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Critiques de Chris Offutt (275)
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Les gens des collines



Une femme a été assassinée. Mick Hardin, enquêteur militaire au sein de la CID ( Criminal Investigation Command ), de retour au pays, donne un coup de main officieux à sa soeur shérif prise dans le goulot d'étranglement du sexisme, du manque de moyen et de la pression exercée par le FBI. le point de départ est classique, l'intrigue policière bien menée mais est en elle-même assez légère pour accrocher totalement.



Très rapidement, on sent bien que l'enquête n'est qu'un prétexte pour Chris Offutt à sonder les ténèbres de la terre et de la famille, comme toujours dans son Kentucky natal, rural, dont il connait le paysage de fond en comble, des traditions aux paysages en passant par la faune, la flore et enfin les hommes. Il en capture brillamment les nuances avec un sens du lieu qui respire la sincérité.



Mick se retrouve entrainé dans un réseau d'interactions tissées autour de la femme assassinée dont la mort expose les loyautés et les rivalités d'une communauté rurale profondément enracinée et farouchement privée. C'est le guide parfait tellement il maitrise l'esprit clanique et le laconisme des locaux, il sait gagner leur confiance, ce qui lui permettra de résoudre l'affaire en décelant les serments de sang et les vengeances familiales. Cette authenticité transpire dans chaque page et apporte beaucoup, avec toujours la nature appalachienne comme contrepoint superbe aux tragédies aigues qui s'y déroulent et à la laideur des hommes remplis de préjugés mesquins et de certitudes immuables.



Même si je m'attendais à plus de puissance ( comme celle ressenti lors de la lecture des Nuits appalaches) , je suivrai avec grand plaisir la suite de la trilogie policière initiée avec Les Gens des collines. J'ai aimé son humour pince sans-rire à la Fargo dans le Kentucky, la tendresse bourrue douce-amère qui s'en dégage et l'empathie de l'auteur pour ses personnages. Celui de Mick est très attachant, en quête de réconciliation avec lui-même, oscillant entre stress post-traumatique d'un vétéran de l'Irak ou de l'Afghanistan, gueule de bois et désenchantement intime.

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Les fils de Shifty

Rocksalt, Kentucky. Un corps est découvert abandonné dans un parking, celui d'un trafiquant d'héroïne. La police locale semblant peu diligente à vouloir trouver le coupable, la mère convainc Mick Hardin, membre de la CID ( Division des enquêtes criminelles au sein de l'armée américaine ) qui se remet d'une blessure chez sa sœur shérif du comté, de mener officieusement une enquête afin de découvrir qui a assassiné son fils.



Ceux qui ont aimé Les Gens des collines retrouveront avec grand plaisir Mick, les autres auront plaisir à découvrir un enquêteur affûté et décontracté, à l'ordre moral taillé dans le roc des collines des Appalaches, doté de la capacité à faire parler les plus taiseux, maniant l'autodérision à merveille tout en portant un regard humaniste sur ses semblables. Sa rectitude morale le porte à accorder la priorité à la justice légitime plus que légale, faut pas le chauffer ...



L'enquête en elle-même est extrêmement bien conduite, le meurtre initial révélant tout un réseau d’interactions insoupçonnés qui enclenchent un cycle de violence et de vengeance dont on ne peut deviner jusqu'où il va aller … si ce n'est un final brillant et pétaradant en mode western contemporain. Intrigue efficacement tracée resserrée sur 250 pages à l'écriture discrète mais grandement évocatrice avec la pudeur de son regard et sa lucidité tranchante.



Ce qui distingue ce polar rural noir d'un autre, c'est la maîtrise et l'affection de Chris Offutt pour le décor et les gens qui y vivent. Il sait comme personne dire la beauté des paysages heurtés des Appalaches, tout comme la rudesse et la générosité des autochtones. Les personnages secondaires sont mémorables, à la fois bruts et avisés, de vraies gueules décrites en quelques lignes. Se déploie ainsi une ambiance qui suinte l'authenticité de partout, à commencer par ses dialogues vifs, rapides et drôles.



Et puis il y a la capacité de l'auteur à manier des sensations oxymoriques jusqu'à les faire fusionner : la tendresse côtoie la rudesse, le pessimisme le plus profond quant aux capacités de nuisance des hommes ( cupidité, destruction environnementale, trafic de stupéfiants ) n'empêche pas la lumière de percer. Derrière l'explosion des sentiments primaires, le poids émotionnel qui semblait fort enfoui remonte à la surface dans des ultimes pages étonnamment apaisantes étant donné ce qui a précédé.

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Les fils de Shifty

Rocksalt, Kentucky. En convalescence chez sa sœur Linda après avoir été blessé par une bombe artisanale en Afghanistan, Mick Hardin décide de rendre service à Shifty Kissick, une veuve qui a bien connu son père et qui vient de perdre son fils, retrouvé assassiné sur un parking abandonné. Pour la police locale, Fuckin’ Barney n’est qu’un trafiquant d’héroïne victime d’un règlement de compte entre dealers, bon débarras ! Pour la vieille Shifty, qui connaît très bien le business de son fils, ce meurtre soulève bien plus de questions. C’est pourquoi elle aimerait bien que l’agent spécial de la Division des enquêtes criminelles de l’armée américaine fouine un peu à gauche et à droite avant de reprendre du service au sein de l’armée…



Ce roman étant le deuxième volet d’une trilogie invitant à suivre les pas de Mick Hardin, ceux qui ont déjà lu « Les Gens des collines » retrouveront avec grand plaisir cet agent de la CID venu se remettre de ses blessures dans son bled natal. Les autres n’auront aucun mal à suivre cette enquête indépendante qui les plonge immédiatement dans une région reculée du Kentucky, sur le flanc est des Appalaches.



Si cette enquête qui dévoile progressivement des trafics en tout genre ne manquera pas de tenir le lecteur en haleine, c’est surtout la capacité de Chris Offutt à planter un décor et à brosser des personnages mémorables en seulement quelques phrases qui constitue tout le sel de ce polar rural certes sombre, mais non dénué d’humour.



Il y a tout d’abord ce personnage principal taiseux, efficace et méthodique, prêt à aider son prochain, mais n’hésitant pas à tuer s’il le faut. Un militaire dont la femme s’est finalement barrée avec un autre et qui ne dit pas grand-chose, mais dont les quelques phrases, distillées avec parcimonie, font toujours mouche.



Et que dire des personnages secondaires, qui ne sont pas en reste et qui contribuent également à se faire une idée de la mentalité de ce bled dans lequel l’auteur nous baigne avec grande maestria… De Jacky Turner, le cousin inventeur capable de remettre en état n’importe quel engin, à l’attachant Oncle Merle qui observe les oiseux depuis son porche, en passant par Jaybird et sa prise d’otage insolite, le lecteur ne s’ennuie pas un seul instant.
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Nuits appalaches

Très beau ce roman où se mêlent de nombreuses valeurs : famille, loyauté, honneur, simplicité, avec le cadre naturel des Appalaches dont l'auteur distille au fil des pages des merveilles toutes simples, telles que les étoiles, la préparation des fourmis à l'orage, les oiseaux de nombreuses variétés, les fleurs des champs.



Tucker est le personnage central et il porte à bout de bras ce récit en même temps que sa famille, son épouse, Rhonda, ses enfants dont la plupart souffrent de déficiences physiques mais n'en sont pas pour autant moins aimés par leurs parents. Chris Offutt ne sombre jamais dans la pitié ou le misérabilisme dans son approche de cette vaillante famille qui vit ses joies et ses dures peines avec presque sérénité.



Tucker est un héros de la guerre de Corée, "la guerre de Truman" qui n'était pas la sienne, au cours de laquelle il a renforcé ses aptitudes physiques et son sens de la nature . Il est foncièrement bon et ne veut que le bien des autres tout en restant intransigeant sur la protection des siens.



Tucker aime Rhonda; ils se sont connus jeunes et les épreuves ne les éloignent en aucun cas l'un de l'autre, elles renforcent leur union et leur attachement à leurs enfants.



Tucker n'est pas un voyou et s'il connaît la prison, c'est une sorte de sacrifice suite à un marché conclu avec Beanpole qui le respecte et le craint. La prison ne le transforme pas en bête sauvage ou en justicier. Il est armé et utilise ses armes si nécessité absolue, toujours avec l'idée de protéger les siens.



La fin du roman est grandiose particulièrement dans ses dialogues -- d'ailleurs tous les dialogues sont d'une qualité et d'un réalisme exceptionnels --, elle conclue cette oeuvre avec un naturel qui traite l'essentiel, sans fioritures inutiles.



L'épilogue est également très intéressante puisqu'elle indique le devenir des principaux protagonistes du roman dont l'action s'étend de 1954 à 1971. Et d'ailleurs, ce rythme des différentes périodes ne casse en aucune manière celui de l'histoire de Tucker et de sa famille.



Plusieurs critiques ont comparé Chris Offut à Ron Rash; il est vrai que ce sont deux auteurs très proches mais, dans ces Nuits Appalaches, Chris Offutt m'a paru un cran au-dessus.
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Les gens des collines

Il faudrait peut-être n'avoir pas lu Nuits Appalaches pour apprécier ces gens des collines. En effet, dans le livre précité, Chris Offutt parvenait à réaliser une étude sociologique de populations similaires en l'intégrant dans une oeuvre exaltante où les sentiments étaient exprimés avec bien plus de puissance, avec des personnages phares.



Les Gens des Collines est un titre approprié à ce roman dans lequel Chris parle finalement essentiellement de ces "gens", y glissant une intrigue policière sans intérêt.



Il reste des dialogues savoureux dans l'élaboration desquels le talent de Chris Offut revêt toute sa dimension, des dialogues où les silences pèsent aussi lourd que les paroles et l'auteur sait parfaitement gérer les deux avec efficacité.



Néanmoins, l'ennui m'a vite gagné en lisant les nombreuses répétitions, les atermoiements des protagonistes, ceci en l'absence quasi totale de la nature sauvage .



Alors, trois étoiles pour les dialogues et pour un auteur qui a déjà largement fait ses preuves, qui a écrit beaucoup mieux et qui écrira certainement encore du très bon.
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Nuits appalaches

Ohio, 1954. Après la fin de la guerre de Corée, Tucker, 18 ans, décide de rentrer chez lui, dans son Kentucky natal, à pieds ou en voiture si un homme croisé au hasard s'arrête à sa hauteur. La marche, les paysages, le soleil qui le réchauffe, l'apaisent de ces quelques mois passés loin de chez lui, au cœur de ces combats qui ne l'auront pas épargné. Les terres vertes et ondoyantes du Kentucky l'accueillent enfin. Il bivouaque quelques jours, non loin d'un étang. Un endroit sûr et loin des gens. C'est pourtant là qu'il assiste à une scène effroyable : un homme violent assène des gifles à une jeune fille et tente de la violer. Aussitôt, Tucker intervient. Il blesse l'homme suffisamment pour qu'il ne puisse plus bouger, le dépose mal en point chez lui et s'enfuit à bord de sa voiture, Rhonda installée à ses côtés. Bien qu'encore plus jeune que lui, elle décide de le suivre là où il ira. Après une seule nuit passée ensemble, il lui propose déjà de l'épouser...



Chris Offut arrive, dans un style épuré et sans fioritures, à nous offrir un roman dense qui, pourtant, fait à peine 250 pages. Il dépeint, de 1954 à 1971, la vie de Tucker, sa femme, Rhonda, et leurs enfants. Tandis qu'elle reste à la maison pour s'occuper de ces derniers, dont la vie, pour certains, commence mal, lui a accepté le premier boulot qu'on lui a proposé, à savoir travailler pour Beanpole, un baron local. Malgré des conditions sociales, sanitaires et économiques à déplorer, la famille s'en sort bon gré mal gré, porté par l'amour indéfectible réciproque mais aussi le courage, la loyauté et la force de Tucker. Si les personnages sont malmenés par la vie, si l'ambiance reste sombre et tragique tout au long du roman, il n'en reste pas moins que Chris Offut réussit, de par sa plume descriptive et intense, de par le poids de ses mots et de par la pudeur et l'émotion qui se dégage, à rendre ce roman lumineux et pétri d'une profonde humanité.
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Les gens des collines

Quelle joie de me glisser dans un nouveau Gallmeister : Dès les premiers mots, j'ai adoré l'ambiance et les personnages, aussi rugueux et attachants que la nature locale. Nous sommes dans les collines du Kentucky, où tout le monde connaît l'arbre généalogique de tout le monde depuis la nuit des temps, et où avoir un lien de parenté signifie rendre des comptes : Si tu touches à quelqu'un de la famille, faut t'attendre à de sévères représailles. Alors quand une femme « que tout le monde aimait » est retrouvée morte au petit matin, ce que craint le plus la toute nouvelle shérif n'est pas le blanc-bec du FBI qu'on lui a collé dans les bottes sans raison apparente, mais bien un règlement de compte entre les gens des collines, si elle n'arrête pas assez vite le meurtrier.





Et comme elle vient d'être nommée à ce poste, auquel en tant que femme elle n'est pas encore vraiment respectée, elle demande l'aide de son frère Mick. Enquêteur pour l'armée, il est rôdé aux recherches de meurtriers. Et puis ça le sortira de la cabane de leur papow décédé, où il se noie dans l'alcool depuis qu'il est rentré d'urgence de mission pour être auprès de sa femme… Mais alors au fait, pourquoi n'est-il pas auprès d'elle ?





C'est avec une grande aisance que Chris Offutt nous fait pénétrer les lieux et les mentalités du coin. Pour notre plus grand plaisir, l'enquête se mêle à la vie privée des personnages et principalement celle de Mick. J'ai adoré apprendre ses techniques d'interrogatoire, le voir avancer dans l'enquête, et surtout l'entendre parler avec sa soeur ou avec les habitants taiseux, dont il sait comme personne délier les langues et anticiper les blocages. J'ai souvent souri aux dialogues et aux situations (mention spéciale à la morsure de mule^^). La vie de couple de Mick vient habilement nous distraire de l'enquête quand il le faut, et nous donne une vision plus globale du personnage et de sa vie. le roman est court mais l'ambiance est bien plantée. C'est pourquoi, même si l'histoire en elle-même ne présente rien d'extraordinairement novateur, ni d'extrêmement marquant sur le long terme, j'ai passé un très bon moment avec ces personnages sur l'instant. Lecture de détente parfaite : ni trop profonde qui demanderait trop d'attention, ni trop légère qui n'apporterait rien. Un juste milieu qui permet de se changer les idées en habitant plaisamment notre imaginaire.
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Les gens des collines

Le corps d'une femme a été retrouvé dans les bois par le vieux Tucker. Vêtue d'une robe élégante, dans une position disgracieuse, une chaussure manquante. En s'approchant, le vieil homme reconnaît aussitôt Veronica, surnommée Nonnie. Linda Hardin, la shérif du comté, a besoin, pour résoudre cette enquête, de son frère. En effet, en poste depuis peu, tous ou presque veulent la voir déguerpir. Que ce soit le maire qui veut que la police de Morehead prenne le relais, l'administrateur du comté qui, détestant leur famille, veut refiler l'enquête à la police d'État, ou encore un grand manitou du charbon qui va, d'ailleurs, lui coller un agent spécial du FBI pour l'assister. En somme, avoir une femme shérif ne plaît guère à la gente masculine. Aussi, son frère, Mick, de la division des enquêtes criminelles de l'armée, actuellement en permission, sera-t-il plus à même de recueillir des confidences, d'autant qu'il connaît mieux les collines. Un service qu'il ne peut lui refuser même si l'objet de sa permission n'avait qu'un but : tenter de sauver son mariage avec Peggy...





Mick Hardin, de retour dans son Kentucky natal, va passer les premiers jours dans la cabane de son grand-père. Des jours à boire et tenter d'oublier le naufrage de son mariage. Autant dire que la venue de sa sœur shérif, sollicitant son aide, tombe plutôt à pic. La victime faisant partie de l'une des familles qui habitent depuis longtemps les collines, Mick va tout faire pour empêcher un règlement de comptes, l'honneur des familles étant en jeu. Cette enquête policière qui va l'amener à discuter et sonder les gens des collines n'est, au final, qu'un prétexte à Chris Offutt pour nous faire découvrir son Kentucky natal, aussi bien ses habitants que sa nature. Des gens taiseux, rudes, parfois méfiants, parfois secrets au cœur d'une nature sauvage qui apporte poésie et douceur. Un roman d'ambiance qui prend son temps, faussement simple, et des personnages que l'auteur dépeint avec tendresse et humanité. La relation entre Mick et Linda est attendrissante, empreinte de silence, de pudeur. Et les personnages secondaires apportent sel et humour.



Mick Hardin, un homme que l'on se réjouit de retrouver dans Les fils de Shifty.
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Nuits appalaches

C'était un vrai événement que d'avoir pû voir il y a désormais la dizaine de jours Chris Offutt à quais du polar, car il est considéré à juste titre comme un auteur culte et cela faisait près de vingt ans qu'on n'avait eu de nouvelles de lui en France.



Après deux décennies de silence littéraire, Offut, dont le visage buriné est bien fidèle à ce qu'on imagine de ce genre de romanciers américain, est revenu en cette année 2019 avec Nuits Appalaches.



L'intrigue est simple: on est en 1954, et on suit Tucker, dix-huit ans à peine, qui revient de la guerre de Corée. Il s'est engagé à seize ans, afin de s'éloigner de la pauvreté et la misère de sa famille perdue dans un vallon des monts Appalaches qu'il va prendre de plein fouet à son retour.



Comme pour Ron Rash également présent à Lyon, Chris Offut possède, bien ancré en lui, ce talent incroyable de raconter les histoires de gens dont on ne parle jamais, des sortes d'invisibles, et de les rendre passionnantes et émouvantes



Et comme pour Ron Rash il trouve les mots pour décrire cette Amérique provinciale et archaïque qui semble être à des années lumières des grandes mégalopoles, on se dit que cette amérique rurale telle que nous le décrit Offut se déroule certes dans les années 60, à l'époque des Kennedy et de Martin Luther King , mais risque bien d'être totalement immuable si on la peignait aujourd'hui, soit 50 ans plus tard.



Pour (ra)conter son histoire de souffrance et de résilience, Offutt va à l'à l'épure, condense ce qu'il faut condenser, afin de ne jamais extrapoler sur ses personnages ( la fin est édifiante à ce propos), et son récit ne souffre ainsi d'aucune longueur et langueur, tout va à l'essentiel pour cette histoire de survie dans des rivages hospitaliers.







Nuits appalaches est une histoire âpre, mais dont le souffle poétique est prégnant, qui exhume son lot de violences tant Offut sait parler de ces des écorchés qui n'ont que les poings pour s'exprimer, ces hommes accrochés à leur terre autant qu' à leurs proches, qui restent en marge de la société.



Un roman aussi court qu'intense à dévorer toutes affaires cessantes.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Les fils de Shifty

« Les fils de Shifty » continue de creuser le sillon du roman « appalachien », noir, rural et poisseux, débuté par Chris Offut avec le superbe « Le bon frère ». Une fois n'est pas coutume, ce nouvel opus nous permet de retrouver les protagonistes du roman précédent de l'auteur, « Les gens des collines ». Mick Hardin, enquêteur chevronné de l'armée américaine, après avoir passé des années sur les fronts irakien, afghan et syrien se remet d'une blessure à la jambe, causée par l'explosion d'une bombe artisanale, chez sa soeur Linda, shérif de Rocksalt, dans le Kentucky, sur le flanc est des Appalaches.



La cohabitation entre notre héros désenchanté qui n'a toujours pas signé les papiers d'un divorce pourtant inéluctable et passe ses journées dans le brouillard ouaté que lui procure une consommation exagérée d'opioïdes et sa soeur qui a lancé sa campagne de réélection au poste de shérif, n'est pas des plus aisées. La découverte du cadavre de « Fuckin' Barney », dealer local et fils de Shifty Kissick, une veuve que Mick connaît depuis son enfance, va sortir l'enquêteur en permission de sa torpeur. Tandis que la police renâcle à approfondir ses investigations sur un meurtre qui a tous les atours d'un règlement de comptes entre dealers, Shifty fait appel à Mick pour découvrir la vérité.



Notre héros aussi attachant que taiseux, saisit très vite que le corps du défunt a été déplacé post-mortem et que le meurtre de Barney est une mise en scène qui cache une vérité que la police a cessé de rechercher. Son enquête va prendre un tour très sombre lorsqu'un deuxième fils de Shifty, le paisible Mason, est abattu à son tour. Que dissimule la tragédie qui s'abat sur les fils de Shifty ? C'est ce mystère que va devoir affronter l'enfant des Appalaches, une communauté dont les codes moraux sont encore régis par la loi du Talion.



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Chris Offut prend le temps de poser le décor du drame qui se noue dans une petite bourgade du Kentucky. Mick est un homme de peu de mots qui peine à retrouver ses repères dès lors qu'il revient à la vie civile, que tout sépare de sa soeur Linda, shérif extravertie au langage de charretier.



Après un début moderato, les meurtres tragiques de deux des fils de Shifty vont déchaîner un vortex de violences terrifiant. Si « Les fils de Shifty » suit les codes du roman noir, sa force de percussion tient à l'écrin sauvage et hors du temps dans lequel l'auteur situe son intrigue : les Appalaches, ces montagnes austères dont les habitants continuent d'obéir aux injonctions du Dieu vengeur de l'Ancien Testament.



En retrouvant sa terre natale, Mick Hardin retrouve l'âme de l'enfant qu'il fut jadis, se déplace aussi silencieusement qu'un Indien, reconnaît chaque fleur et chaque animal sauvage d'une montagne encore préservée. Élevé au contact de la nature par son « Papaw », il est capable d'une douceur infinie lorsqu'il recueille un chardonneret sonné dans le creux sa main et le ranime en soufflant dans son bec. Semblant parfois étranger au monde qui l'entoure, Mick reste pourtant un soldat froid et méthodique, doté d'une étonnante aptitude à la violence.



« Tu ne jetteras aucun regard de pitié, oeil pour oeil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied. » Deutéronome 19:21.



Au fur et à mesure qu'il progresse dans une enquête beaucoup plus sanglante que ne l'annonçait le « simple » meurtre d'un dealer, Mick va s'enfoncer au coeur des ténèbres et affronter un dilemme moral sans retour. Il devra dénouer le noeud gordien du roman en décidant s'il est cet enquêteur militaire, certes en permission, qui a délaissé sa femme pour guerroyer sur tous les fronts, ou s'il est resté un enfant des Appalaches, ce lieu sur lequel le temps n'a pas de prise, habités par des hommes durs au mal, pour qui les préceptes bibliques ne sont pas de vains mots.



« Ils avaient pris l'épée. Maintenant ils gisaient dans leur sang. Un jour ce serait pareil pour Mick. »





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Nuits appalaches

Qu'évoque pour vous le mot Kentucky ? Un trou de bouseux qui vivent au milieu de nulle part en distillant illégalement du bourbon probablement.



1954. Tucker revient dans sa région natale après avoir passé deux ans en Corée. Il a 18 ans, évite les grands axes routiers, marche dans les forêts, fait de l'auto-stop. Pas le type particulièrement intelligent, pas une brute non plus portée sur la bouteille. Il sait manier un couteau et une arme à feu. Durant son périple, Tucker rencontre Rhonda, guère plus jeune que lui. Ils fondent une famille. Pour nourrir femme et enfants, Tucker accepte de travailler pour le bootlegger local. Mais comment réagir lorsque tout part en vrille et que l'on respecte un code d'honneur ?



Malgré les apparences, Chris Offutt nous parle essentiellement d'amour dans ce court roman noir. Amour du travail bien fait, amour de Tucker pour Rhonda et pour ses enfants à qui il ne peut offrir qu'une vie de misère. Jamais l'auteur ne sombre dans la pleurnicherie ou le misérabilisme. Il n'y a pas de gentils. Pas de méchants. Uniquement des gens simples qui essaient de survivre.

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Nuits appalaches

Tout juste sorti du dernier Ron Rash, je reste dans les Nuits Appalaches avec Chris Offutt, toujours traduit par Anatole Pons. Un court roman noir, simple, aux personnages attachants.



À commencer par Tucker, jeune gars du Kentucky de retour de la guerre de Corée où les forces spéciales ont fait de lui une machine à exécuter, les ordres et l’ennemi. Au contact de sa terre retrouvée, il s’apaise peu à peu, se range et tente de faire subsister les siens en jouant les passeurs de gnôle pour un baron local afin de glaner quelques billets. Il s’apaise encore plus grâce à Rhonda, sa femme, battante, aimante, au corps protecteur et rédempteur, qui lui a offert cinq enfants.



Mais les faibles conditions sociales et sanitaires locales ont fragilisé la vie et l’avenir de ces enfants et pour les protéger, Tucker va à nouveau accepter de se mettre en danger, replongeant dans ce monde binaire du bien et du mal d’autrefois. Avec des conséquences qui s’avèreront plus dramatiques que prévu…



Dans Nuits Appalaches, j’ai retrouvé tout ce qui m’avait emballé dans Le bon frère : des gens simples mais droits, portés par leurs valeurs liées à la terre, à la famille et à l’honneur, bousculés par la vie et l’injustice, confrontés à la vengeance mais toujours animés par un souci d’humanité permanent.



J’ai surtout été emporté par l’amour qui émane de cette famille et qui se dégage à chaque page de l’écriture d’Offutt, avec notamment de formidables et émouvantes pages de dialogues entre Tucker et ses enfants, Big Billy, Jo ou Shiny. Sans oublier l’amour de la nature, omniprésente et magnifiée… Une nature qui soigne également, quand assis nu la nuit sur une pierre dressée dans la montagne, elle devient pour Tucker apaisante et rédemptrice.



Précipitez-vous dans ces nuits du Kentucky : attachement garanti !
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Les gens des collines

« Les gens des collines » est le nouveau roman de Chris Offut, auteur notamment des très beaux romans appalachiens « Nuits Appalaches » et « Le bon frère », adoubé par ses illustres aînés, aujourd'hui disparus, Jim Harrison, James Salter et Larry Brown.



Le héros de ce nouvel opus, Mick Hardin, revient en permission dans ses collines natales du Kentucky, sur le flanc Est des Appalaches, et y constate la fin de son mariage. Le choc est rude pour cet enquêteur chevronné de l'armée américaine, qui a passé de longues années sur les fronts irakiens, afghans et syriens. Sa soeur Linda, récemment nommée shérif du comté, va interrompre l'interminable cuite au bourbon que Mick semble avoir décidé de s'infliger.



Le cadavre d'une veuve quadragénaire vient d'être découvert dans les bois, et Linda craint que les gens des collines ne décident de rendre la justice par eux-mêmes. Un édile local, magnat du charbon, a en outre commencé à exercer une pression insidieuse sur l'enquête qu'elle mène en compagnie d'un adjoint brut de décoffrage. Les talents d'enquêteur et l'expérience de l'enfant prodigue pourraient lui permettre de découvrir la vérité et d'éviter un terrible déferlement de violence sur les collines.



Mick va accepter d'aider sa soeur, et mener sa propre enquête informelle, tout en tentant de reprendre contact avec son épouse. Il va pour cela dépasser le temps imparti de sa permission et cesser de répondre à ses supérieurs qui tentent en vain de le contacter. Même si l'enfant du pays en a vu d'autres, il va devoir faire face à une faune locale aussi peu amène que taiseuse, tout en affrontant les déboires liés à la fin de son mariage.



« Les gens des collines » est un roman noir, à la structure narrative classique, dont le héros tenace et désenchanté rappelle ses illustres prédécesseurs, Philip Marlow et Lew Archer, les enquêteurs fétiches respectifs de Raymond Chandler et John Ross MacDonald. La forme de compassion dont Mick Hardin fait preuve à l'égard des gens des collines évoque le regard lucide mais jamais indifférent que porte Lew Archer sur la faune de la Cité des Anges des années cinquante.



Toute l'originalité du roman tient évidemment à son environnement appalachien, cher à David Joy, à la beauté sauvage d'une nature encore préservée, à ces gens de peu qui n'ouvrent jamais leur porte sans avoir sorti leur fusil, et semblent tout droit sortis du dix-neuvième siècle. Le cadre à la fois enchanteur et désespérant de l'intrigue, permet à son auteur de créer une ambiance atemporelle, dans une bourgade qui ressemble à une immense famille dysfonctionnelle de cousins éloignés, qui se connaissent depuis des décennies, pour le meilleur et pour le pire.



« - Partout ailleurs, les gens vivent un peu plus longtemps chaque année. Nous, nos vies raccourcissent. Ça arrive nulle part ailleurs dans le pays. Il y a vingt ans de ça, l'espérance de vie était plus élevée ici.

- Les collines nous tuent à petit feu. »



Les gens des collines sont au fond le véritable sujet du roman, des gens qui parlent peu mais jamais pour ne rien dire, qui n'obéissent qu'à leur propre code, et ont un rapport à la violence que nous avons depuis longtemps oublié. En situant son roman dans sa région natale, Chris Offut nous offre tout à la fois un voyage dans l'Est des Appalaches et un voyage dans le temps, et nous transporte dans une époque que l'on pensait révolue, l'époque de ces hommes durs à la tâche, qui ont construit un monde qui continue sa route sans eux.
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Sortis des bois

Classique. Le pick-up, la poussière et le juke-box illuminé. Ambiance country, ambiance Kentucky. Qui y est né y reste, telle serait la devise de l'état. Loin de toute civilisation, presque perdu au milieu d'un désert de poussière, des néons illuminent le bout de la route, rectiligne depuis des kilomètres de vide. Mais à des kilomètres du mythe, j'entends cette musique, je perçois cette odeur de T-Bone au grill, je vois même des volutes de fumées de cigarettes comme dans le temps on voyait le crépitement d'un feu de camp d'un camp sioux ou apache. Le Pig's Eye. Ça réchauffe un peu de mon âme gelé.



Les portes du saloon s'ouvrent, des cris et des rires, de la sueur et des bonnets D. Je vois une dame, seule au comptoir, crinière brune longues jambes, elle parle à sa bière. Je m'assois à deux tabourets d'elle, je ne veux pas m'imposer. On me sert une bière, je la siffle, la bière. Pas la femme, ni la serveuse. De toute façon, je sais pas siffler. Je ne dis rien, je bois juste le regard porté sur la vie de cette Amérique profonde. Elle ouvre la conversation, à ma grande surprise, à son grand sourire. 

- C'est où, chez vous ?

- Kentucky.

- Quelle partie ?

- Celle que les gens quittent. 

Voilà, tout est dit. Le Kentucky, il faut y être né pour y rester.

On se quitte sur un sourire, avant des larmes. Je remonte dans le pick-up, chevaucher la poussière de la nuit sur mon destrier rouillé.



Direction nulle part.

A la recherche d'un nouveau bar.

Une lumière tamisée,

je commande un whiskey.

La serveuse, une rouquine qui aurait pu être carmélite si elle ne portait pas aussi bien sa chemise à carreaux trop serrée et sa jupe en cuir si bien moulée.

Des clients anonymes, santiags aux pieds, stetson vissé.

 

Là, dans la pénombre, je vois des gens simples qui triment la journée sous le soleil rouge et qui se divertissent la nuit sous la lune bleue. En les observant, on pourrait écrire plusieurs recueils de nouvelles, rien qu'en évoquant leur vie et la poussière qui tourne autour. De jobs précaires en bouteilles vides, les histoires du Kentucky. De la violence, un peu de rudesse et beaucoup de solitude autour de ces âmes. 

 

Je prends une nouvelle fois la route, dans l'obscurité de mes phares fatigués. L'errance dans la poussière, dans la nuit, divagation nocturne, l'auto-radio qui crachote faiblement un Billy Ray Cirus. J'arrive au motel, là encore un coin perdu au bord d'une route, il reste une chambre. Je file direct au bar, commande un bourbon & branch. Et là, je la vois ; elle a les yeux fermés mais un sourire bandant, il est temps que je vous laisse...
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Les gens des collines

Mick Hardin.enquêteur dans l'armée. revient dans son Kentucky natal et rural .Sa femme lui apprend qu'elle est enceinte d'un autre homme. Sa sœur Linda shérif du comté lui demande une aide officieuse pour résoudre une affaire de meurtre sur une jeune femme. L'intrigue va servir de fil conducteur à l'auteur pour nous parler de la nature qu'il affectionne ainsi que la faune et parler de ces gens des collines . Ces collines sont habitées par les mêmes familles depuis plusieurs générations, tout le monde se connaît , les nouveaux venus ne sont pas intégrés . Ces habitants ont un esprit clanique et ont tendance à faire justice eux-mêmes en laissant la police en dehors de leurs histoires. Mick et sa sœur vont avoir fort à faire pour trouver le coupable.

j'ai trouvé ce roman en demi teinte,plus nostalgique que les nuits Appalaches que j'avais beaucoup aimé, même si j'ai bien apprécié ce nouvel opus je le trouve en dessous
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Nuits appalaches

Tucker, 18 ans, revient de la guerre de Corée. Sur son chemin il sauve une jeune fille des griffes de son oncle et l’épouse. Nous les retrouvons 10 ans plus tard avec cinq enfants. Galère, précarité, débrouille, combativité, courage, loyauté. C’est l’amour des siens et de toutes ses petites choses autour d’eux qui fera qu’ils ne baisseront jamais les bras. Magnifique couverture des éditions Gallmeister. Merci à Wyoming qui, avec les premières lignes de sa critique m’a donné envie de le lire.
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Nuits appalaches

Le jeune Tucker,ayant combattu en Corée, rentre dans son Kentucky natal.

Méfiant, taiseux, c'est à pieds qu'il effectue la plus grande partie du trajet, traversant les Appalaches au milieu de cette nature sauvage qui lui a toujours servi de refuge.

Sur sa route, il rencontre Rhonda qu'il sauve des griffes d'un oncle incestueux et qu'il emmène avec lui.

Ensemble, ils vont vivre loin de tout, dans les collines et fonder un foyer.

Cinq enfants naîtront de leur union dont, hélas, trois avec un handicap.

L'administration tentant de les leur retirer, le taiseux Tucker se met en position d'attaque car sous le corps de l'âpre combattant bat le coeur d'un père tendre et d'un mari attentionné, soucieux de préserver l'unité familiale.

Ayant conclu un marché avec le trafiquant qui l'emploie, il se résoud à passer 6 années en prison en échange de la protection des siens et d'une grosse somme d'argent à sa libération.

Mais les choses ne tourneront pas nécessairement comme prévu...



Avec ce roman, Chris Offutt nous entraîne dans l'Amérique rurale, loin des grandes métropoles, au fin fond de ce Kentucky sauvage où les hommes, bien que vivant dans la précarité, sont accrochés à leur terre autant qu'à leur famille et se servent de leurs poings pour défendre leur bien.

Une vie aux aguets, toujours à l'affût du moindre danger.

Un récit dans lequel, en fin de compte, il n'y a ni gentils ni méchants, où les meurtres commis le sont par nécessité, par instinct de protection.

Il y a un contraste très fort entre la violence des situations et la tendresse, tellement touchante d'un père envers ses enfants.

Les quelques moments d'intimité de Tucker avec son fils hydrocéphale sont d'autant plus émouvants que l'on sait le caractère renfermé du personnage.



Dans la même veine que Ron Rash, Chris Offutt nous offre des romans à la fois rudes et lumineux, dans lesquels les hommes font corps avec la nature sauvage de leur environnement.

Une nature qui façonne leur caractère aussi finement qu'une lame acérée.

Le style lui-même est tranché, direct, sans fioriture mais il excelle, Dieu sait comment, à rendre l'atmosphère palpable, vibrante.

Malgré quelques maladresses de traduction qui rendent certaines phrases un peu bancales, la lecture est agréable.



La littérature américaine attise de plus en plus ma curiosité et les quelques livres lus jusqu'à présent m'ont conquises.

Je mets un léger bémol sur celui-ci car il n'est pas parvenu à me transporter autant que les précédents, Ron Rash ou Philipp Lewis, mais cela reste un très beau moment de lecture.



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Nuits appalaches

A la fin de la guerre de Corée, Tucky , jeune vétéran, rentre chez lui dans le Kentucky, il rencontrera Rhonda , 15 ans, d'une drôle de façon, et ils tomberont amoureux . Cinq enfants suivront, dont certains souffrant d'un lourd handicap et les services sociaux s'en mêleront. Tucker fera ce qu'il faut, (après tout le Kentucky à côté de la guerre, c'est de la gnognote!) , il travaillera pour le baron local, les propositions d'embauches dans le coin étant réduites à néant.



C'est un roman qui oscille entre violence et nature writing, Tucker connaissant les deux sur le bout des doigts.



Certains passages , notamment ceux sur les services sociaux en 1954 font frémir : comment pouvait-on "disposer" des enfants sans l'accord des parents, sans leur expliquer, sans leur faire visiter les structures d'accueil pour enfants ? Mais la façon dont Tucker et sa femme "géraient" ces handicaps, même s'ils étaient remplis d'amour pour leurs petits, fait frémir aussi, tant leur ignorance en matière d'éveil est colossale. C'est ce qui m'a le plus marqué dans ce roman. Ça et la nature (désormais , je sais comment trouver des morilles !).



C'est un roman noir, très sombre car la vie de ces gens était vraiment très dure et la violence fait partie, depuis la guerre, de la vie de Tucker qui se bat comme un lion pour sa famille, quitte à faire " le vide "autour de lui... Il m'a fait penser à un animal, très intuitif, connaissant son environnement, son biotope, parfaitement, aimant avec ses tripes, et ne faisant pas de quartier, à ses ennemis, sans aucun état d'âme . Ni remord , ni regrets, ce qui doit être fait , doit être fait. Tucker n'attaque jamais, Tucker se défend , c'est tout. Mais sa façon de voir la vie n'est pas celle de la loi ou de la bonne société. Il n'empêche que le lecteur est de son côté car c'est un "gentil".



Trois périodes pour raconter une vie, celle de Tucker, sa famille et es autres : 1954, puis 1964, et puis un épilogue à la fin très surprenant, comme si l'auteur faisait retomber la pression en nous donnant des nouvelles , des années après de tous ceux que l'on a croisé dans ses pages.

Surprenant et très prévenant ..



La nature est partout; elle nourrit la famille de Tucker, elle soigne, elle rassénére, elle renseigne sur la présence actuelle ou passée, d'un ennemi, Il y a de jolis noms de végétaux qui comme je ne les connais pas , ont résonné de façon rès poétique, rythmant cette histoire.





Un roman très original , "très Gallmeister."..

♫ Noir c'est noir ♫ (et vert aussi ..)
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Nuits appalaches

En 1954, Tucker est de retour dans son Kentucky natal, à la fin de la guerre de Corée. Il n'a que 18 ans, il rencontre Rhonda qu 'il sauve des griffes de son oncle incestueux. Ils s' enfuient ensemble et se marient. Tucker trouve un job auprès d'un bootlegger local.

Le couple vit chichement dans une maison en bois, ils auront cinq enfants dont trois anormaux. Quand les services sociaux débarquent et décident de leur enlever les enfants malades pour manque de soins Tucker voit rouge. Il va entrer en guerre contre eux, pour sauver sa famille. Tucker est un époux fidèle et un père aimant, mais il peut devenir violent pour défendre sa famille c'est le côté sombre de sa personnalité.

Chris Offutt, dans un roman court, au style efficace, sans fioritures, habitué à écrire des scénarios, nous dresse le portrait de ces petits blancs déshérités, en marge de la société, sans culture, isolés, vivant dans la nature où les femmes n'ont même pas de médecin pour accoucher.

C'est un roman noir, dur, âpre, où la vie ne fait pas de cadeaux, où on sort souvent son arme pour défendre ses droits.

J’ai apprécié le personnage de Tucker, un homme droit, porté par ses valeurs et son amour pour sa famille, malchanceux, abîmé par la vie, prêt à tout pour défendre les siens
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Les fils de Shifty

Ce qui est bien avec Chris Offutt, c’est qu’il n’est jamais décevant.



Aussi à l’aise dans le roman noir que dans les nouvelles (où il excelle), il réussit avec Les Fils de Shifty – traduit par Anatole Pons-Reumaux – l’exercice casse-gueule de donner une suite à l’excellent Les Gens des Collines, encore plus réussie que le premier opus.



On y retrouve Mick Hardin, flic de l’armée, de retour dans son Comté d’Eldridge pour quelques jours de convalescence auprès de sa sœur Linda, shérif atypique du coin en campagne pour sa réélection.



Une convalescence qui va s’avérer plus active que prévu lorsque le corps de Fuckin’ Barney Kissick est retrouvé assassiné et que Shifty, sa mère qui règne en marâtre sur le clan Kissick va charger Mick d’enquêter sur cette vengeance venue des collines.



Bien plus qu’un pageturner efficace, Les Fils de Shifty est une nouvelle déclaration d’amour d’Offutt à son Kentucky natal, où la parfaite maîtrise du fil de l’intrigue se renforce d’une approche quasi-naturaliste du territoire et de ses habitants.



En laissant Mick enquêter et errer dans les collines, Offutt fait la part belle aux paysages grandioses, à cette flore qui y survit malgré la rudesse des conditions, et à ces espèces animales qui les peuplent. Mais c’est avec les femmes et les hommes qu’il excelle, portraitiste appliqué de ses pairs.



En âme perdue et déracinée, Mick s’épaissit encore et ses tourments deviennent empathie. Un homme en équilibre entre attachement à sa terre et inaptitude à y vivre trop longtemps : « Il avait fait exactement ce qu’il s’était efforcé toute sa vie d’éviter : tuer par vengeance. Il avait beau essayer de s’en éloigner, il était lié aux collines. »



Et puis, il y a les femmes : Linda, shérif par défaut plus que par ambition, plébiscitée contre son gré ; et Shifty, incroyable personnage, fière et dure pour mieux masquer la souffrance des fils enlevés trop tôt.



Et enfin les personnages les plus touchants, qui traversent le livre le temps de quelques pages : l’hilarant Jaybird qui se prend en otage tout seul ou l’attachant Oncle Merle, qui écoute et parle aux oiseaux.



C’est noir, rural, parfaitement écrit et aurait bien mérité une centaine de pages de plus. Et si c’est le début d’une série récurrente, je mets tout de suite une option sur le prochain !

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