Le placard - Bande-annonce
La vie est parfois étrange... Elle met sur notre chemin une personne qui bouleverse notre existence, puis, du jour au lendemain, elle nous en prive. Sans nous en apercevoir ni le désirer, nous sommes contraints de réfléchir et d'évoluer, de trouver un sens à cette rencontre. La vie nous impose ce deuil, que nous pouvons accepter ou refuser de faire. Mais, une fois la leçon retenue, il arrive que cette personne nous revienne.
La vie peut parfois être traître, affreusement cruelle et injuste, mais, à d'autres moments, elle vous surprend et vous révèle sa beauté, ses mystères, en vous offrant un cadeau inestimable... qu'il vous faut accepter, humblement.
Je te sens dans mes veines. Je n'ai rien sans toi. J'ai besoin de toi.
Mon cœur s’emballe.
— Quoi ? !
— Élie garde toujours ses poings fermés.
Ouf… Rien de grave.
— Les bébés font ça.
— Est-ce qu’on peut lui décroiser les doigts ? Juste pour vérifier qu’elle est correcte ?
Je souris. Karl est trop mignon !
En appui sur un oreiller, Élie boit avec attention, calme. Elle sent bon le bébé. Une odeur à jamais gravée dans ma mémoire. Sa main gauche, toute minuscule, repose sur le haut de mon sein. Fascinée par ma fille, j’écarte un à un ses doigts fragiles. J’ouvre grand la bouche lorsque j’aperçois une bague en or blanc dans sa paume.
— Voudrais-tu te marier avec moi ? me demande-t-il alors, la voix chevrotante.
Le souffle coupé, je prends la bague. Avec un diamant en son centre, elle est simple et brillante.
— Karl…, dis-je, abasourdie, le cœur battant à vive allure.
— Je suis amoureux de toi, Valérie. S’il te plaît, deviens ma femme.
Le monde, autour de moi, disparaît. Mon corps vibre et il a faim. Nous emmêlons nos langues. Mes mains caressent son visage. Ses doigts explorent mon cou. Puis, je râle. Elle respire bruyamment. Sans que je m’en rende compte, Anne se retrouve sous moi et gémit de plaisir sous mes caresses insistantes. J’ai envie de la toucher partout et de la déguster. Mes craintes envolées, je ne suis que désir, un désir refoulé depuis des mois et d’autant plus fort. Anne déboutonne mon chemisier de ses doigts tremblants et caresse mon buste. Les pointes de mes seins sont dures comme de la roche. Ayoye ! Mon corps est sur le point d’exploser de plaisir… Difficile de croire que mon rêve se réalise. Anne me désire !
En fait, je devrais juste être ravie d’avoir attiré son regard… De me sentir de nouveau désirable. J’avais simplement oublié ce que je pouvais ressentir en présence d’un gars qui me plaît vraiment et qui désire me séduire.
Je déteste cette peur incontrôlable qui me saisit et me paralyse chaque fois que je veux m’ouvrir à mon ami ! Ou aux autres ! Me cacher, faire semblant d’être hétérosexuelle et me mentir (ou mentir à mes parents !), tout cela m’épuise. Je dois prendre une décision. Suis-je enfin prête à rencontrer quelqu’un ? À risquer que les autres cégépiens découvrent mon homosexualité ? Que mes parents apprennent que je suis lesbienne ? Est-ce que j’aurai enfin le courage de m’accepter une fois pour toutes ? C’est désespérant, toutes ces questions !
Je souhaite que chaque moment passé avec toi soit grandiose, mémorable et excitant; du haut d’une terrasse, dans un appartement hors de prix, dans un restaurant bon marché ou dans notre demeure.
La réalité me frappe de plein fouet. Ce désir n’est qu’illusion. Emmanuel a rarement envie de faire l’amour. Son corps ne vibre pas assez à la vue du mien. En l’épousant, je croyais que la passion qui nous consumait ne s’éteindrait jamais, mais les années ont passé. Même si je sais que mon mari m’aime d’un amour profond, même si je l’aime aussi d’un amour inconditionnel, j’ai besoin de me retrouver dans ses bras, de faire l’amour avec lui, de sentir que nous nous désirons et que nous sommes un couple uni.
En vieillissant, et en gagnant en sagesse, je me rends compte que les amitiés que nous entretenons sont précieuses et inestimables. Les négliger et les sacrifier au nom de l’amour, ou pour toute autre raison, nous isole et nous donne la fausse impression que nous contrôlons notre vie, que celle-ci sera sans taches. Les amitiés que nous chérissons nous prémunissent contre le désespoir, nous comblent et nous remettent en question.