de l’ongle de son index. Il a pu brancher son portable qui recharge. La patronne lui apporte son sandwich au pâté. Derrière lui la porte s’ouvre, elle claironne un « Bonjour messieurs » et retourne derrière son comptoir. Elle va peut-être arrêter de le mater.

Ils sont deux à rentrer, un petit mec engoncé dans une doudoune blanche on ne voit que ça et ses oreilles décollées, qui va s’asseoir au bar pendant que l’autre, un balèze, reste debout. Un ours et un rat entrent dans un bistrot, le début d’une bonne vanne.

Ils auraient le temps de s’installer à une table mais Jean-Claude préfère le comptoir, ça lui rappelle les virées à Abbeville. Il ne s’asseyait jamais.
« Mais c’est vrai qu’on est déjà jeudi ! Qu’est-ce qu’ils prendront aujourd’hui ces messieurs ? » Elle leur sourit. Lui, il se tourne vers l’écran, cale ses coudes sur la table et mord dans son casse-dalle. Il est jeune, il a le ventre vide depuis le petit déj’, il a faim. C’est normal. Et maintenant, on le lâche.

C’est Jean-Luc qui passe la commande, ils font toujours comme ça. Ils décident à l’avance sur le chemin de ce qu’ils vont prendre. Ça dépend du temps qu’il fait et aussi de ce qu’ils ont pris la semaine d’avant. C’est Jean-Luc qui s’en souvient pour eux deux parce que Jean-Claude ne se rappelle pas ce genre de choses. Pour aujourd’hui ils se sont mis d’accord, Jean-Claude avait encore envie d’un coca mais Jean-Luc a proposé de prendre plutôt un Orangina Light à cause des insomnies et du diabète. Christiane a bien répété tout à l’heure « attention au sucre Jean-Claude », mais ça n’était pas la peine, Jean-Luc n’oublie pas ce genre de choses.
« Alors pour lui, un Orangina Light s’il vous plaît, et pour moi un chocolat chaud. »

La doudoune a parlé. Sans bouger et d’une traite. Une gelée de voix nasillarde et qui tremblote. Il n’a absolument rien compris à ce que le mec bafouillait, sauf à la fin cho-co-la-cho, mais faut croire qu’elle, elle a tout capté.
« On vous met la musique ? Si ça dérange pas le jeune homme. Ça vous dérange pas ? »
Le jeune homme c’est lui. C’est à lui qu’elle parle. Il repose son sandwich sur l’assiette en faisant non de la tête. « Non, ça me dérange pas. »
Elle met Radio Nostalgie. Il boit son café au lait. Il finit son sandwich, va pisser.
En sortant des toilettes, il voit Doudoune balancer la tête à droite à gauche en remuant les lèvres, les yeux mi-clos.
J’ai trop saigné – chtoong tom
sur les Gibson – chtoong tom
J’ai trop rôdé – dans les – tobaccoraudes
L’autre est toujours debout, son verre d’Orangina à la main, les yeux rivés à l’écran.

Sa cuillère écume la mousse de lait. Jean-Luc connaît cette chanson presque par cœur.
Bonne ! Bonne ! Bonne !
Sous la mousse, la surface calme du chocolat lui fait penser à des choses puissantes, raccord avec cette musique. Bonnes.
La guitare est rugueuse et sauvage, chtoong tom, et la voix de J.-J Goldman s’épaufre dans les aigus.
Pas mal de feelin’
et de
décibe-els
Le chaud de la boisson se répand sous sa peau. Les lettres bleues sur ses phalanges tambourinent contre le zinc. C’est jeudi.
Jean-Jacques G. et Jean-Luc, on est ensemble, à fond. J’ai pas oublié les paroles de cette musique, bonne, bonne, bonne. Je bois à longs traits le chocolat fumant comme un cheval fourbu. Je suis venu ici pour retrouver mon calme. Demain
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Ils sont là, le chétif et l'inanimé, et la pluie glisse et s’épand sur le vide du grand pré. Ils se tiennent la, abandonnés l'un à l'autre, corps transis sous cet arbre effeuillé.
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Aller voir les phoques, les voir nager, souffler l'eau par leurs narines étranges, les regarder disparaître dans les vagues, s'étonner de leurs longues moustaches et de leurs nageoires comme des pieds, s'imaginer jouer avec eux, parmi eux dans l'écume, on ne se noierait pas, capter leur doux regard indifférent, s'allonger sur les rochers, le long de leurs flancs criblés de sable, et reprendre son souffle, s'ébrouer ensemble. Faire les andouilles, faire les sauvages.
Aller voir les animaux, les rejoindre, être rejoint par eux, en avoir encore un peu peur et intercepter une lumière d'eau dans leurs prunelles, rouler dans les mêmes vagues, on ne se noierait jamais, patauger dans la même boue, ondoyer parmi eux, se couler, frissonner avec eux, partager le harcèlement des mouches, se laisser parcourir par le long tremblement d'un muscle.
Se plonger dans leur odeur si puissante, caresser leurs peaux épaisses et étanches, devenir nage, devenir galop, se fondre parmi les animaux, s'accrocher à leurs flancs, à leurs crinières, ne plus jamais les lâcher et faire corps avec eux, frotter le front contre leurs crins, se couler dans leurs bancs, s'étourdir dans leur flot, les aimer si fort, s'oublier dans leur troupeau et ne plus penser qu'au grondement de leur course, se rouler comme une andouille, comme un sauvage.
Se dissoudre.
(pp.58-59)
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Il a entendu parler de beaucoup de choses qu'il a oublié ou qui se sont envasés tout au fond de lui. Il ne va plus jamais racler par là dessous de peur de troubler les sédiments et de faire remonter dans la spirale veloutée de ses souvenirs, des créatures abominables et griffues. p95
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C’est Jean-Luc qui passe la commande, ils font toujours comme ça. Ils décident à l’avance sur le chemin de ce qu’ils vont prendre. Ça dépend du temps qu’il fait et aussi de ce qu’ils ont pris la semaine d’avant. C’est Jean-Luc qui s’en souvient pour eux deux parce que Jean-Claude ne se rappelle pas ce genre de choses. Pour aujourd’hui ils se sont mis d’accord, Jean-Claude avait encore envie d’un coca mais Jean-Luc a proposé de prendre plutôt un Orangina Light à cause des insomnies et du diabète. Christine a bien répété tout à l’heure « attention au sucre Jean-Claude », mais ça n’était pas la peine, Jean-Luc n’oublie pas ce genre de choses.
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Incipit :
A quelques mètres au-dessus d’elle, la tempête fait rage. Elle avait préféré replonger pour trouver des eaux plus calmes et cette rencontre fortuite aurait dû la conforter dans son désir de fuir, mais elle interrompt sa course désordonnée pour se maintenir en suspension et accompagner un instant le corps dans sa chute vertigineusement molle.
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Ils sont deux à rentrer, un petit mec engoncé dans une doudoune blanche on ne voit que ça et ses oreilles décollées, qui va s’asseoir au bar pendant que l’autre, un balèze, reste debout. Un ours et un rat entrent dans un bistrot, le début d’une bonne vanne.
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