Lorsque les parents de Lincoln rentrent de leur cours de danse, le projecteur de Lola les éblouit aussitôt. Stupéfaits, ils découvrent les hauts grillages qui entourent désormais leur maison. Les portes s'ouvrent pour les laisser passer et ils s'engouffrent dans la cour.
Lisa s'approche, un képi de policier sur la tête, accompagnée de Bobby.
— Bonsoir, chers ascendants, annonce-t-elle. Nous devons procéder à une simple fouille au corps de routine.
Le bistro italo-chinois Giovanni Chang est un restaurant incroyable : comme son nom l'indique, il mélange les cultures latines et orientales, jusque dans sa décoration. Le bâtiment est agrémenté des couleurs de l'Italie, mais il est construit selon l'architecture chinoise.
Charles ! crie Lana en poursuivant le chien, qui s'enfonce jusqu'au cou dans cette nourriture inespérée. Tu es censé te jeter sur les fesses du voleur, pas sur le bacon ! J'aurais dû entraîner le chat...
— Si tu as des objets de valeur à protéger, tu peux les stocker dans la « chambre forte », lui explique Lisa.
— Pourquoi est-ce qu'on utilise la salle de bains comme chambre forte ? demande Lincoln, surpris.
— À cause des caméras que j'ai installées l'année dernière, réplique Lisa sans réfléchir.
Cela fait longtemps qu'elle réalise une étude sur l'utilisation des toilettes par sa famille, avec des heures précises et des analyses poussées, mais Lincoln n'aurait jamais imaginé qu'elle irait aussi loin.
— Tu as installé des caméras ? s'étrangle-t-il.
— Euh... nooon, ment Lisa, soudain très mal à l'aise.
Elle s'enfuit pour éviter toute autre question gênante, juste au moment où Luan arrive avec sa marionnette.
— Je crois que c'est l'endroit idéal pour évacuer nos affaires, plaisante-t-elle. Hihi, tu as compris ?
- Tout c'que j'ai c'est mon yo-yo porte-bonheur. (...)
- Pourquoi tu appelles ce truc "un porte-bonheur" ?
- Parce que j'ai de la chance si j'arrive à le faire remonter !
- C'était mieux lorsque les gens essayaient de vivre en harmonie avec la nature. Toutes ces machines ne font que polluer et créer des problèmes.
- En tant que non-maitre, avant l'apparition des machines, il y a beaucoup de choses que je n'aimais pas. Les machines ont rendu les maîtres et les non-maitres plus égaux. Satoru, qui n'est pas un maître, peut aujourd'hui gérer seul son usine. Avant, sans l'aide des maîtres, ça n'aurait pas été possible. La pollution générée est abominable et nous devons y remédier, mais on ne peut pas rejeter toutes les fautes, comme le font les maîtres, sur les machines.
Finalement, c'est pour ça que toutes ses sœurs aiment Lincoln, et qu'on l'adore aussi. Il a parfois des côtés agaçants, il fait beaucoup de bêtises, il agit souvent sans réfléchir et ses plans ne sont pas très aboutis... mais il a un cœur en or. Peu de gens se seraient sacrifiés comme il l'a fait, juste pour éviter à sa sœur de subir des moqueries.
On pense parfois qu'on n'est pas prêt à être grand frère ou grande sœur mais, finalement, si Lincoln arrive à s'en sortir avec une si grande famille, alors pourquoi pas les autres ? Sa technique des trois C n'est pas si bête, finalement. Et on pourrait y ajouter les trois A : Amitié, Amour... et À moi la plus grande part de gâteau !
- Je n'ai pas d'oreille.
- Vraiment ? Comment tu entends ce que je dis ?
- Quoi ? J'entends rien.
- J'ai dit "comment tu entends ce que je dis" ?
- Quoi ?
- Comment tu ... laisse tomber.
- D'accord.
Une famille de onze enfants, c'est beaucoup de bonheur, mais ça demande aussi beaucoup d'attention. Alors c'est normal, de temps en temps, de vouloir faire une petite pause et de s'évader.