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3.73/5 (sur 75 notes)

Nationalité : Italie
Biographie :

Chiara Montani est écrivain, artiste, designer et art-thérapeute.
Elle a écrit des poèmes et des nouvelles, dont certains ont remporté des concours, de nombreux articles en tant que rédacteur et deux romans. Les deux racontent des histoires qui parlent le langage de l'art, celui qu'elle connaît le mieux.

Source : Chiaramontani
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Rome, 20 juillet 1458 
Indifférent, très haut, le soleil de midi cristallisait la lumière en une permanence irréelle aux ombres rares. Le temps était comme prisonnier de cet éclairage solennel et limpide qui suspendait toute forme de vie dans une éternité immobile, habitée non plus par des êtres humains, mais par des sculptures géométriques d’une perfection abstraite, idéale. 
Piero eut un hochement de satisfaction. Voilà exactement l’effet qu’il avait recherché. Depuis des semaines il rajoutait glacis sur glacis pour faire vibrer les variétés de lumière, et rendre toujours plus évanescentes des ombres qui transparaissaient à peine, avec leurs fines nuances de terre verte. Il était sur la bonne voie, même s’il y avait encore de l’ouvrage. Il sentait que le cardinal Bessarione avait quelque peine à dissimuler son impatience, mais il savait aussi que le prélat n’oserait jamais le presser. Aucun des deux n’ignorait que l’importance de ce tableau allait très au-delà de ce qu’il était censé figurer. Cependant Piero ne laissait jamais sortir de ses mains une œuvre qui ne fût parfaite. 
Bessarione était à Rome où il attendait la suite des événements. Un mal soudain avait frappé le pape, et le consumait rapidement. Le nouveau conclave allait peut-être s’ouvrir bientôt. 
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Il était clair que nous touchions à l’âme de la Ville Éternelle, un lieu où même la misère et l’abandon ne pouvaient rien contre la dignité sublime des vestiges. Le passé avait partout laissé des traces ignorées, méprisées, mais dont la beauté décadente semblait défier l’oubli, en un contraste encore plus puissant.
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La concinnitas de Battista doit beaucoup à Cicéron, en effet. Mais elle ne s’applique pas aux mots. C’est de théorie artistique qu’il est question, du sens de la vue. Il s’agit d’une harmonie entre les parties. Elle opère au niveau de l’intuition et nulle part ailleurs, en résonnant dans l’âme comme un sens de la perfection. Face à une œuvre aux détails tronqués, ou superflus, ou encore imparfaits, chacun voit immédiatement que quelque chose ne va pas, quand bien même il ne saurait dire pourquoi. À l’inverse, quand l’artiste a la certitude d’avoir atteint une harmonie particulière, il sait qu’il ne doit pas aller plus loin car, en modifiant ne serait-ce qu’un léger détail, il risquerait de ruiner son œuvre…
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Rome, 20 juillet 1458

Indifférent, très haut, le soleil de midi cristallisait la lumière en une permanence irréelle aux ombres rares. Le temps était comme prisonnier de cet éclairage solennel et limpide qui suspendait toute forme de vie dans une éternité immobile, habitée non plus par des êtres humains, mais par des sculptures géométriques d’une perfection abstraite, idéale.
Piero eut un hochement de satisfaction. Voilà exactement l’effet qu’il avait recherché. Depuis des semaines il rajoutait glacis sur glacis pour faire vibrer les variétés de lumière, et rendre toujours plus évanescentes des ombres qui transparaissaient à peine, avec leurs fines nuances de terre verte. Il était sur la bonne voie, même s’il y avait encore de l’ouvrage. Il sentait que le cardinal Bessarione avait quelque peine à dissimuler son impatience, mais il savait aussi que le prélat n’oserait jamais le presser. Aucun des deux n’ignorait que l’importance de ce tableau allait très au-delà de ce qu’il était censé figurer. Cependant, Piero ne laissait jamais sortir de ses mains une œuvre qui ne fût parfaite.
Bessarione était à Rome où il attendait la suite des événements. Un mal soudain avait frappé le pape, et le consumait rapidement. Le nouveau conclave allait peut-être s’ouvrir bientôt. Raison pour laquelle le cardinal avait appelé Piero à ses côtés, et comptait sur lui pour mener à son terme la mission à ses yeux la plus importante. Conscient de la responsabilité dont il se trouvait investi, l’artiste s’était immédiatement enfermé dans la grande salle donnant sur la terrasse ; en dépit d’une chaleur étouffante, il y travaillait jour et nuit, avec l’aide d’un assistant pour la préparation des couleurs.
Poussant ses regards au-delà des quatre arcs en plein cintre, il vit qu’un coup de vent secouait les hautes frondaisons d’un Pinus pinea. Il s’essuya le front et posa son pinceau. Il avait besoin d’une courte pause. Mais il fut accueilli dehors par la gifle brûlante du sirocco. Il n’y avait aucune échappatoire à l’enfer de cet été torride qui martyrisait l’Urbs, et qui avait réduit le Tibre à un simple ruisseau. Voilà deux ou trois jours, Piero était tombé le long des berges sur des carcasses d’animaux, et l’on aurait dit que leur odeur lui parvenait encore à plus d’un mille de distance. Si la sécheresse venait à se prolonger, on pourrait craindre une épidémie. Mais personne ne semblait encore s’en soucier. Dans la ville paralysée par l’attente, tous les yeux se fixaient sur le Vatican.

(INCIPIT)
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Ces souffrances passeront comme les autres, Antonio. Tout comme se dissipe le bonheur lui-même. C’est dans la nature des choses… Le sort condamne et parfois console.
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Santa Maria Maggiore dominait une campagne vallonnée où soufflait un vent léger porteur de parfums d’herbes sèches, de fleurs et de déchets aux relents saumâtres. Nous avions quitté le centre pour traverser tantôt des collines incultes, tantôt des vignes et des vergers où paissaient chèvres et moutons. Comme je m’étonnais qu’une cité pût renfermer de si vastes zones à l’abandon, Aram indiqua les fragments d’arches et de colonnes visibles partout dans les prés.
— Le secteur devait être habité, fit-il observer, quand on a construit les murs de la ville.
Autrement dit, quand Rome était une capitale immense, grandiose, avant que ses populations soient décimées par les invasions, les guerres et les famines qui avaient succédé à la chute de l’empire d’Occident. Le précepteur qui m’avait enseigné l’histoire évoquait aussi cette période au cours de laquelle les papes étaient partis s’établir en Avignon, et la décadence qui s’était abattue sur Rome dans le sillage des conflits provoqués par le schisme. Mais ce que j’avais sous les yeux, je n’aurais pu l’imaginer.
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Un jour, voyant que j’étais prête, Francesco m’avait initiée aussi à l’univers infini des pigments. J’avais découvert que chacun d’eux, à l’instar d’un être vivant, avait son caractère propre, et exigeait donc un traitement particulier quand il s’agissait de le broyer ou de le mélanger avec des huiles, des vernis, de l’eau ou du jaune d’œuf, pour qu’il donne le meilleur de lui-même.
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Cela venait peut-être simplement des nuages.
Des ombres tenaces, grises et violacées, décoloraient les murs nus du palais della Valle, formes moroses qui attiraient de mauvaises pensées.
Telle était sans doute la cause de cette vague appréhension que Piero avait brusquement senti s’insinuer en lui, une sorte d’obscur malaise auquel il était incapable de donner une origine plausible, comme il arrive parfois quand revient l’écho d’un mauvais rêve oublié.
Et puis il y avait l’odeur. Il l’avait perçue dès qu’il était entré, en dépit des parfums de résine et d’épices qui régnaient dans la pièce. Une âcre senteur, effet probable d’un nettoyage des sols effectué avec zèle. Si légère qu’elle fût, elle avait immédiatement sollicité un odorat qu’il avait sensible, et déclenché en lui une crainte inexplicable qui l’avait poussé à gagner la fenêtre.
Il était rare que ses sensations lui demeurent incompréhensibles, et il en fut troublé. Il se tint face à la loggia donnant sur la cour où un vieux puits fermé, désaffecté, projetait sur le mur d’enceinte une ombre pareille à un voile gris tirant sur le violet, avec une pointe verdâtre.
Pour exorciser ce sentiment désagréable, Piero caressa l’idée d’un voyage désormais imminent. Il avait dû le reporter plusieurs fois, mais le chantier du Vatican était maintenant bien avancé et les dessins pour Santa Maria Maggiore étaient presque prêts, de sorte qu’il n’aurait voulu pour rien au monde renoncer à cette pause longtemps attendue.
Piero entendit qu’on l’appelait, et se retourna.
— S’aventurer dans les pensées d’un artiste, c’est faire quelquefois un voyage sans retour.

(INCIPIT)
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En 1439, un concile s'est tenu à Ferrare. Il s'agissait de réunifier l'Eglise latine et l'orthodoxe, après un schisme de plusieurs siècles. Mais l'épidémie de peste s'est déclarée et les religieux ont dû se transporter à Florence. L'Église d'Orient, au milieu de mille polémiques, avait accepté beaucoup de compromis pour que soient enfin dépassées les différences liturgiques, apaisées les vieilles blessures. Elle espérait ainsi obtenir de l'aide, face à la menace turque toujours plus pressante. Les délégations de l'empereur Jean VIII Paléologue, et de Joseph II, le patriarche de Constantinople, sont entrées dans la ville avec des centaines de sages, de savants et de théologiens. Les disputes des théologiens ne m'intéressaient pas. Les couleurs, en revanche, me fascinaient, ainsi que la forme des vêtements. Sans parler de l'ambiance exotique, de l'excitation qui parcourait les rues. Ce fut mon premier contact avec l'Orient.
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Quand tu sera convaincu qu'à toi il n'est rien d'impossible, juge-toi immortel et capable de tout comprendre : tout art, toute science, la nature intime de tout être vivant. Pymandre à Hermès (80)
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