Peu à peu, Brando entre dans la peau de Stanley Kowalski, la brute d'Un tramway nommé désir.
Il le décrit comme un homme aux poings fermés.
C'est bien vu.
Chaque jour qui passe, l'acteur semble souffrir. Kazan le soutient, lui murmure des conseils, l'écoute. Qu'est ce cet étrange garçon a dans le ventre? Nul ne le sait!
Mais Kazan pressent le génie. Il couve son poulain.
L'ennui, c'est que Jessica Tandy( Beignets de tomates vertes) n'est pas habituée à travailler de cette façon .
On lui donne un texte, elle l'apprend, elle le récite, elle le travaille, elle le répète, elle est au cordeau.
On lui donne rendez vous, elle est là, à l'heure.
Pas Brando!
« Tom Cruise a l’air con. Il regarde sa fiancée avec l’œil d’un charcutier sibérien devant une tranche de roquefort. Quand il se bat avec les aliens, on jurerait qu’il passe la serpillière sur le carrelage de la cuisine. " Edge of tommorow
Top gun est un film viril qu'on peut partager en deux ; il y a les scènes d'avion (auxquelles personne ne comprend rien ; c'est juste des avions qui volent dans tous les sens avec des types qui aboient : "Tango, tango, pieds paquets, Charlie, goémon !"), et il y a des scènes de douches fumantes ou de vestiaires douteux (avec des dialogues du genre :"c'est dangereux, mais faut continuer". Continuer quoi ? Le savonnage des orteils ?).
« le problème, avec le cinéma, ce n’est pas la critique, c’est le public. On a bien inventé la démocratie sans le peuple, on devait élargir le concept aux salles de spectacle. Le cinéma sans les gens, enfin ! »
"Inch Allah", dit Jean-Claude Pascal ripoliné au brou de noix, coiffé d'une jolie descente de lit, l'œil cerné de réglisse. "Mektoub", répond Angélique, choucroutée au Magimix, visiblement émue d'avoir à dire une phrase aussi longue d'une seule traite.
Angélique et le sultan. (France, 1967)
Jacques Perrin, marin décoloré, veut Catherine Deneuve, danseuse raide, Michel Piccoli marchand de trompettes, désire Danielle Darrieux, bistrotière coiffée par Carita. Gene Kelly américain, cherche Françoise Dorléac, pianiste en chambre. George Chakiris, forain, rêve de West side story et conduit un camion Renault. Agnès Varda , Mme Jacques Demy pour l'état civil, passe en religieuse. Les demoiselles de Rochefort chantent (souvent faux), dansent (approximativement) et dialoguent (en alexandrins).
C'est particulièrement jouissif.
"Les demoiselles de Rochefort" (France 1967)
C'est une pièce de collection, un dessus de cheminée, un nanar de concours : il ne se passe de rien. Rien de rien, mais en couleurs (Agfacolor rutilant). C'est joué par des acteurs teutons synchronisés à la pioche, filmé par un metteur en scène gâteux, écrit par un scénariste sans doute mort, et chanté par Georges Guétary. C'est dire l'ampleur de la débâcle. (A propos d' "Amour, Tango et Mandoline", Allemagne, 1957).
Désormais, éternellement, ce sera lui qui sera observé, espionné, écouté. Il ne le sait pas encore, mais sa vie va devenir un show permanent. Avec des acolytes, des sbires, des figurants, des amis, des traîtres. Jack va être la star d'un film fantôme, avec une vedette blonde.
Or, à Hollywood, l'amour éternel dure cinq minutes, c'est la règle. Chez Brando, il dure ce que dure la phrase. Et encore, passé la première virgule...
»Le cinéma n’est pas une démocratie comme l’a souligné Abdellatif Kechiche sur le plateau de « La vie d’Adèle ». Si tout le monde se mêle de la fabrication d’un film, c’est le foutoir. Si Orson Welles avait soumis le tournage du « Procès » au vote populaire, il aurait abouti à « Bienvenue chez les Ch’tis », il aurait fait Kafka dans sa culotte. »