ROOM Bande Annonce VF 2010
"Dors, min p'tit quinquin
Min p'tit pouchain,
Min gros rojin..."
Dors, mon petit enfant, mon petit poussin, mon gros raisin. Les notes coulent sans heurt, pas plus douloureuses que des piqûres d'épingle. Une vieille berceuse picarde un peu simplette que sa grand-mère lui chantait dans la petite mansarde parisienne.
[...]
Blanche se redresse sur le bord du lit et reprend :
"Tu m'f'ras du chagrin
Si tu n'dors point qu'à demain"
"Ferme ton clapet, bébé, avant que je ne te le cloue moi-même" traduit Jenny très librement. J'imagine que la plupart des berceuses se résument à ça."
Blanche se souvient de ce que c'est, d'avoir quinze ans : on se sent prisonnière d'entraves indéfinissables, on a l'impression que la vie n'appartient qu'aux autres. Et puis un jour, sans crier gare, tout commence.
"Tout le monde a besoin d'un zeste d'inattendu pour distinguer une journée de la précédente".
Blanche est experte dans l'art d'aguicher. C'est une allumeuse, qui s'y entend comme personne pour faire naître une flamme, la moucher, la rallumer, la souffler à nouveau.
Oser croire que nous sommes peut-être le jouet des étoiles. Qu'elles nous tirent dans un sens ou dans l'autre avec leurs fils en soie invisibles.
Sa vie est régie par le même ordre religieux qui a dirigé le prétendu foyer dans lequel elle a grandi. Un monde secret et sans queue ni tête, où les enfants sont privés d'anniversaire et où les sœurs n'ont plus de lien de parenté. Un lieu pour les rebuts de la société. Une simple portion d'égout, comme elle le dit elle-même.
Je sens l'homme-squelette juste derrière la porte. Il a déjà pris une petite vie à notre insu ; il traîne maintenant à proximité en effectuant sa danse macabre et en balançant son crâne ricanant entre ses doigts osseux.
Pourquoi c’est le Dehors qui a tout pour lui ? Maintenant, à chaque fois que je pense à un truc, comme des skis, des feux d’artifice ou des îles, des ascenseurs ou encore des yo-yo, je dois me rappeler que c’est pour de vrai, qu’ils se rencontrent tous ensemble dans le monde du Dehors. Ça me fatigue la tête. Il y a des gens aussi : pompiers –maîtresses d’école- cambrioleurs –bébés –saints – footballeurs et plein d‘autres sortes, ils existent tous en vrai dans le monde de Dehors. Mais pas moi ; moi et Maman on est les seuls qui y sont pas. On existe quand même pour de vrai ?
L'homme finit toujours par composer avec toutes les épidémies. Ou au moins par les contenir. Nous avançons en pataugeant et en partageant cette Terre avec chaque nouvelle forme de vie.
Quel drôle de métier que celui d'infirmière. Bien que n'ayant aucun lien avec nos malades, nous devenons par nécessité très proches d'eux durant quelque temps - tout ça pour souvent ne plus jamais les revoir.