Une auberge à l'écart, dans les années 1960, où trois femmes en quête de liberté se déchirent tandis que se vide le lac en contrebas, révélant peu à peu le village d'autrefois, englouti avec ses secrets. Un hôtel de verre, luxueux et inaccessible sauf à quelques privilégiés, comme la métaphore d'un monde dominé par la finance où la réalité disparaît derrière l'illusion d'une économie de spéculation. Un conte macabre et terrifiant, où une petite fille observe la dérive meurtrière de son père qui, par crainte du monde extérieur, a peu à peu enfermé sa famille dans une maison transformée en forteresse.
Trois polars en forme de huis clos, addictifs et suffocants.
Effacer les hommes de Jean-Christophe Tixier (Albin Michel)
L'hôtel de verre d'Emily St. John Mandel (Rivages/Noir)
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" Le passé et l’avenir formaient un tout. Le temps n’était pas aboli : il était d’une plénitude plus grande. C’était un ami fidèle qui ne demandait qu’à être là. »
On envoya un hélicoptère. On chercha partout, sur la côte, dans la forêt, le long du Cou et dans la partie nord de la grande île.
Pendant ce temps, Liv Haarder se tenait immobile et silencieuse dans une benne fermée près de l'atelier de son père. Dissimulée au milieu de cartons, pneus, journaux, magazines, jouets, absorbeurs d'humidité, sacs de sel, bassines, cassettes vierges, outils cassés, bonbonnes de gaz, paquets de biscuits, pots de peinture, sachets de bonbons, vêtements usés, piles de livres et tapis. Des objets dont on avait un jour constaté la disparition, mais dont on avait fini par oublier l'existence.
- Qu'est-ce que tu veux devenir, Mogens ?
- Quand je serai grand ? Inventeur. Je veux devenir inventeur.
- Mais quand tu seras mort ? Qu'est-ce que tu veux devenir quand tu seras mort ?
Mogens le dévisagea :
- Justement, je ne mourrai pas. J'inventerai quelque chose qui m'empêchera de mourir, et je gagnerai assez d'argent pour en vivre. Et je t'empêcherai de mourir aussi. Mais il ne faut le dire à personne.
Ce soir-là, je les ai entendus parler dans le séjour. J'écoutais à la porte. Ils parlaient tous les trois, ma mère aussi, et à un moment mon père s'est mis à crier. Jamais je ne l'avais entendu crier comme ça. Le lendemain matin il avait les cheveux blancs.
Il ne restait plus que deux jours avant Noël, et il y avait une drôle d'ambiance.
Parmi mes souvenirs les plus anciens, il y a l'odeur de la résine. Létrange picotement dans les narines, les sucs poisseux sur nos mains et la voix douce de mon père parlant du jus qui coulait à l'intérieur des troncs. UN jus extraordinaire car il protégeait l'arbre contre les maladies et guérissait ses blessures.
PS : Je ne sais pas si je dois considérer notre vie comme un conte de fées ou comme un roman d’horreur. C’est peut-être les deux. J’espère que tu sauras entrevoir le conte de fées.
J'ai fini par avoir une grosse boule de phrases naufragées dans la gorge. Des mots brisés et sans rapports entre eux, des amorces interrompues, des conclusions restées en suspens, des lignes trop serrées, des constructions fautives, des gutturales agglutinées.
Mon chagrin était resté bloqué, car je ne devais pas te le communiquer. Et à ton père non plus, car il avait son chagrin à lui. Alors je l'ai gardé en moi. C'était ma façon de te protéger. Ton père a fait autrement.
Jens estimait qu'il était de sa responsabilité de conserver tous ces objets que les gens méprisaient. Il était émotionnellement lié à chacun d'eux. L'idée qu'on puisse rompre ce lien le remplissait de frayeur.
Le monde de Jens Haarder n’était pas gouverné par les règles auxquelles obéissaient la plupart des gens. Il ignorait ce qu’étaient le classement et l’organisation. Il ne connaissait que les sentiments et les souvenirs. Une lime ne devait pas forcément être rangée à côté d’une autre lime. Si on l’avait trouvée sur une décharge, elle avait sa place à côté de la lampe à pétrole et de la vareuse provenant de la même décharge. Il y avait à cela une certaine logique.
Si la faux était accrochée près de la grande carte de l’île suspendue au-dessus de l’établi, c’était parce que Jens lui trouvait une ressemblance avec le bras de terre qui s’étendait au nord-est de Korsted. La carte était cachée là. C’était le plus important.
Au début il m'a semblé bizarre de l'avoir à côté de moi. Mais j'ai fini par m'y habituer. En un sens, c'était bien d'être là tous les trois : mon frère jumeau, ma petite soeur et moi. Sauf que moi, on me faisait passer pour morte alors que je ne l'étais pas.