Antoine Tracqui serait-il le
Tom Clancy français ? J'ai bien envie de le croire tant la similitude dans la façon de construire son récit s'apparente à celle du maître du genre : multitude de lieux et de personnages, nombreuses intrigues secondaires au service d'une intrigue principale qui ne se découvre que vers la fin du récit, déroulement chronologique qui nous conduit à sauter d'un point du globe à un autre, excellente connaissance de l'Histoire (avec un grand H), des personnages historiques, des lieux, des services de renseignement, des armes, des nouvelles technologies… Et j'en passe.
Antoine Tracqui accomplit ici un travail de bénédictin qui le conduit à réaliser un premier tome de presque 900 pages avec un caractère d'imprimerie de petit format, de quoi donner à lire pendant des dizaines d'heures à un lecteur chevronné.
Si vous n'aimez pas les longues sagas pleines de détails et de complexité, passez votre chemin...
Mais attention : très longue histoire ne rime pas, dans ce cas-ci, avec lecture ennuyeuse ! Une fois plongé dans l'histoire, difficile de s'en décrocher. Même s'il y a de nombreux personnages !
Nous suivons plus particulièrement les quatre de l'équipe Hard Rescue, personnalités très typées dignes des grands jeux de rôles classiques. Nous allons dire que ces quatre-là sont les vrais gentils de l'histoire : Caleb, le malin, le consciencieux, le chef responsable de ses hommes, le bon Samaritain de service, Joshua Tewaru, un Maori néo-zélandais qui compte, parmi d'autres talents, un don rare pour les langues, One Shot, tireur d'élite finlandais à la corpulence d'un gringalet de deux tonnes, rien que du muscle… Ah, oui ! « One Shot », ce n'est pas son nom, c'est son surnom ! Pourquoi ? M'enfin ! Est-ce que je vous demande si votre grand-mère aime les rutabagas ? N'oublions pas l'atout charme de ce quatuor, l'Allemande Gretchen (plus germanique comme prénom, tu meurs) qui fait tout péter avec une précision de l'ordre du millimètre ! … Non ! Je n'exagère pas, sinon j'aurais dit de l'ordre du micron !
Puis, il y a quelques figures de l'étrange société privée K2 Industries, où une place de choix est consacrée à une nana, Poppy Borghese, qui renvoie Rambo à la crèche jouer avec de la plasticine. Là aussi, il y a des gentils : une jeune demoiselle très savante, Sarah Bernstein, nièce du n°2 de K2 Industries. Mais les deux dirigeants de cette immense boîte, société n°1 mondial dans le domaine de l'armement, sont-ce vraiment de braves types animés par l'amour de leur prochain et un futur meilleur pour la planète ? Ils adorent le pognon. Mais depuis quand est-ce un défaut ? Hein ? Depuis quand ? Pourtant, vous croiseriez le « number one » de la boîte, vous le prendriez pour un clochard ! Ah ! Si ! Vu sa dégaine, beaucoup de SDF pourraient se croire multimilliardaires !
Côté « méchants », il y a des Russes ! L'élite des spetsnaz (Eh, oui, Madame, on ne se refuse rien) : cruels, impitoyables, sadiques, bestiaux, même pas peur de tuer des innocents… Caricatural ? Oui, mais pas tant que ça : rappelez-vous comment ils ont « libéré » l'école de Beslan où se trouvait un millier d'enfants et d'adultes. le bilan officiel fait état de 334 civils tués, dont 186 enfants. Difficile de dire combien ont été estourbis par les terroristes et combien ont été victimes de l'attaque des « libérateurs ». Parmi ces méchants, ne cherchez pas un seul gentil avec ce qui ressemble à des sentiments humanistes ! Non ! N'essayez pas, vous allez déprimer ! Ce sont des VRAIS méchants ! Vous connaissez le lieutenant Pavel Tomski ? Non, vous ne le connaissez pas, sinon vous ne seriez plus là pour lire ma charmante prose pleine de poésie ! Attention ! Attention ! « Méchants » ne veut pas dire incompétents. Il faut qu'ils aient des atouts dans leur jeu pour faire valoir les « gentils ». Parmi ces atouts, il y a une créature qui… (Faudra lire l'histoire pour en savoir plus.)
Vous voyagerez dans le temps, notamment dans l'Italie fasciste où un brillantissime mathématicien pas très copain avec les idées de Mussolini tente d'échapper aux services secrets du Duce.
Vous voyagerez de l'Afrique et de ses mines, à la Sibérie dans une charmante ville secrète datant de l'ère soviétique et où avaient lieu des expériences sur… (Attendez ! ça va me revenir… Un autre jour, peut-être ?) Vous aurez le privilège de vous rendre du tr… du c… de la Sibérie jusqu'en Antarctique où les scènes d'action ne vous laisseront pas de glace malgré des températures de -60° C. Vous y découvrirez… Ah, ça c'est idiot ! Juste un gros trou de mémoire au moment où je rédige cette critique… Suis-je bête ? (Qui a dit « oui » ! Levez le doigt ! J'exige le nom des coupables ! … Pardon… Je voulais dire « des invités pour un séjour idyllique gratuit, aux frais de la princesse, dans une zone de Sibérie encore vierge sur les cartes géographiques » ! On dit « merci qui » ? … Pfff ! Face à tant d'ingratitude de votre part, et en l'absence de mon avocat, je ne vous livrerai plus aucun détail quant à cette histoire !
Si certaines descriptions très techniques peuvent vous paraître lassantes, n'hésitez pas à les passer, en général, elles ne sont pas indispensables à la bonne compréhension du récit, elles sont là pour faire « vrai », sérieux, crédible, mais que cela ne vous empêche pas de profiter de l'histoire qui est passionnante !
Voilà donc un solide bouquin parfait pour personnes confinées, fatiguées de regarder la télé et qui ont envie d'être transportées ailleurs par les évocations d'un récit aux multiples rebondissements « jamesbondesques ».
Si Netflix ou Amazon cherchent à lancer une nouvelle série à (très) gros budget, Point Zéro devrait leur offrir une première saison palpitante !
Merci à Masse Critique et aux éditions Critic pour m'avoir offert l'occasion de découvrir cette série hors normes. Je m'en vais commander la suite sans tarder !