ARISTOPHANE Peut-on rire de tout ? (France Culture, Nouveaux Chemins, 2013)
Émission de radio « Nouveaux Chemins » diffusée le 19 mars 2013, sur France Culture dans le cadre dune semaine intitulée « Éloge de la parodie ». Adèle an Reeth recevait Ghislaine Jay-Robert, maître de conférence en langue et littérature grecques à lUniversité de Perpignan.
Former les hommes, ce n'est pas remplir un vase, c'est allumer un feu.
Ah les généraux ! Ils sont légions mais ne valent pas grand chose.
TRYGÉE : Ça ne sert à rien, mes amis, d'avoir des dents blanches, si l'on n'a rien à se mettre dessous.
TRYGÉE : Tiens, voilà quelqu'un qui s'amène avec une couronne de lauriers sur la tête.
LE SERVITEUR : Qui ça peut-il être ?
TRYGÉE : Il a une tête de charlatan.
LE SERVITEUR : Un devin peut-être ?
(LA PAIX.)
TRYGÉE : Toutes les villes, débarrassées de leurs misères, offriront partout des victimes à Hermès-de-Bon-Secours. Et je ne parle pas d'une quantité d'autres bénéfices. D'abord, je te fais cadeau de cette coupe à libations.
HERMÈS : Ah ! je me suis toujours laissé attendrir par les objets en or.
LA PAIX.
TRYGÉE (monté sur un bousier géant) : Vous pour qui je me donne tout ce mal, retenez-vous de péter et de faire caca d'ici trois jours. Car si cet animal reniflait vos déjections dans l'atmosphère, il me jetterait par-dessus bord pour aller y trouver sa pâture. Allons, hue, Pégase ; en avant gaiement ; secoue joyeusement les oreilles, et fais bringuebaler avec un cliquetis les gourmettes de tes freins dorés. Que fais-tu, que fais-tu donc ? Qu'as-tu à incliner les naseaux du côté des latrines ? Quitte la terre dans un essor audacieux, déploie ton aile rapide, et dirige-toi tout droit vers le palais de Zeus en détournant le nez des étrons et de toutes nourritures terrestres. Hé, l'homme, que fais-tu donc ? Oui, toi qui es en train de chier contre le mur du bordel ? Tu veux ma mort, tu veux donc ma mort ? Veux-tu bien l'enfouir, ton ordure, et la recouvrir d'un gros tas de terre, et semer dessus du serpolet, et l'arroser de parfum ? Si je me casse la figure en tombant d'ici, les citoyens de Chios devront pour ma mort payer une indemnité d'au moins cinq talents, et cela sera la faute de ton derrière.
Lysistrata ,
je ne prendrai pas une pose de lionne sur une râpe à fromage .
( comprendre : je ne serais pas séductrice et tentatrice ) .
LE SERVITEUR : Sacrée charogne ! Nourrir un chien pareil !
BDÉLYCLÉON : Qu'y a-t-il, s'il te plaît ?
LE SERVITEUR : Voilà-t-il pas que Labès, votre chien, vient de faire un bond à travers la cuisine, en emportant un fromage frais de Sicile dont il a la gueule pleine !
BDÉLYCLÉON : Bon, voilà le premier délit qu'il me faut porter devant mon père. C'est à toi de représenter l'accusation.
LE SERVITEUR : Non, ma parole, ce n'est pas à moi ; c'est l'autre chien qui déclare se porter comme accusateur, en cas de poursuites.
[...]
BDÉLYCLÉON : S'il y a des juges à la porte, qu'ils entrent. Quand les plaidoiries auront commencé, nous ne laisserons plus entrer.
PHILOCLÉON : Quel est donc l'accusé ?
BDÉLYCLÉON : Le voici.
PHILOCLÉON : Il peut s'attendre à une belle condamnation.
BDÉLYCLÉON : Maintenant silence ! Je lis l'acte d'accusation : plainte a été déposée par le sieur Le Chien, natif de Cydathénée, contre Labès d'Aixoné, pour ce que ledit Labès aurait dévoré à lui seul un fromage de Sicile. On demande la peine du carcan de figuier.
PHILOCLÉON : Il doit mourir comme un chien plutôt, une fois qu'on l'aura reconnu coupable.
BDÉLYCLÉON : Voici ledit Labès au banc des accusés.
PHILOCLÉON : Quel misérable ! Tout à fait la tête d'un voleur ! Il pense m'en imposer en serrant les dents de cette façon. Mais où se trouve le plaignant, le sieur Le Chien, de Cydathénée ?
LE CHIEN : Ouah, ouah !
BDÉLYCLÉON : Le voici.
PHILOCLÉON : C'est un second Labès.
BDÉLYCLÉON : Pour ce qui est de bien aboyer.
PHILOCLÉON : Et de lécher à fond les marmites.
BDÉLYCLÉON : Silence ! assis ! (Au chien.) Vous, montez à ce banc ! Commencez l'accusation.
[...]
LE CHIEN : Vous avez entendu, Messieurs les Juges, la plainte que j'ai déposé contre cet individu. Il a commis le crime le plus odieux contre ma personne et contre toute la " flotte ". Il s'est carapaté dans un coin, en " sicilisant " un gros fromage, et s'en est rempli le ventre dans l'ombre...
PHILOCLÉON : Parbleu, c'est clair. Le grossier personnage, entendez-vous, vient de me lâcher en pleine figure un rot qui empeste le fromage.
LES GUÊPES.
LYSISTRATA : Quand il nous faudrait jouir et profiter de notre jeunesse, nous couchons seules, à cause de l'expédition. Passe encore pour nous ; mais de songer aux jeunes filles qui vieillissent dans leurs chambres, j'en suis dévorée de chagrin.
LE COMMISSAIRE : Les hommes ne vieillissent-ils pas aussi ?
LYSISTRATA : Oui, par Zeus, mais ce n'est pas la même chose, ce que tu dis là. Un homme, à son retour, fût-il tout blanc, épouse vite une jeune fille. Mais la femme n'a qu'une saison de courte durée ; si elle la laisse passer, personne ne veut plus l'épouser ; elle n'a plus qu'à rester accroupie à tirer les auspices.
LE CHOEUR. Holà, toi ! Je t'appelle, je t'appelle !
LA HUPPE. Pourquoi m'appelles-tu ?
LE CHOEUR. Emmène ces gens faire un bon dîner avec toi ; mais le rossignol aux doux chants, dont la voix égale celle des Muses, laisse-le ici près de nous, en nous quittant, afin que nous en soyons charmés.
PISTHÉTÈRE. Oh ! de par Zeus ! cède à leurs désirs. Fais sortir l'aimable oiseau des joncs à ombelles.
EUELPIDE. Fais-le sortir, au nom des dieux, afin que nous voyions l'oiseau chanteur.
LA HUPPE. Puisqu'il vous plaît ainsi, je dois le faire. Sors, Procnè, et montre-toi à nos hôtes. (Procnè paraît.)
PISTHÉTÈRE. O Zeus vénéré, quelle jolie petite personne ailée ! Quelle délicatesse, quel éclat !
EUELPIDE. Sais-tu que je la cajolerais avec plaisir ?
PISTHÉTÈRE. Quelle riche parure d'or ! On dirait d'une vierge.
EUELPIDE. Je serais tout à fait en humeur de lui donner des baisers.
PISTHÉTÈRE. Mais, mon pauvre garçon, elle a un bec long de deux broches.
EUELPIDE. Eh bien, de par Zeus ! il n'y a qu'à enlever l'écaille qui lui couvre la tête, et à lui donner ensuite de bons baisers
Les oiseaux.