En voiture ! À Tokyo, on monte dans le Shinkasen pour un voyage dans un thriller japonais captivant.
Pas une simple histoire de meurtre, un chassé-croisé d'assassins qui ont tous des comptes à régler avec quelqu'un, chacun a des raisons différentes de tuer. Les chapitres alternent entre les différents tueurs et si on a du mal au début à situer tous les personnages, on apprend peu à peu à les connaître, même s'ils ne sont pas vraiment sympathiques !
Il y a Kimura qui veut venger son fils de six ans, poussé du haut d'un toit.
Il y a les tueurs à gages aux noms improbables de Citron et Mandarine. Une touche d'humour, mais ces agrumes n'en sont pas moins redoutables : ils viennent de sauver un enfant enlevé, mais en trucidant tout le groupe des kidnappeurs.
Il y a Nanao, le truand le plus malchanceux du monde. Tout tourne toujours mal avec lui, ce qui ne l'empêche pas de pouvoir tordre le cou d'un gêneur si nécessaire.
Il y a le collégien à l'apparence irréprochable, mais qui s'avère un manipulateur machiavélique.
Et encore d'autres à découvrir…
Un polar qui m'a beaucoup plu, avec un certain dépaysement, de l'humour et même des réflexions sur la le bien et le mal, la justice et la manipulation des autres.
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Je me suis régalé avec ce roman qui mêle une bonne dose d'humour et d'hémoglobine . Je n'ai pas vu le film mais la bande-annonce a attisé ma curiosité . Imaginez un peu : une bande de tueurs à gages réuni dans un train à grande vitesse japonais qui file à plus de 200 Km/heure avec une mission à remplir : récupérer une mystérieuse valise et ramener le fils d'un patron de la pègre locale sain et sauf alors qu'il servait il y a peu d'otages. le seul petit souci c'est que nos professionnels du crime rémunéré semblent avoir peu ou prou le même objectif mais sans savoir qu'ils sont accompagnés dans le train par d'autres camarades bien déterminés à réussir leur mission eux aussi. Rajoutez à cette joyeuse confrérie , un père venu venger son fils , un adolescent psychopathe, un mystérieux empoisonneur , un serpent venimeux et vous avez un cocktail garanti en truculence et cadavres en série.
Si j'avais déjà lu d'autres romans noirs ou policiers japonais , on peut dire que celui-là sort du lot. On suit ainsi les pérégrinations des différents personnages à travers les différentes voitures du train. Et je peux vous dire que ça va remuer ! Pour mieux suivre les protagonistes , l'auteur utilise leurs surnoms pour chaque chapitre qui leur est consacré (quel voyou digne de ce nom n'a pas de surnom ) . Outre les duettistes Les Agrumes - Citron et Mandarine- on va ainsi suivre Coccinelle , le Prince ou le Liseron dans leurs aventures. L'espace est restreint mais nos lascards ne manquent pas d'imagination pour mettre à profit le moindre recoin nécessaire à leurs actes quand ils n'utilisent pas les autres passagers à l'insu de leur plein gré.
Cerise sur le gâteau chaque protagoniste est caractérisé par une personnalité qui lui est propre et qui nous fait chavirer par moment dans le burlesque : on a celui dont la vie semble être régie par une succession de malchances, l'autre qui est fan d'une série de dessins animés alors que son binôme est un fervent lecteur de classiques de la littérature.
Si la mise en place peut paraître un peu longue , on se délecte des successions de micro-événements voulus ou non qui vont agrémenter le voyage de nos professionnels du crime . Vous l'aurez compris : rien ne va se passer comme prévu pour la plupart d'entre eux, certains sauveront leur peau , d'autres finiront dans les toilettes…
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Il n'y a rien de moins marrant qu'un homme sérieux qui essaie d'être drôle.
Citron s’agite, inspecte la zone près de la fenêtre et du corps, tripote les plateaux fixés aux sièges, feuillette les magazines rangés dans les poches des dossiers.
— Tu fais quoi, là ?
— Je cherche des indices, mais il n’y a rien. Satané gosse de riche.
— Quel genre d’indice ?
— Par exemple le nom du tueur écrit avec son sang, un truc comme ça. Ça s’est déjà vu, non ?
— Dans les romans policiers, à la rigueur, mais dans la vraie vie, ça m’étonnerait…
— Tu dois avoir raison.
Découragé, Citron repose les magazines, mais continue de fureter autour du cadavre.
— Je doute qu’il ait eu le temps de laisser le moindre indice avant de mourir. Il n’a même pas saigné, alors comment aurait-il pu écrire quoique ce soit avec son sang ?
Citron est irrité par la logique sans faille de Mandarine.
— Claquer comme ça, ça n’aide pas les gens à résoudre l’affaire. Souviens-toi : si quelqu’un tente de te tuer, fais en sorte de laisser derrière toi des indices utiles, genre le nom de l’assassin. Et puis au moins, indique clairement s’il s’agit d’un meurtre, d’un suicide ou d’un accident, sinon, c’est vraiment relou.
— Moi, quand je tirerai ma révérence, ce ne sera pas un suicide. Autant j’admire Virginia Woolf et Mishima, autant le suicide, ce n’est pas mon truc.
— Virginia qui ?
— Tu sais, puisque tu arrives à tout savoir sur les trains, je pense que tu n’aurais pas de mal à lire des livres. Pourquoi tu n’essaierais pas ? Je t’en ai conseillé plein.
— Je n’ai jamais aimé les livres, même quand j’étais enfant. Je mets des plombes à arriver à la dernière page. Et toi, pourquoi tu n’essaies même pas de te rappeler les noms des personnages de Thomas et ses amis, alors que je ne cesse de te les répéter ? Je suis certain que tu ne saurais toujours pas reconnaître Percy.
— C’est lequel, déjà ?
— Perceval est un petit engin vert. Il est plutôt effronté, et aime jouer des tours, bien qu’il prenne son travail très au sérieux.
— Mais comment tu peux mémoriser tout ça ?
— C’est écrit sur sa carte à collectionner. Plutôt cool, hein ? Une explication simple, mais substantielle. Percy fait souvent des farces à ses amis, mais il est aussi un peu naïf, tu vois ? C’est très touchant. Parfois j’en ai les larmes aux yeux. Je parie que tes livres n’ont pas la même profondeur.
— Ouvre un bouquin et tu verras bien. Commence par, je ne sais pas, La Promenade au phare.
— Qu’est-ce que ça m’enseignera ?
— À quel point les êtres humains sont insignifiants, et dans quelle mesure notre existence n’est qu’un grain de poussière parmi des milliards d’autres vies. Ce roman te permettra de comprendre que tu es minuscule, perdu dans l’étendue sans limites de l’océan du temps avalé par les vagues. C’est vraiment puissant. « Nous pérîmes, chacun tout seul. »
— Qu’est-ce que ça veut dire ?
— C’est une phrase que prononce l’un des personnages. Elle signifie que tout le monde meurt, et qu’à ce moment-là on est seul.
— Je ne mourrai pas, ricane Citron.
— Si, et tu mourras seul.
— Si je meurs, je reviendrai.
— Ça ne m’étonne pas, tu es tellement têtu. Mais moi, je mourrai un jour. Tout seul.
— Donc je te le répète : quand tu crèveras, n’oublie pas de me laisser un indice.
— D’accord. Si je devine qu’on va m’assassiner, je ferai de mon mieux pour te passer le message.
— Et quand tu écriras le nom du tueur avec ton sang, fais-le lisiblement, OK ? Pas d’initiales ou d’abréviations compliquées.
— Je n’ai pas l’intention d’écrire quoi que ce soit avec mon sang.
Mandarine s’interrompt pour réfléchir.
pages 48
« Ce que je veux dire, c’est que les gens agissent en tenant compte de l’influence de leur entourage. Les êtres humains sont moins motivés par la raison que par l’instinct. Donc, même quand quelqu’un semble procéder de sa propre volonté, il est toujours marqué par les autres. Les gens croient avoir une existence indépendante, originale, mais une fois leurs données placées sur un graphique, ce ne sont plus que des points.
Les gens ont besoin de trouver le moyen de se justifier. On ne peut pas vivre sans se laisser l’espoir d’avoir raison, d’être fort, d’avoir de la valeur. Ainsi, lorsque nos paroles s’écartent de l’idée que nous nous faisons de nous-mêmes, nous nous cherchons des excuses afin de surmonter ces contradictions.
(Les Presses de la Cité, p.105)
Le Prince a vraiment ces gamins sous sa coupe. Ils sont complètement impuissants. Quand un groupe est dirigé par la peur, les soldats perdent progressivement confiance les uns en les autres. La colère et le ressentiment à l’égard du despote se retournent contre ceux qui devraient être leurs alliés, ce qui réduit d’autant la probabilité d’une rébellion. Chacun ne cherche plus qu’à se protéger, et le seul objectif commun devient d’éviter d’être puni.
Goodbye Earth | Official Trailer | Netflix