A l'occasion de la Rentrée littéraire Automne 2023 organisée par Occitanie Livre & Lecture, Gaspard Flamant est venu présenter son nouveau roman jeunesse "Les Magni-freaks" (Editions Sarbacane, 2023).
Enregistré à la médiathèque José Cabanis de Toulouse le 21 septembre 2023.
Malik fait partie de ces jeunes adultes au regard d'enfant qui peuvent passer une journée entière à vadrouiller dans un quartier ouvrier en Pologne, les yeux brillant de bonheur et le cerveau s'évertuant à tout retenir, chaque bruit, chaque odeur, chaque visage.
Ca fait longtemps qu'elle a décidé de ne plus prêter l'oreille aux malheurs des gens. Les héberger, les protéger, les rassurer, oui. Mais si on met le doigt dans le rouage de la vie des autres, on y perd la main.
Ils sont assis tous les cinq sur les pierres plates qui font face au saut légendaire de la corniche Kennedy. Depuis que la route du bord de mer existe, les gamins de Marseille se balancent dans le vide.
Léo a sorti un pot de peinture de sa caisse, et il a grimpé sur une échelle pour recouvrir la dédicace des nazillons. Mais au lieu de simplement recouvrir les mots, il a choisi d’en rajouter. D’abord un, puis deux, trois, jusqu’à former une liste immense, dont chaque ajout déclenchait des cris
de joie parmi nous! Ça a donné ça :
« La France aux Français, Maliens, Malgaches, Pakistanais, Italiennes, Colombiens, Chinois ou Chine-toi, Algériens et Algépleins, Islandaises,
Soudanaises et Surdanaises, Homo Sapiens et Homos tout court, Juifs à papillotes et punks à crête, Curés anarchistes, Putes en uniforme et Bonnes Sœurs en civil, Cancéreux en pleine santé, Nains de jardin et Géants de bureaux, Grévistes en CDI et employés modèle en alternance, Vieux gamins, Vieilles connes et Amoureux de tout, sauf de la haine ».
Et il a signé : « Les Châtelains ».
– Faut pas laisser la haine sur les murs, qu’il a dit, ça nique le crépi !
Avec la randonnée dans les Alpes, j'avais commencé à avoir envie de voir d'autres paysages, d'autres pays. Avec mon pote Jack London, je me suis dit que ça devenait une obligation.
ça m'a surtout mis la face dans la misère des autres, et ça m'a rappelé que mes combats devaient avoir une seule cible : l'argent. J'ai commencé à me dire qu'il fallait que je montre aux riches comme aux pauvres que c'est pas leur thune qui les définit… c'est plutôt ce qui les éloigne d'eux-mêmes. Les pauvres passent leur vie à rêver d'une fortune qu'ils n'auront jamais, et les riches se pourrissent la vie à essayer de ne pas perdre ce qu'ils ont. Et pendant ce temps-là, dans les HLM comme dans les villas, ça dépérit. (p.40)
Ici, c'est le royaume des animaux increvables, de ceux que le froid ne chasse pas et qui survivent des mois durant dans le gel.
C'est justement pour ça que t'es le meilleur porte-parole possible, Shorba : t'es pas comme tous les gars du jardin, qui sont nés le poing en l'air. Toi, tu apprends tous les jours, et tu n'arrêtes jamais de te remettre en question. C'est pour ça que t'es un gars aussi génial. (p.154)
[...] Et son équipe, c'est pas des trompettes.
- Hahaha ! Des trompettes ? Comme l'instrument ?
- Sérieux, Liam... c'est pas des baltringues, c'est pas des peureux, c'est... C'est des mecs qui cassent des genoux et portent des flingues.
- Ah ouais. Du coup, c'est pas des trompettes. C'est bizarre comme expression quand même.
- Ça veut dire quoi une trompette ? Une petite trompe, comme les hippocampes ? J'ai connu un hippocampe, mais il cassait pas les genoux.
- Tu sais pas, les poissons ils ont pas de genoux. Si ça se trouve, ton hippocampe, il rêvait de casser des genoux, mais il en trouvait pas.
Léo, lui, traçait devant, infatigable.
- Léo… comment tu fais ?! a balancé Zak.
- Qu'est-ce que tu veux, mon père c'était un chamois, il a répondu en souriant.
Zak a souri poliment, mais je savais bien que, comme moi, il n'avait aucune idée de ce qu'était un chamois. J'ai pensé à une sorte de moine, mi-chinois, mi-hippie. (p.37)