La trajectoire du concept d'Anthropocène est particulièrement représentative des débats sur les sources de la crise écologique : pour des raisons scientifiques et politiques, des concepts alternatifs à l'Anthropocène ont été proposés afin de sortir de l'idée d'une responsabilité homogène de l'humanité dans le déclenchement de la crise écologique - le plus célèbre de ces concepts alternatifs à l'Anthropocène est probablement le Capitalocène, plébiscité par les marxistes. Ces contre-récits se sont rapidement multipliés, mettant en évidence différentes facettes de la crise écologique et de son histoire : le Plantationocène visibilise les impacts environnementaux de la colonisation, le Technocène concerne les "technologies lourdes et brutales qui lui sont associées et qui remodèlent les milieux de vie et les liens entre humains et non-humains". La plupart de ces nouvelles narrations s'inscrivent dans une perspective émancipatrice, fondée sur l'adoption du point de vue dominé dans la fabrique de l'histoire, contre les récits dominants de la crise écologique qui visent, au contraire, à verrouiller l'ordre social. (27-28)
Si le fascisme fossile domine encore aujourd'hui à l'extrême droite, des formes marginales d'appropriation sincère de la question écologique existent au sein de celle-ci. Reconnaître leur sincérité ne revient pas à les accréditer, mais seulement à considérer ces appropriations comme un véritable danger politique, auquel écologistes comme antifascistes devraient accorder plus d'attention. (9)