Contre Malherbe :
J’aime Du Bartas et Ronsard ;
Toute censure m’est suspecte,
Quelque raison que l’on m’objecte,
De celui qui fait bande à part.
C’est fort bien d’enrichir son art,
Pourvu que trop on ne l’affecte ;
Mais d’en dresser nouvelle secte,
Notre siècle est venu trop tard.
Ô censeurs des mots et des rimes,
Souvent vos ponces et vos limes
Ôtent le beau pour le joli !
En soldat j’en parle et j’en use.
Le bon ressort, non le poli,
Fait le bon rouet d’arquebuse.
Vous êtes la voix éloquente de nos douleurs et de nos joies, de nos regrets et de nos désirs. Vous êtes le Savoir, la Poésie et le Bonheur. (...)
Et émerveillé de ce que j'entendais, j'interrogeai le divin Guide, et je lui dis:
-Qui êtes -vous ? Et qui sont ces hommes que la foule célèbre avec tant de respect et tant d'amour?
Et il me répondit:
-CE SONT DES GENS DE LETTRES. (p.14)
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La meilleure critique des « Misérables » de Victor Hugo a été faite par Baudelaire. « Ah ! disait-il en colère, qu’est-ce que c’est que ces criminels sentimentaux, qui ont des remords pour des pièces de quarante sous, qui discutent avec leur conscience pendant des heures, et fondent des prix de vertu ? J’en ferai, moi, un roman où je mettrai en scène des scélérats, mais un vrai scélérat, assassin, voleur, incendiaire et corsaire, et qui finira par cette phrase : « Et sous ces ombrages que j’ai plantés, entouré d’une famille qui me vénère, d’enfants qui me chérissent et d’une femme qui m’adore, — je jouis en paix du fruit de tous mes crimes ! »
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Il reste aux amis de Charles Baudelaire son œuvre, son souvenir et le bonheur d’avoir vécu dans la confidence d’un esprit rare, d’une âme élevée, forte et sympathique, d’un de ces génies d’exception, sans pairs ni sans analogues, qui poussent en ce monde, comme des fleurs magiques, dont la couleur, dont la feuille et le parfum ne sont qu’à elles, et qui disparaissent comme elles sont nées, mystérieusement ; de l’un des hommes, en un mot, les plus complets, les plus exquis et les mieux organisés qui aient été donnés à ce siècle.
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Aussi l'amateur des quais est-il nécessairement un littérateur qui connaît son avenir. Riez tant que vous voudrez en lui voyant acheter des babioles dont vous ne voudriez pas pour rien, il se console en disant en lui-même : dans dix ans, dans vingt ans, tu viendras me les demander à genoux; tu ne les auras pas!
L'Enfer du bibliophile
C'est sur les quais que se forment les collections impossibles, que se ramassent les riens qui vaudront de l'or. Aussi, s'il ne faut à l'amateur ordinaire que de l'argent et du goût (et encore chez plus d'un d'entre eux le premier supplée le second), il faut à l'amateur des quais, généralement pauvre et sans crédit, outre une patience de fourmi, le génie d'un inventeur. (p.16)
C'est sur les quais que se forment les collections impossibles, que se ramassent les riens qui vaudront de l'or.
L'Enfer du bibliophile
« J’admirai comment, sans le secours de plume, ni d’encre d’aucune espèce, leur pensée s’allait directement imprimer sur le papier. » (p. 87)
Aussi l'amateur des quais est-il nécessairement un littérateur qui connaît son avenir. Riez tant que vous voudrez en lui voyant acheter des babioles dont vous ne voudriez pas pour rien, il se console en disant en lui-même : dans dix ans, dans vingt ans, tu viendras me les demander à genoux; tu ne les auras pas !
« Après tout, cet être mystérieux, fut-il un démon et un vampire, était certainement bibliophile ; son geste, son regard, son sourire étaient d’un connaisseur, et d’un connaisseur émérite. » (p. 31)