En amont du matin, la cavité des ombres se remplit.
C'est le passage à l'acte de la matière, la poudreuse a recouvert les rues désertes et les premiers pas aveugles crispent, prudemment, dans le bleu clair, évadé de la nuit.
Sia s’enfonce la première dans l’eau chlorée, suivie de Théa, puis de Dora. Les trois femmes nagent tout leur soûl, toute leur rage, jusqu’à l’apaisement des mouvements réguliers, jusqu’à retrouver leur souffle. Tout à coup, les éclairages de la piscine s’éteignent. La halle olympique plonge dans le noir. Elles restent dans l’eau et regardent, toutes les trois, le plafond de verre, à travers lequel s’étend, en profondeur, le centre d’un deuxième lieu enfoui, quelque part, dans la nuit glacée.
Les journées s'effondrent brusquement en hiver, en un instant de bascule intérieure, un battement sourd, l'oiseau n'est plus là.
On attend des nouvelles du Bureau général, qui guette le coup de fil de l'Inspection régionale, patientant avant d'avoir le feu vert de l'administration centrale. C'est un ascenseur fou qui circule, officiellement, à l'horizontale.