Rêvasser à son tour. Et réaliser dans une béatitude électrique que la nuit avait un goût de cuberdon.
Le silence nous attacha alors les regards. Solidement. Sous ses cheveux mi-longs très noirs et ses sourcils broussailleux, seuls persistaient deux minuscules points verts fanés au milieu de boursouflures. Je ne voulais plus les lâcher.
Nous n'avons pas toujours été d'accord sur tout. Et cela, dès notre rencontre, soixante-trois ans auparavant. Mais nous nous sommes aimés. Comme beaucoup d'autres avant nous. Nous nous sommes aimés sincèrement. Comme on peut en rêver lorsque l'on a quinze ans et que l'on croit tout connaître de l'amour alors que nous n'en savons rien. Nous nous sommes aimés tendrement. A coups de banalité, de train-train, de déchirures inopinées ou d'inoubliables baisers. ("Boulevard de la liberté", p.76)
Le feu de bois crépite dans la cheminée. […] Mes yeux s’y perdent. Et quand ils s’y perdent, je sais que je vais les voir. À travers les flammes qui serpentent au ralenti, dans cette lumière dansante, mon monde scintille. C’est là que je retrouve mes amis. J’en ai plein. Ils portent des chapeaux pointus couleur cerise et de longues barbes frisottantes. Ils sont vieux. Ils veulent que je les appelle Nutons. Ou Moutons ? Je ne sais plus… Cela n’a pas d’importance.
Le ticket n'est plus valable. Ainsi vais-je devoir descendre à la prochaine gare. Une gare qui se rapproche de plus en plus vite. Mais en attendant, le train roule. Et tant qu'il roule, nous avons une dette envers lui.