Bruno Conem

Mais bon sang il ment, il a toujours menti ce gamin, comme elle, il est comme elle, il profite  des autres, il sait qu'il est malin pour ça et ... ça lui confère un air hautain et méprisant, je ne supporte pas ça, je veux et dois casser ça en lui. Il sait que je sais combien il m'a menti et a essayé de se jouer de moi, de jouer avec les faits, avec la réalité. Et ça veut être journaliste !?
C'est bien de savoir faire tourner les autres en bourrique, se conduire en patron, mais il y a des personnes qu'il ne faut pas se mettre à dos... J'étais assez fier, je ne lui ai pas dit : ses prises de pouvoir et de direction dans ses jeux virtuels. Même si ce n'est jamais que du virtuel, ça montre qu'il tient de moi, de mes qualités. Mais précisément, ce n'est que du virtuel, bon sang !, fils, la vie c'est du réel. Et si tu en chies, tu dois te montrer fort. Survivre, vaincre, forcir, grandir, être fier. Je veux être fier de toi encore, ne me déçois pas. Ne me déçois pas !

Son regard que je ressentais incisif en diable me quitte et le soulagement me gagne. Soulagement et en même temps une colère croissante contre ce type qui manque à ce point de lucidité et de tact pour laisser tranquille quelqu'un qui ne va pas bien. Vous pensez peut-être que j'oublie de parler de la honte possible du fait que tous les étudiants présents ont assisté à cette scène pathétique, mais sur le moment j'en avais vraiment rien à foutre. C'est un sentiment qui vient a posteriori. Et encore.
La colère ne va plus cesser de me poursuivre tout au long des heures qui suivent ce cours déjà tardif.
Cette colère va gâcher mon suicide.

Un chouette gars, Monsieur Z. Suicide

- J'ai appris quand j'étais dehors que M. Z. était mort. Suicide... C'était un chouette gars, on parlait de musique, il avait plein de merdes avec sa famille, un peu rejeté, sans avoir non plus de famille à lui, pas d'enfants. Un peu « hors », « outsider »... Je m'identifiais. Enfin « m' identifiais », je me reconnaissais un peu en lui. Ca m'a fait mal, ça m'a fait sale...
- Oui, je le suivais... C'est triste, il était vraiment un chouette gars, oui. Le sosie de Jacques Higelin... Difficile de trouver sa place, d'aimer cette vie... Mais je m'y attendais pas... Et l'alcool n'a pas aidé...
- N'empêche... Mort comme une merde... C'est dingue, ça sert à quoi une vie pareille ?
- Oh... Oui, en même temps, quelles sont les vies vraiment utiles ? Vous croyez que son exemple peut vous être utile ?
- Je sais pas, j'ai pas envie de finir comme lui...
- Le chemin à ne pas suivre, c'est pas si mal au fond, c'est aussi un message...

Assis au bord de la couverture, les deux chats l'observent. Il les entend ronronner, il a envie de les serrer, d'approcher leur douceur et leurs ronrons, de les faire entrer en lui en quelque sorte. Il tend la main et ils s'éloignent patiemment pour s'installer tout juste hors de sa portée.

Journal d'un fumeur de crack en jeune homme,
Bill Clegg

Avertissement

Rien n'est complètement vrai dans les mots et historiettes qui suivent. Rien n'y est complètement faux, non plus. Certaines ont des titres, d'autres pas.
J'ai abandonné ces textes en fin 2017, pour les reprendre dans cette fin d'année 2019. S'il y a quelques dates qui traînent dans les pages qui suivent, c'est... pas important.