Elsa Flageul vous présente son ouvrage "
A nous regarder, ils s'habitueront" aux éditions Julliard. Rentrée Littéraire janvier 2019.
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Le silence est une bombe à retardement. Un jour, elle vous explose le cœur.
En vérité, je voudrais qu’on nous foute la paix. C’est impossible de penser ça, impossible de le ressentir mais c’est pourtant le cas. Je ne supporte plus les anecdotes qui se veulent rassurantes : untel est né prématuré, il a aujourd’hui dix-huit ans et entre à Sciences Po, unetelle ne pesait qu’un kilo à la naissance et c’est aujourd’hui une grande fillette de dix ans qui fait du handball. Je m’en fous. Ce n’est pas notre histoire. Ce n’est pas César. Ce n’est pas maintenant. Ce n’est pas moi. La Vie n’est qu’une histoire de cas particuliers. Rien ne fait sens. Rien n’est juste. Rien ne se ressemble? Une vie, ça ne se mesure pas. Une vie, ça ne se compare pas. p. 128
César se met à courir dans les couloirs de l'hôpital, indifférent à cet environnement, ignorant quels bonheurs, quels chagrins, quelles angoisses se cachent derrière ces murs, derrière ces portes, ne sachant pas que ses cris de joie, de vie, peuvent être si cruels pour ceux qui vivent alors dans l'effroi que leur enfant ne puisse jamais pousser les mêmes, un jour.
" Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque.
À te regarder, ils s'habitueront. "
René Char
Elle pensait, un peu stupéfaite il faut dire de le découvrir si tard : le combat pour la vie de César est aussi un combat contre la solitude qu'il engendre, la sienne, celle de Vincent, celle qui sépare, celle qui isole.
Alors elle pensait : dans le combat on est si seul.
On ne se prémunit jamais contre le malheur, on a beau faire, imaginer, préparer les mouchoirs, envisager les chutes, quand il vous tombe dessus, il est toujours plus lourd que ce que vous avez jamais pu porter.
La pudeur est la politesse des timides.
Souviens-toi que dans chaque bataille il y a des moments de calme où le silence se fait, où les regards se posent, où les corps se fatiguent, où l'on ne saurait dire si c'est perdu, si c'est gagné, si c'est fini. Les échecs et les victoires ont si souvent le même visage.
Il y a tant d’errances dans une vie, tant de chemins rebroussés, tant de routes abandonnées et d’autres prises presque par hasard, par accident dirait-on mais justement les accidents mes amis, les échappées, les embardées qui font virer de bord et prendre des chemins de traverse qui se révèlent être des routes, il y a tant de moments d’égarement dans une vie qui ne sont pas des faiblesses non mais des respirations, des ponctuations.
Avec le temps, nous avions appris à nous méfier donc de nos embrasement estivaux et attendons patiemment notre retour, étonnées et ébahies tout de même par la puissance du fantasme, cette capacité infinie du cœur et de l'esprit à vous faire croire n'importe quoi.