Le début de ce roman est très beau, d'une écriture très travaillée, presque précieuse avec de longues phrases. Après ma lecture j'ai cherché à en savoir un peu plus sur l'auteur, et j'ai été surprise de découvrir que c'était un surréaliste, ce qui ne transparaît guère à la lecture des Vanilliers. Il s'agit d'une réécriture de la découverte de la fécondation de la vanille en 1841 à La Réunion par Edmond Albius, jeune esclave noir âgé de 12 ans. Après la citation d'un passage de Metchnikoff sur la vanille
Georges Limbour en reprend très librement la trame pour construire son roman. La vanille est découverte par hasard au Mexique par le marchand van Houten lors d'une visite à un de ses employés. Il en fait transporter quelques pieds dans une île pour en produire et parfumer son chocolat. L'île en question n'est donc plus La Réunion, mais une île hollandaise comme van Houten. Si les faits sont exacts, les détails sont purement imaginaires, y compris l'apparence des vanilliers qui ne sont plus des lianes, mais des arbustes ! Il rajoute d'autres fantaisies historiques avec l'histoire de l'arrivée des tulipes par la Chine (alors que c'est une plante originaire du Moyen-Orient). Fantaisies d'auteurs parfaitement acceptables mais qui me semble en contradiction avec le sens du roman qui met l'accent sur la rupture de l'harmonie de la nature par l'homme. Comment faire croire à son propos quand on tord les faits principaux pour les conformer à celui-ci. L'île de ce roman est loin du stéréotype de l'île paradisiaque. Pour Jenny elle est l'opposé du Mexique qu'elle a quitté avec la mort de sa mère. C'est une île où tout crève, même les arbres. L'arrivée des vanilliers et des plantations de van Houten, c'est «le temps du malheur pour les indigènes, l'âge d'or pour van Houten». Comme le dit le capitaine du navire qui transporte les oiseaux : « Voilà ce que c'est quand des van Houten veulent changer de place la nature. […] Ce n'est pas un typhon qui nous coulera, vous verrez, nous serons engloutis sur la mer par des révoltes de forêts. »
Le sujet et son traitement sont intéressants. Comme je l'ai dit j'ai aimé le début, mais ce qui m'a sérieusement gênée et profondément déplu, c'est que j'étais perdu dans les personnages. Non pas, comme cela peut arriver parfois parce qu'ils sont trop nombreux, mais parce qu'à plusieurs occasions je croyais qu'un passage portait sur un personnage et que c'était sur un autre. Je n'ai pas réussi à en trouver une explication unique et précise, il y a certainement une part de fatigue de ma part, mais l'abondance de phrases trop longues y est certainement aussi pour quelque chose. J'ai noté aussi un emploi des pronoms personnels sans qu'on sache avec une certitude absolue à qui ils se rapportent. Et puis, beaucoup d'ellipses qui obligent à des retours en arrière. Bref, une lecture que j'ai trouvé exagérément difficile.