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Critiques de Frederika Amalia Finkelstein (72)
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Survivre

« Survivre » est un livre fort et émouvant dans la droite ligne du premier roman de l’auteure « L’oubli », que j’ai lu et relu par une quasi addiction à cette écriture à la fois d’une violence inouïe et pourtant tellement vraie, tellement humaine.

Frederika Amalia Finkelstein est jeune, mais deviendra certainement un des écrivains majeurs du 21e siècle d’ailleurs déjà remarquée par des personnalités littéraires comme Jean Marie Gustave Le Clézio, prix Nobel de littérature. En attendant, son approche sans complaisance du réel heurte nos sensibilités habituées au politiquement correct des médias qui, en recherche d’audience, de « like », lisse la réalité pour rendre audible les carnages qui défilent sur nos écrans jusqu’à plus soif.

Que s’est-il passé au Bataclan ? Un conte de fée ? Non, il s’est passé très exactement ce que l’on ne peut imaginer. Seule l’émotion peut véhiculer l’horreur. Ava souffre pour nous, à un rythme effréné.

J’ai trouvé une interview intéressante de l’auteure concernant « Survivre » :

https://fabienribery.wordpress.com/2017/08/17/sortir-du-cauchemar-de-lhistoire-par-la-romanciere-frederika-amalia-finkelstein/

« Survivre » est un livre à lire et son auteure est à suivre

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Survivre

Si je m'étais arrêté aux impressions des premières pages, j'aurais probablement fermé le livre au bout de la quinzième. Mais l'auteure m'a interpelé plus loin et j'ai commencé à m'interroger: « Il vaut mieux, dit-elle, que je vous décrive cette photographie qui m'obsède, si je ne vous la décris pas maintenant, elle va persister comme un mauvais secret. » Et c'est à ce moment-là que je me suis défait des préjugés qui m'empêchaient d'entrer dans cette histoire qui raconte, certes avec un voyeurisme dérangeant, le mal-être d'Ava à travers sa perception des attentats, de la violence dans le monde, de la mort, de la brutalité des vies et des conditions presque impossibles de survivre dans de tels environnements. Pourtant Ava n'a jamais vécu les violences qu'elle décrit. Elle en est gavée par la société qui lui permet de tout voir jusqu'à l'interdit. Ava c'est l'allégorie d'une jeunesse française qui sombre dans un pessimisme dévastateur et dans la confusion des priorités de l'existence humaine. Lorsqu'elle tombe sur la brochure permettant de repérer les signes et les comportements de la radicalisation; elle a cette observation très juste qui balaie presque d'un revers de formule toutes les analyses sociologiques: « Ma première réaction a été de rire, pour la simple raison que cette brochure parlait de moi. »

J'ai finalement trouvé dans cet ouvrage ce qui manque le plus aux discours des pseudo-experts du djihadisme et cela est éminemment bien résumé dans ce passage :  « J'ai moins de vingt-cinq ans et je ne parviens pas à envisager le futur. Je ne suis pas la seule: tous nous luttons comme des chiens pour survivre à la peur. le monde saigne et nous comptons nos morts. La haine se répand nuit et jour, il n'y a pas de trêve aux attentats et aux massacres, elle se déverse et nourrit le noyau de la terre. Marre de voir la déchéance triompher, de voir le monde en lambeaux, de voir le monde au bord de mourir éclaté en millions de petits corps sacrifiés pour rien. La paix n'existe plus. » Et pourtant, Ava ne perd pas espoir et croit qu'un monde meilleur peut advenir. Pour ma part, je partage largement ce sentiment d'espoir et tente autour de moi de transmettre aux jeunes générations un optimisme durable et contagieux ...



Mille remerciements à toute l'équipe du site Babelio et aux éditions Gallimard de m'avoir permis de découvrir cet ouvrage et son auteure.
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Survivre

Ce roman, qui ressemble plus à un journal, relate un jour comme un autre de la vie d’une jeune femme travaillant dans une boutique de la marque à la pomme croquée à Paris, après les attentats de novembre 2015. La suspicion dans le métro et la rue, de toute attitude, de tout comportement sortant de l’ordinaire, les efforts déployés pour éviter de céder à la paranoïa ; et cette description clinique, frôlant parfois le cynisme, des images tournant en boucle sur les chaînes d’information, l’avidité maladive à convoiter les vidéos choquantes de scènes d’exécution et de suicide en ligne.



Elle montre l’inhumanité avec laquelle l’être humain, et notamment les jeunes, perd pied et succombe à la fascination de l’horreur véhiculée par des écrans et qui le révulserait s’il la voyait de visu. L’écran est le nouveau fétiche de l’humanité civilisée. Elle pousse hors sol, renie le passé et ses racines, tend à sombrer dans le nihilisme.



La réflexion de l’auteur suit son cheminement à travers Paris tout au long de cette journée. J’apprécie la mise en parallèle de sa vision de la société avec sa propre vie : sa sœur aveugle mais plus lucide que bien des gens exempts de déficits sensoriels, elle n’est pas intoxiquée par les écrans. La perte de la vue est souvent traitée en littérature comme l’ouverture de l’esprit et le gain d’une bien meilleure acuité.



Certains passages m’ont franchement étonné : « Il n’y a rien de plus dangereux que le doute, j’en sais malheureusement quelque chose. Le doute a failli me perdre : j’ai failli m’ensevelir dans la spirale de sa folie. Faites attention avec ça : le doute est un cancer, il se répand invisiblement dans votre corps jusqu’à exterminer les rêves les plus modestes. » En quoi le doute est-il un danger, sauf à tout remettre en question ?



Et cette volonté d’apprendre par cœur des listes de noms de victimes, d’imprimer leurs photos et d’en tapisser les murs de sa chambre. N’est-ce pas là une fascination malsaine ? Les descriptions sont très saisissantes : on s’y croirait. Elle transmet très efficacement le sentiment de malaise. Elle affirme clairement que les jeux vidéo nous ont amenés à ça : GTA est une horreur excellemment décrite dans une mise en parallèle habile.



Elle collectionne les photos de morts qu’elle ne connaît pas mais ne peut se décider à se rendre à l’enterrement de sa grand-mère. La fascination du virtuel semble avoir raison de la réalité au point de tendre à la supplanter car elle est plus supportable.



Nous subissons une forme d’hypnose qui rend tout supportable et l’horreur devient ainsi acceptable. Pour en sortir, il faut s’administrer un grand coup de pied au *** et renouer avec ses racines, honorer nos morts, reprendre pied dans la vie réelle.



Ce livre est un coup de poing qui analyse assez bien l’horreur née du désenchantement de notre époque. Son cheminement est une prise de conscience progressive.
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L'Oubli

Voici un premier roman remarquable, fort,éblouissant , puissant,lu d'une traite....un cri, un appel...une réflexion intelligente, entre essai et fiction, un ouvrage sur "l'oubli"ou plus exactement sur ce que l'on appelle "le devoir de mémoire".

L'héroïne, Alma,part en guerre contre la mémoire obsessive.

Cette mémoire, c'est celle de la Shoah.

Elle la ronge, la remplit à chaque instant, son cerveau est obnubilé,alimenté, nourri par toutes les pensées inachevées, violentées,envolées, exterminées que l'humanité a laissé en déshérence depuis la Shoah, elle sillonne Paris de nuit comme de jour, errant entre Oberkampf et Hauteville, de la nuit jusqu'à l'aube pour trouver l'innocence.

Une quête philosophique ou une femme d'aujourd'hui héritiére d'un passé trop lourd qui "veut oublier tout" puisque " oublier c'est tenter de vivre".

Quand elle cherche le sommeil, elle ne parvient pas à chasser de son esprit les images des déportés dans les chambres à gaz.

Pas facile d'oublier les quatre millions de morts sans sépulture, dont six millions de juifs, raflés, conduits en train vers les camps, pas facile d'oublier le mot allemand:",aussterben,"disparaître".

Et la géographie de la mort, à plat sur la carte de l'Europe où s'affichent tous les points noirs des camps maudits comme une constellation mortifére.

"Ma mémoire s'est retournée contre moi, elle a cessé d'absorber le temps".

"Mon imagination est un château- fort. Je suis toute puissante, personne n'est en capacité de me faire du tort".

"J'écoute de la musique: une superposition mentale de plusieurs mélodies, comme une superposition de corps dans une fosse, sans la saleté et la putréfaction que cela induit, mais dans le même désordre"....



Un ouvrage déroutant que l'on ne lâche pas, une réflexion moderne, un appel au secours? , une fascination face à la solitude des chiffres et des images- surtout des chiffres-.



Un travail litteraire qui déroule une réflexion qui transcende et élève avec des éclairs imaginaires éblouissants comme cette scéne où l'héroïne tue son chien et l'enterre en pensée dans la forêt de Compiégne puisque "pour renoncer à son enfance ,il faut d'abord éliminer son chien" dans un détachement poétique et irréel, un équilibre entre l'intime et l'universel, ou encore Wolgang,le cheval de course qu'aimait son grand- pére mort en chutant à Auteuil, qui n'a jamais arrêté de courir et de gagner sa course pour la gloire des disparus avec sa casaque rouge cinabre!



Une voix tout à fait singulière le travail de quête d'une écrivaine , étudiante en philosophie de 23 ans.

Mais cet ouvrage risque de ne pas plaire à tout le monde et ne laissera personne indifférent, car bourré de paradoxes!

Je n'en dirai pas plus....un livre émouvant de distance, de froideur ,certes, mais qui nous brûle, paradoxalement.

"Qui songe à oublier se souvient".On le referme secoué, on se replonge avec une angoisse indicible dans ces odieuses réminiscences de la folie hitlérienne, avec , en fond sonore" One more Time" deDaft Punk ou " les variations de Goldberg" jouées par Glenn Gould ou encore la musique de Mahler.....

Nuit et barbarie....jour et brouillard... Malédiction du mal....

À suivre !





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Survivre

" Je n'ai jamais cru à un monde meilleur, mais la violence que nous sommes en train de vivre - en France, en Europe, cette violence là me tue."



Ce roman avec l'actualité dramatique de Barcelone a une résonance encore plus terrible. Ava, l'héroïne a une obsession, tous ces morts dans les attentats, ceux de Paris bien sûr, ville où elle vit et puis les atrocités du monde actuel.

D'un clic il est tellement simple de les découvrir, ainsi que des scènes insoutenables. Longue litanie de tous ces morts qui la hantent, même ceux de la Shoah.

Fuir pour survivre, est-ce vers cela que nous entraîne l'auteur? Cette déambulation dans Paris, ponctuée d'images terribles, nous entraîne dans l'innommable. Car rien n'est épargné au lecteur, le sang coule vraiment dans ce livre, et des corps brulent avec un luxe de détail. C'est éprouvant bien évidemment, mais l'actualité est ainsi. L'auteur pointe du doigt l'obscénité des médias, des réseaux. Toute cette horreur crachée au fil des pages pour montrer le mal-être de cette jeunesse qui subit la haine de certains. Tous ces visages, noms, âges et nationalités .... les victimes d'une étrange guerre.

Ce roman est bien évidemment éprouvant, nauséeux... Je ne crois pas que je saurais le conseiller autour de moi. Sans doute à cause des détails macabres.

Et pourtant il y a une force dans ces pages, un questionnement terrible qui donne une image de notre société bien négative. C'est un livre de rage qui nous montre un monde que nous ne voulons pas ou plus. Et pourtant...

L'auteure est jeune, mais convaincante dans sa façon de nous dire qu'il ne faut pas oublier.

Voici un livre que je ne partagerai pas sans doute.... Mais certainement un livre nécessaire, pour ceux qui pourront passer outre à toute cette horreur.



Merci à Babelio et à l'Arpenteur pour cet envoi. Mon premier roman de la rentrée littéraire 2017.



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L'Oubli

Raconter l'histoire d'un grand père qui a échappé à la Shoah, et en parler avec tant de cynisme : "Un jour quelqu’un m’a demandé si mon grand-père était mort à Auschwitz. J’ai répondu : « Non, à Buchenwald. » Il m’arrive de mentir.



Quelques pages plus loin on apprend que son grand-père a échappé de justesse à la déportation et aux camps pendant la Seconde Guerre Mondiale en quittant la Pologne et s'exilant en Argentine.



Jouer sur les paradoxes, sur la définition du mot 'disparaître' pour la solution finale, se poser des questions :



"Je me demande si les chambres à gaz avaient une odeur quelque peu semblable à l’odeur des semelles de mes chaussures, mais naturellement, infiniment plus forte. Je pense que cela est possible. Il aurait fallu pouvoir le demander à un Juif ayant fait l’expérience de la chambre à gaz, mais ce Juif est mort. À un SS ? Il semble, d’après ce que j’ai lu, que les SS sont des êtres remarquablement doués pour l’obéissance : il suffit d’un ordre. J’aurais ordonné à un SS de sentir mes tennis, je lui aurais ordonné, sur-le-champ, de me dire si l’odeur de mes chaussures avait un quelconque lien avec l’odeur caractéristique d’une chambre à gaz après le travail accompli, vous pouvez être certains que j’aurais obtenu une réponse positive ou négative, et une réponse détaillée."



Comment est-il possible d'être atteint de froideur, d'inconvenance ....



je n'ai surement pas d'humour, d'esprit philosophique, ni de second degré... Merci mais ce n'est pas pour moi !!!



Mais il parait que ce livre est une merveille, le traumatisme inconscient qui réapparait une génération plus tard. trop de coca, de consoles de jeux ???



Mais peut-être un premier livre tout simplement pour faire le Buzz.
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L'Oubli

Bon et bien… je n’ai même pas réussi à aller jusqu’à la fin. Ca veut tout dire non ? Ce livre faisait parti du comité de lecture de la bibliothèque, c’est même moi qui l’avait suggéré à notre bibliothécaire intercommunale qui choisit les livres. Il avait l’air intéressant, sur un sujet que j’apprécie particulièrement. Et…



C’est un roman, c’est ce qui est écrit sur la couverture. Il doit donc y avoir une histoire, des personnages, un déroulement. Personnellement, j’ai plus eu l’impression de lire… je sais pas, des mémoires psychologiques, peut-être, plutôt qu’un roman. Comment vous expliquer, le personnage principal passe son temps à nous décrire ce qu’il se passe dans sa tête. Elle prétend être hantée par les chambres à gaz alors qu’elle ne les a pas vécues, ni personne de sa famille d’ailleurs puisque son grand père y a échappé. Nous suivons donc le fil des pensées d’Alma, pensées qui n’ont, à mon sens, ni queue ni tête, qui partent dans tous les sens, qui sont très difficiles à suivre. Pour tout vous dire, je lisais plusieurs pages le soir et le lendemain, j’avais l’impression d’avoir déjà oublié tout ce que j’avais lu. Sans compter que c’est quand même très répétitif. Au bout d’un moment, on a compris certaines choses…



Habituellement, je fais toujours deux parties dans mes critiques, une première sur le fond, et la seconde sur la forme. Sauf qu’ici, je ne vois pas quoi dire de plus sur la forme. L’écriture de Frederika Amalia Finkelstein m’a totalement larguée. Je n’arrivais à garder les yeux ouverts, je n’arrivais pas à suivre. C’est sûrement plus dû au contenu qu’à l’écriture en elle-même. Quoiqu’il en soit, je n’ai pas adhéré.



Pour conclure : L’oubli, un livre qui ne restera pas gravé dans ma mémoire.

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L'Oubli

Et aprés l'on critique les jeunes chez Pernaut .... Ce livre écrit par une romanciére de 23 ans est une claque monumentale . Une intelligence rare , une écriture trés maitrisée , une puissance qui ne cesse de grandir au fur et à mesure du roman , c'est un bijou que l'on à içi. Il faut cesser de dire que les jeunes ne sont bons à rien , que la France ce n'est que la vision dèbile de tf1 et ces campings , au diable tout cela ! Voici içi la preuve que la France à en son sein des auteurs jeunes d'une qualité incroyable , qu'il faut découvrir au lieu d'applaudir devant les inepties de tf1 ! Oui ce livre est bon , il est mème excellent , et il faut le découvrir pour voir combien le talent de cette jeune romanciére est grand ! Vive la France ou l'on publie des livres aussi bons et Ouh à la France de Bienvenue au camping ! Vive la France des lettres avec ce roman incroyable ! Un roman qui va en choquer certains , mais dans le bon sens. Ce livre ne peut laisser insensible , quand on découvre ces pages , l'on plonge dans cette histoire que l'on devine trés personnelle et qui touche en plein coeur . C'est d'une telle intelligence et d'une telle maitrise que l'on en reste pantois et l'on ne peut que dire Bravo .
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Survivre

Comment la multiplicité d'horreurs, meurtres, assassinats et abominations pourrait-elle se refléter dans l'unicité d'une sensibilité ? Combien d'atrocités un seul regard peut-il absorber ? Cela lui confère un surcroît d'humanité ou, au contraire, le rendrait inhumain ? Où se place la frontière entre « devoir savoir », s'imprégner des histoires des victimes, de leurs visages et leurs biographies, et la folie ? Tout apprendre et comprendre te procure une lucidité utile ou te transforme, à ton tour, en victime de la violence engloutie sans cesse ? Réciter des listes de morts pendant tes séances de jogging, les pleurer par les pores de ta peau suante relève de la souplesse (cérébrale) ou d'un penchant morbide ?



Ava (prénom qui signifie vivre en hébreu), parisienne de 25 ans, ne saurait nous répondre. Mais elle nous inspire ces quelques questions qui nous semblent étrangement familières et nous livre le monologue d'une sensibilité dévorée par l'hypermnésie et l’hypervigilance suivant à un traumatisme collectif (le 13 novembre 2015). Une sensibilité d'Antigone désenchantée, dont la voix nous plonge tantôt dans la poésie de la stupeur, tantôt dans le malaise, voire les deux à la fois.



« Survivre » nous expose une tentative individuelle de s'approprier, d'exprimer et – peut-être – d'expier la tragédie. Démarche spécifique à ceux gardant la foi en la parole. (Car « ce qui est réellement irrationnel et qui n'a pas d'explication, ce n'est pas le mal, au contraire : c'est le bien », dit la phrase d'Imre Kertész mise en exergue.) C'est aussi un exercice de se réapproprier une ville, sa ville blessée, et sa propre vie : les deux se trouvant imbriquées sur une même carte, dans un empire des signes transpirant à chaque pas la violence (« les soldats de la Waffen-SS portaient des uniformes spécialement confectionnés par Hugo Boss. Chaque matin je passe devant cette boutique, et chaque matin je ne peux m'empêcher de penser au courage qu'il faut pour continuer à maintenir la dignité de cette marque après un passé aussi obscur », p. 36). Quels mots employer pour décrire et reproduire l'effet des meurtrissures passées contaminant et infestant le quotidien ? Prendre une bière ou un Bloody Mary dans le bar où des scènes de meurtres tournent en boucle sur l'écran ? Comment survivre au cœur de la barbarie banalisée ?



« Le quotidien le plus banal m'a poussée à côtoyer l'horreur. Le journal télévisé, les jeux vidéo, les photographies morbides jonchant les réseaux sociaux […]. J'ai avalé les images les unes après les autres, jour après jours, mois après mois, année après année. Et peu à peu l'horreur est devenue acceptable. Toujours écoeurante. Mais acceptable. Je veux dire ''humaine''. Et c'est là qu'il faut lutter. C'est là, je me souviens, c'est là le plus dur, le plus cruel : il faut essayer de trouver cela choquant » (p. 73).



Les premiers livres d'un auteur ont toujours quelque chose de touchant. Ce sont des pages où il se cherche, trébuche, se montre maladroit et hésitant et peut se permettre de faire opérer sur nous le charme de l'inachevé ou d'un mignon défaut. C'est un « luxe » que le vécu vient ensuite policer, voire éliminer. Les deux premiers livres de Frederika Amalia Finkelstein (« L'Oubli » et « Survivre »), qui ne sont certes pas parfaits, mais que j'ai beaucoup aimés, m'ont ramenée à cette réflexion…
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L'Oubli

Alma Dorothea, au cours d'une promenade nocturne dans Paris, dévoile l'obsession qui la ronge et l'empêche de dormir : elle ne peut oublier la Shoah, qui a épargné son grand-père, et lui a donc permis de vivre, elle, Alma.

Pas besoin de lire son CV pour deviner qu'elle est étudiante en philosophie et qu'elle est par ailleurs bigrement torturée Alma.

Alors pourquoi appeler roman ce qui ressemble beaucoup à une autobiographie ? Oui mais si c'est une autobiographie, ce qu'elle a fait à 12 ans avec son chien aurait dû la conduire dare-dare chez un psychiatre chevronné... Et si c'est un roman, quid de sa rencontre avec Martha Eichmann ?

On s'y perd mais on s'en fout un peu car il s'agit finalement d'une jeune fille qui a envie d'écrire (pas forcément très bien) pour poser les questions que tout le monde se pose sur la vie, la mort, l'oubli, la solitude, le bien, le mal...

Et il y fort à parier que c'est son jeune âge qui a fait crier au génie, s'il s'était agi d'une quadragénaire, il est probable que le livre serait passé aux oubliettes...
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Survivre

Livre lu dans le cadre de la rentrée littéraire 2017 (merci à Babelio et aux Editions Gallimard/L'Arpenteur).



Pas facile de parler, de faire la critique de ce livre. Récit très court, relaté comme un journal de la narratrice.



Suite à l'attentat du Bataclan, celle-ci nous fait partager ses pensées, ses états d'âme suite à ces évènements. Soit. Je peux comprendre qu'habitant Paris, craignant à tout moment qu'un autre acte se reproduise (même moi à Paris j'y pense mais aussi partout ailleurs), mais elle nous relate également ses achats compulsifs pour se faire du bien (baskets nike), son obsession à aller regarder les vidéos de décapitation, d'enfants égorgés, de suicide filmé d'une adolescente, d'otages brûlés, ses jeux vidéos sanglants, guerriers, ses tocs : mémoriser les nombres de morts des massacres etc....



C'est la narration de ses angoisses mais aussi de son attrait, malsain à mon avis, pour le terrorisme. Nous avons tous été attirés parfois par les images même si cela nous révulse. Mais elle, elle ne juge pas les auteurs des actes, elle est même à l'affut de nouveaux évènements.



Elle se pose la question : et moi aurais-je pu basculer ? Elle vient de perdre son boulot, sa grand-mère est morte et elle a décidé de ne pas accompagner sa soeur aveugle aux obsèques (jolies pages sur sa relation avec celle-ci). Sa technique pour se changer les idées : comptabiliser les morts, voir le maximum d'images insoutenables, de les recher même avidement sur internet !



Elle décrit très précisément les scènes de torture ou d'assassinat, dans les moindres détails, mais elle regarde, elle tient bon et s'aperçoit même que ses voisins regardent par dessus son épaule pour regarder également. L'horreur attire et l'on a meilleure conscience quand on peut dire : moi je n'ai pas regardé mais j'ai vu quelqu'un près de moi visionner la scène et j'ai donc vu les images !!!!



Malaise de la jeunesse ? peut-être, Angoisse ? Sûrement, mais de là à en faire un livre ? Pourquoi pas après tout, il y en a eu bien d'autres mais de là à provoquer l'incompréhension du lecteur... La recherche de la contre-verse : voilà peut être une piste. J'ai lu que son premier roman avait déjà fait polémique malgré les encouragements de JM LE CLEZIO et c'est peut-être, je dis bien peut-être, le but recherché : choquer, heurter. Mais il est peut être le reflet également d'une jeunesse qui cherche à comprendre, à s'informer, à se faire sa propre opinion.



Peut être le récit n'est pas autobiographique et que Melle FA. Finkelstein a voulu retranscrire l'état d'esprit d'une jeune femme parisienne face à ces événements ?



Elle a ses petites techniques pour surmonter certaines situations : pendant les minutes de silence elle tente de se souvenir ce qu'elle a fait la veille et ainsi elle ne voit pas les minutes passer.



L'xplication est finalement peut-être dans les dernières pages du livre :



"... Pas plus que je ne connais les morts du d'Oradour. Pas plus que je ne connais les morts du Bataclan. Je me permets tout avec les morts : comme s'ils ne pouvaient pas se venger. Ma conduite a quelque chose d'inadmissible. Je me dis qu'il se peut que je profite d'eux pour donner un sens à ma vie ; qu'il se peut que je profite de l'horreur qu'ils ont traversée pour échapper au vide de mon existence. Pouvoir me dire enfin j'ai une cause à défendre....."



Mais il faut garder l'espoir, il y a malgré tout un sursaut dans l'attitude de cette jeune femme un peu "paumée" et l'on veut croire qu'elle va réussir à sortir de cet engrenage morbide.



A écrire cette critique et à réfléchir aux pensées et actes je me dis aussi qu'elle n'est pas la seule : beaucoup de gens passent des heures entières rivés à leurs écrans (tv, téléphone, ordinateur) dans l'espoir d'une scène, d'une image, d'une info..... Les grands responsables sont les médias, journalistes, la sur-enchère de l'image, du mot, du témoignage. Comme si les actes en eux-mêmes n'étaient pas assez terrifiants !



Dans ces conditions il est difficile d'attribuer une note : l'écriture est simple, fluide, accessible. Le thème et les moyens sont extêmes. Je suis très partagée et indécise et il y a peut être conflit de génération : je ne suis pas de sa génération et certains passages m'ont "choquée" "heurtée" "indignée" mais ce récit a au moins un avantage c'est qu'il soulève bien des discussions.
Lien : http://mumudanslebocage.cana..
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Survivre

Impossible au lendemain du double attentat de Barcelone de passer à côté du dernier roman de Frederika Amalia Finkelstein à paraître pour cette rentrée littéraire. Comment oublier, comment Survivre à de tels évènements ?



Ava a 25 ans. Elle vit à Paris. Un matin, elle prend le métro pour se rendre à l'Apple Store des Champs-Élysées, où elle travaille. Sur le quai du métro, des militaires patrouillent pour assurer la sécurité des voyageurs : ce climat sécuritaire l'angoisse. Elle repense aux attentats du 13 novembre. Elle est hantée par une photographie prise au soir du massacre au Bataclan, où gisent les corps de jeunes gens de son âge. Son rapport aux terroristes est ambigu. Elle n'arrive pas à éprouver de la haine à leur égard, certainement parce que, terroristes et victimes, tous, ou presque, sont de la même génération : la sienne. En arrivant sur son lieu de travail, Ava révèle qu'elle a été licenciée. Elle a du mal à accepter sa situation alors elle se promène. Elle passe devant le Bataclan, puis elle s'arrête dans un café. Sur les écrans de télévision, un attentat se déroule en direct. Ava est à la fois fascinée et blasée par le défilement des images sur la chaîne d'informations. Elle se met à penser à sa grand-mère, qui vient de mourir à Buenos Aires. Elle rêve qu'elle part pour l'Argentine, où son enterrement est en train d'avoir lieu...



Survivre est un roman percutant. A travers l'angoisse de son héroïne, Frederika Amalia Finkelstein traduit parfaitement l'état d'esprit dans lequel nous sommes post-attentats. En effet, depuis ce 13 novembre, soir du plus grand massacre en France depuis Oradour-sur-Glane, tout est possible. Bien que conscients de cette éventualité, l'auteure nous rappelle, s'il en était besoin, que nous vivons collectivement dans la peur du prochain attentat. Forte de ce constat, Frederika Amalia Finkelstein s'est surtout focalisée sur sa génération, cette génération née avec les écrans, ultraconnectée mais paradoxalement en proie à une immense solitude. C'est à travers son héroïne, qu'elle lui rend hommage. Elle souligne l'ambivalence de cette dernière à la fois auteure et cible des attentats, à la fois fascinée et apeurée par les images violentes et obscènes de ces massacres qui circulent en toute impunité sur tous les réseaux sociaux. Il souffle un vent morbide sur cette génération. La mort est d'ailleurs omniprésente tout au long de ce récit. Néanmoins et c'est là tout l'intérêt, Survivre résonne comme un exutoire à cette guerre d'un nouveau genre pour in fine, célébrer la vie.



L'écriture de Frederika Amalia Finkelstein est d'une justesse percutante qui donne une force inouïe à ce court récit qui ne peut laisser indifférent. Bien que la thématique abordée demeure tristement d'actualité, Survivre est à lire, ne serait-ce que pour collectivement, mesurer l'urgence qu'il y a à vivre et à ne surtout pas céder à la peur, ni sombrer.



J'adresse tous mes remerciements à Babelio et à la collection l'Arpenteur des Éditions Gallimard pour l'envoi en avant-première de ce roman de la rentrée littéraire dont nous entendrons parler.


Lien : https://the-fab-blog.blogspo..
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Survivre

Depuis l'Oubli j'ai été happé par le style de cette jeune écrivain qui me transporte dans sa vision difficile et réaliste d'un monde qui change, là ou technologie, histoire, renversements planétaire se succèdent comme pour signifier une transition sans retour de l'Homme. Un roman à la portée essentielle, qui laisse une trace durable!
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L'Oubli

On ne peut pas dire que cet ouvrage me laissera un souvenir impérissable...

Roman aux allures d'essai, on y croise Alma, la vingtaine, perdue entre hier, aujourd'hui et demain, qui nous livre pêle-mêle ses réflexions sur la vie, la mort, l'Histoire, et finalement tout ce qui lui passe par la tête. Pêle-mêle est bien ce qui m'embarrasse... Nous voilà plongés dans les méandres du cerveau d'Alma tels des analystes cherchant à démêler les névroses de cette jeune fille perturbée par la fuite du régime nazi de son grand-père.

Phrases courtes, liaisons parfois absentes et répétitions outrancières ("j'ai déjà dit que..", "je vous répète que.." "je crois avoir dit que..") auront eu raison de ma capacité à suivre le fil de son raisonnement. Pour ma part, relativement hermétique à cette écriture confuse (qui de fait illustre cette confusion de pensées de l'héroïne j'en conviens), je n'ai pas su m'attacher à Alma. Ce n'est que le sujet original (le droit à l'oubli du passé plutôt que le devoir de mémoire) qui m'a permis de finir ce livre.

Pour conclure, je laisserai le dernier mot à Alma, capable d'extrême lucidité, qui résume en 6 mots mon sentiment final: "Je dis et redis des évidences..."

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Survivre

Merci aux éditions Gallimard et à Babelio pour cette découverte de la rentrée littéraire.



Un livre dont on ne sort pas indemne. Quelle claque ! On en sort un peu secoué, dérangé et on réfléchit.



Je vous avoue que j'ai dû m'accrocher au début de la lecture car cela dérange, c'est dur, difficile.



La narratrice est jeune, elle est marquée par la soirée du 13 novembre 2016. Elle ne peut s'empêcher, fascinée, d'observer continuellement, obsessionnellement la photo des corps dans la fosse du Bataclan.



Lorsqu'elle court, elle se passe en revue mentalement les victimes des attentats, des diverses catastrophes du genre dans le monde. Elle est continuellement angoissée et attend avec méfiance et peur le prochain attentat.



C'est la peur au ventre qu'elle prend les transports en commun.



C'est l'histoire d'une génération des 23-28 ans, qui depuis sa plus tendre enfance vit dans un monde virtuel, dans la violence des jeux vidéos "GTA ... etc..", et qui banalise au final le sang et la mort.



Elle fait partie d'une génération "inter-connectée" et reçoit des notifications à chaque fois qu'il se passe un acte terroriste ou tout acte glauque (un suicide en direct) partout dans le monde, car il se passe toujours quelque chose dans le monde, à chaque seconde, alimentant encore plus sa peur et son trauma.



Sa grand-mère est morte, elle devrait prendre l'avion pour se rendre à l'enterrement avec sa soeur et sa mère. Elle se questionne, ira-t-elle les rejoindre ?



Je ne vous en dis pas plus car petit à petit les choses s'interconnectent, apporte un sens plus profond.



Le début de lecture m'a au départ un peu perturbé car mais la magnificience de l'écriture qui porte littéralement le récit, m'a happée et emmenée rapidement au terme de celui-ci.



Un récit qu'il faut laisser "descendre", qu'il faut "digérer" et qui prend tout son sens après la lecture.



Ma note : 7.5/10
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L'Oubli

N°837 – Novembre 2014.



L'OUBLI – Frédérika Amalia Finkelstein.



D'emblée, la narratrice se présente comme une jeune fille, Alma-Dorothéa, entre 20 et 25 ans, parisienne, étudiante, juive, très au fait de la modernité entre la musique punk, le Coca Cola et la culture branchée, bref une jeune file de son temps et qui revendique le droit à l’oubli. Pour quelqu'un qui est juif, c'est plutôt étonnant puisque on ne manque jamais une occasion de nous rappeler la Shoah. Ce phénomène qui a d'ailleurs largement été utilisé dans le domaine de la création artistique est récurrent. Je n'y vois personnellement aucun inconvénient puisque ne pas oublier la barbarie qui sévit dans nos sociétés, et parfois sous les formes les plus inattendues, est plutôt une bonne chose même si une piqûre de rappel n'empêche nullement que cela se reproduise régulièrement. Pourtant, nous savons aussi que l'oubli comme le mensonge, la trahison et le meurtre, caractérisent bien l’espèce humaine. Elle est certes prompte à s'indigner ponctuellement pour des faits jugés inadmissibles, à donner à cette réaction toutes les marques de publicité avec l'émotion et la révolte qui vont avec, mais les jours suivants toute cela passe à la trappe et on s'intéresse à autre chose.



Bref, la narratrice revendique le droit à l'oubli. Dont acte ! Pourtant chaque moment de sa vie la ramène à la Shoah, le souvenir de son grand-père, juif polonais, mort en camp d’extermination. Veut-elle étouffer ce souvenir quand elle nous parle de sa vie parisienne sur les Champs-Élysées, entre Ferraris et Cartier, jeux vidéos et Pepsi avec des réminiscences de son enfance. Est-ce l'idée même de la mort qui revient sous sa plume quand elle parle de son chien disparu, de la solitude qui elle aussi fait partie de la condition humaine, de la séparation du ciel et de la terre ? Ses pérégrinations dans Paris sont évoquées avec des préoccupations de nature philosophique et du souvenir des nazis et de leurs chambres à gaz mêlées à des séquences de sa vie au quotidien. Il est souvent question de la mort mais comme un philosophe en parlerait ou bien elle évoque à l'envi le suicide d'Hitler, un mode de vie basé sur l'oubli tout en constatant que celui-ci est impossible. Elle parlent de la souffrance des juifs et du monde. Mais aussi de bien d'autre chose parfois inattendues...Les hasards de la fiction lui font rencontrer la petite-fille d'Eichmann mais elle ne ressent aucune émotion particulière et cette jeune fille elle aussi pratique l'oubli malgré ce nom si lourd à porter.

Bref, tout cela m'a paru bien superficiel et peut-être un peu loin du sujet. Les idées partent dans tous les sens, le texte est sans réelle unité et pour moi sans aucun intérêt.



Le style m'a paru décousu et je suis resté absolument insensible à la petite musique que sans doute il veut distiller. Je suis peut-être passé à côté d'un chef-d’œuvre mais je me suis franchement ennuyé mais j'ai lu cependant ce roman jusqu'à la fin puisqu’il était présenté dans la presse comme le livre d'une auteur pleine d'avenir. Je voulais me faire une idée personnelle et ainsi pouvoir en parler, mais, le livre refermé, c'est la déception qui est au rendez-vous.



©Hervé GAUTIER – Novembre 2014 - http://hervegautier.e-monsite.com
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L'Oubli

Une imposture lamentable. Cette jeune auteur aurait mieux fait de garder ses révélations suprêmes pour son chat ou son coiffeur. Le droit à l'oubli? Il n'y a qu'à espérer que ce roman en bénéficiera...
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L'Oubli

Alma Dorothéa est une jeune femme seule et solitaire. Elle se promène dans Paris et elle se pose pas moins de 10 questions à la seconde !!! C'est de cette errance que Frederika Amalia Finkelstein tire ce roman particulier et atypique. D'une écriture philosophique, elle dépeint un univers froid et nous tient à distance de son personnage.

Une expérience de lecture déroutante !
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L'Oubli

J'ai aimé:

- Le pari réussi d'un monologue intérieur qui s'accorde à l'unité de lieu (Paris, ses rues) et de temps ( une nuit) sans ennuyer le lecteur.

- Le rythme du texte et sa simplicité.

- Des échappées par l'imaginaire dans le temps (les déportations, les nazis) et l'espace ( Buenos Aires, la forêt de Compiègne)

- L'évocation des fantômes ( 6 millions de morts, le labrador Edgar, le pur-sang, le grand-père, le frère absent)

J'ai moins aimé:

- Certaines banalités qui se voudraient des vérités profondes

- Un manque de vocabulaire, les mots qui surprennent et colorent le texte, lui donnent son poids. Elle n'est pas encore tout à fait écrivaine.





Quand on marche, parfois, il y a ce flux de pensée qui épouse notre rythme, qui se déroule sans accroc et s'accorde au mouvement, une voix off intérieure sur le paysage qui défile.



Et on se dit, quel dommage que je ne puisse noter tout ça, les phrases s'envolent et ne reviendront plus, les pensées se suivent et se remplacent les unes les autres. On oublie ce qu'on a pensé. Ce serait bien si on inventait un traitement de texte télépathique pour les sauver de l'oubli.

Alma, le personnage du récit, le double de l'auteur, semble avoir déniché ce traitement de texte télépathique. Son monologue intérieur se déroule comme un continuum, à la limite de la logorrhée verbale. Ce n'est pas la langue littéraire de quelqu'un qui écrit et pèse ses mots, le vocabulaire est dépouillé comme quelqu'un qui pense.



Elle marche dans Paris, elle voudrait oublier...

« Il fait nuit, je marche rue d'Hauteville avec pour seuls compagnons des morts.»

Elle porte ce nom "Finkelstein" qui l'empêche d'oublier.

« Suis-je emmurée vivante par la trace qu'ont laissée sur moi mes ancêtres ? »

Elle se demande pourquoi les nazis ont voulu l'empêcher de naître, en essayant de tuer son grand-père comme les six millions d'autres juifs en six ans, ils ont échoué, mais elle connaît par coeur les noms des camps de concentration. Et elle ne peut s'empêcher d'imaginer cette scène: son grand-père, émigré à Buenos Aires, a forcément croisé Eichmann dans un café. Eichmann, dont elle rencontre la petite-fille à Paris.



Nous suivons donc Alma sur 110 pages, elle parle dans notre tête, c'est comme une jeune amie aux pensées un peu trop graves, une fille de son temps qui adore le coca-cola, les jeux vidéos et les écrans en général, mais se laisse rattraper par l'angoisse de la mort. Un beau texte qui dissimule sa profondeur dans le mouvement de la marche. Ce sera intéressant de suivre Frédérika Amalia Finkelstein sur la durée. . C'est la critique de Marine Landrot dans Télérama qui m'a donné envie de le lire. Je ne partage pas totalement son enthousiasme, ça manque de mots, il faudrait une sémantique plus riche, moins dépouillée, pour nourrir cet univers sombre. Mais ça reste un beau texte, on verra si l'auteur peut aller plus loin.
Lien : http://killing-ego.blogspot...
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L'Oubli

Un livre sublime sur cette mémoire dévastée, hyperréelle, du plus grand trauma de notre siècle. Vu à travers la génération de l'oubli, cette jeunesse perçoit le passé comme un substitut d'une fiction qu'elle consomme tous les jours et qui finit par devenir une tare profonde, un poids à porter, entêtante comme une chanson pop, visuels comme les morts qui s'amoncellent sur son chemin. Une plume qui hypnotise le lecteur de bout en bout, un roman de son temps qui m'a troublé et ému. Je le conseille grandement.
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