Ancienne colonie, la planète Belzagor a été rendue à ses deux espèces intelligentes. Des scientifiques décident d'assister à leur rituel secret, la cérémonie de la renaissance...
Dessin : Laura Zuccheri
Oeuvre originale : Robert Silverberg
Scénario : Philippe Thirault
Le processus qui consiste à changer d'avis est subtil. Vous commencez en position A, que vous tenez avec un entêtement sévère, bien résolu à ne jamais l'abandonner. Mais cette détermination, vous la remettez bientôt en question. Est-il sage d'être aussi obstiné? Peut-être devriez-vous considérer une alternative? Vous révisez un peu votre inflexibilité première, abandonnant la position A pour adopter la position B., qui est sensiblement la même à cela près que s'y ajoutent deux ou trois "si" et "peut-être". Puis, par une série de compromis graduels, de considérations privées, de détours et de biais, vous glissez mollement au long de l'alphabet jusqu'à vous trouver à la position Z, exactement à l'opposé de votre point de vue initial.
("La Porte des Mondes")
(David Selig est un marginal qui a le pouvoir de lire dans l’esprit des autres, hommes ou femmes)
Le pouvoir apporte l’extase (...). Les mortels viennent au monde dans une vallée des larmes et ils se distraient comme ils peuvent. Certains, à la recherche du plaisir, se tournent vers le sexe, la drogue ou la télévision. D’autres ont recours au cinoche, à l’ivresse, au rami, à la bourse, au tiercé, à la roulette, aux chaînes et au martinet à pointes, aux éditions originales, aux croisières dans les Caraïbes (…) et je ne sais quoi encore.
Mais pas lui. Pas David Selig le maudit. Tout ce qu’il avait à faire, c’était de s’installer tranquillement n’importe où, les écoutes bien ouvertes, et de boire les pensées portées par la brise télépathique. Sans se fouler, il menait une centaine de vies par personnes interposées. Il accumulait dans son coffre à trésor les trophées de mille âmes dépouillées. L’extase. Mais bien sûr, tout ça c’était il y a longtemps. (page 108)
C'est vendredi en fin d'après-midi, devant le Center de South Main, qu'Amanda repéra l'extraterrestre. Bien qu'il s'efforçât de passer inaperçu, de paraître le plus décontracté possible, il était quand même un tantinet désorienté et mal à l'aise.
Déguisé en jeune fille d'environ dix-sept ans, avec sa peau au teint olivâtre et des cheveux si foncés qu'ils en semblaient bleu marine, il avait l'air d'une Chicana ; mais Amanda, qui avait elle aussi dix-sept ans, était tout à fait à même de reconnaître un simulateur (...) Elle traversa la chaussée :
- Tu t'y prends mal, fit-elle. Il suffit d'un brin de jugeote, et on voit tout de suite qui tu es.
- Fiche-moi le camp, lança l'extraterrestre.
- Non, tu vas m'écouter. Tu veux échapper au centre de détention, oui ou non ?
(Début d'Amanda et l'extraterrestre ; ce récit, qui commence comme une nouvelle de Fredric Brown ou de Robert Sheckley, est une satire féroce d'une certaine jeunesse californienne)
Les grands esprits courent un grave danger lorsqu'ils vivent sous le règne de petites âmes.
Quand devrait-on accorder les droits civiques aux androïdes ? En même temps qu'aux robots et aux ordinateurs. Et aux brosses à dents.
Le dégel avait commencé . Non seulement sur la terre mais aussi dans coeur des hommes .
Dans cette société d'un futur proche, les manipulations génétiques permettent aux "congloméroïdes" d'incroyables transformations physiques ...
Je suis tout à fait ce qu'il y a de contemporain. Je suis post-causal, anti-linéaire, pepto-moderne. En dehors de cela, point de salut, nespa ? C'est se condamner à n'être qu'un fossile. Le sens du caractère infini des potentialités, un état de disponibilité infinie, telle est la philosophie à avoir à notre époque de constante reconversion. Etre ouvert à toutes les possibilités, faire preuve de souplesse existentielle en toute circonstance.
Aussi, lorsque mon quasi-cousin Spinifex m'a appelé pour me dire : "Viens à ma foetus-party ce soir", ai-je accepté sans hésitation.
(Début de la nouvelle "Le cocktail congloméroïde". En quoi consiste cette foetus-party ? je ne vous le dirai pas, il faudra lire le recueil pour le savoir ! Je reviendrai sur cette "philosophie du changement", qui est un axe majeur de l'oeuvre de Silverberg)
Manquer d'un membre, d'un œil, ou avoir une infirmité quelconque était considéré comme un crime esthétique: tout pouvait être réparé et la bienséance commandait d'offrir à ses congénères une apparence agréable. Les imperfections et la laideur outrageante étaient éminemment antisociales.
- C'est là que nous dormons, explique-t-il. On y tient facilement à trois. Nous avons la douche, là. Préférez-vous déféquer dans l'intimité ?
- Oui, s'il-vous-plaît.
- Alors, vous appuyez sur ce bouton qui allume l'écran d'intimité. Nous excrétons dans ceci. L'urine ici, les fèces, là. Tout est récupéré et réutilisé, vous comprenez. Nous avons le sens de l'économie dans les monades.
- Bien sûr, répond Gortman.
Principessa demande :
- Préférez-vous que nous utilisions l'écran quand nous déféquerons ? J'ai cru entendre dire que cela se fait à l'extérieur.
- Je ne voudrais pas vous imposer mes coutumes, dit Gortman.
- C'est un fait que notre culture a dépassé la notion d'intimité, répond Mattern, en souriant. Mais cela ne nous dérange pas d'appuyer sur le bouton, si...Il hésite. Une nouvelle pensée vient le troubler.
- La nudité n'est pas taboue sur Vénus, j'espère ? Je veux dire, nous n'avons que cette pièce et...
La lecture et l'écriture ont été mes premières acquisitions. Ce sont des connaissances essentielles à un prince; peut-on toujours en tout se fier à la probité de ses scribes et de ses assesseurs lorsque les messages vont et viennent sur un champ de bataille, ou dans les échanges de correspondance avec un souverain étranger ? Si le maître ne sait pas lire, il est à la merci de bien des formes de traîtrise et, tout grand homme qu'il soit, il peut se retrouver livré aux mains de ses ennemis.
J'aimerais pouvoir affirmer en toute sincérité que mon étude de ces arts procédait de considérations si perspicaces et si prévoyantes pour un futur monarque. Mais il en était rien. Ce qui me séduisait dans l'écriture, c'étaient les vertus magiques que j'y attachais. Pénétrer les arcanes de la magie, celle-là ou une autre, voilà qui m'attirait irrésistiblement.